voilà la suite ! .
CHAPITRE 7 : Le combat de deux hommesLe paysage n'avait rien à envier en ce jour remplis de haine et de tristesse. Les ténèbres avaient envahi tout l'espace autour du lac et des forêts avoisinantes.
La chaleur n'y était plus, seul le souffle froid et humide du vent flottait dans cette atmosphère lourde et pesante.
Les larmes de la Terre continuaient à tomber du ciel, un peu plus calme mais toujours avec violence. Tout semblait attendre la sentence du juge.
Envers celle qui avait brisé le destin de Merlin, envers celle qui, sans le savoir, avait tué celui qu'il chérissait…
Durant une minute de calme, l'un en face de l'autre, la dureté du regard bleutée semblait écraser celui de la traitresse, la rendant encore plus insignifiante aux yeux du monde.
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Là-haut, au-dessus des nuages qui masquaient le regard du soleil, Kilgarah raclait de ses ailes le vide avec véracité puis dans un déchirement hurlant, il donna le coup d'envoi.
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Merlin, debout et immobile, tendit sa main droite en direction de Morgana. Son aura, puissante et chaleureuse, se dessinait tout autour de lui.
La beauté même de cette magie fusionnelle était d'une rareté souveraine. Tous les regards se tournaient sur lui… oui, sur l'enfant de la terre.
La colère divine était le juge suprême mais seul celui qui la détenait, avait le droit de vie, de mort ou de souffrance perpétuelle.
Qu'en était-il du jeune homme ?
Le sorcier qui avait autrefois dans son regard bleu tellement de compassion, pouvait-il lui accorder le pardon ?
L'élu choisi par l'ancienne religion qui avait la souplesse de laisser la vie à tout être vivant, survivrait-il en attribuant une mort ?
Merlin si dévoué et si juste, permettrait-il de faire souffrir le pire des châtiments à son ennemie ?
Comment jugera-t-il son combat pour l'homme qu'il a aimé ?
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Une lueur bleutée vint étinceler cette main tendue, attirant le corps de la sorcière et lentement, en se débattant, cette dernière hurla sa colère.
Trainant à peine ses pieds sur le sol extrêmement humide, son regard était terrifié mais dans son cœur, la haine était toujours présente.
Merlin, les yeux toujours aussi étincelant ne laissait rien paraître dans son regard. Seule la magie pure s'affichait dans ces prunelles.
Avec légèreté, le jeune sorcier cala la poitrine de la traitresse sur sa paume. À ce contact, Morgana fut éblouie par l'intensité de son aura si bleue et si éternelle.
Éternelle… parce qu'elle allait devoir se racheter, telle était sa punition. Merlin n'était pas un meurtrier et son âme laissa enfin transparaitre sa douleur.
De ses yeux, ses perles dévalèrent rageusement sur ses joues. Une peine incommensurable le tiraillait et malgré qu'elle ait osé tuer son roi, Merlin ne la tuera pas.
Cela ne le lui ramènera pas…
Devant cette scène où la jeune sorcière, figée, flottait au-dessus du sol et le jeune sorcier qui la maintenait par le bout de sa main… tous les éléments acceptèrent sa décision.
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Or le juge n'en avait pas fini, la fixant durement, il lui murmura calmement, maitrisant sa colère et son chagrin :
_ Tu as vécu comme tu as vécu ta peur…
Tu as suivi ta haine comme tu t'es fermée aux autres...
Tu as souhaité la mort de plusieurs des tiens !
Moi ! Emrys, juge de la colère divine, je te livre ma douleur !
Le jeune sorcier enveloppa Morgana de sa lumière et devant ses pieds, elle tomba à genoux.
Merlin désirait qu'elle partage sa peine, qu'elle ressente sa douleur et qu'elle comprenne la souffrance destructrice qu'elle lui a infligée.
Le juge s'agenouilla à sa hauteur et leva le visage rougi de la sorcière en tenant son menton entre ses doigts. À quatre pattes, elle s'essouffla subitement en posant une main sur sa poitrine.
Ainsi, Merlin souhaitait regarder aux travers de ses yeux, cette immense peine.
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Face à son juge, la jeune sorcière ne savait pas ce qui l'attendait mais avec fierté, elle dressait son buste d'un air hautain.
Sous cette pluie, elle sentait son corps porté par un souffle frais. L'homme qui l'attirait par sa force, avait un regard insistant et sombre.
Elle tressaillit au contact de sa main sur sa poitrine et tout en hurlant sa rage, elle commença à craindre pour sa vie.
Morgana était entourée par la chaleur de cette colère et finissant à terre, elle ferma ses yeux.
Durant à peine quelques secondes, mais des secondes tellement lentes et d'une durée éternelle, elle la ressentit…
Elle ressentait cette douleur… durement et férocement.
La souffrance de Merlin était telle qu'elle ne trouvait plus assez d'air pour respirer. Elle la picorait en chacun de ses membres la forçant à trembloter encore plus.
Elle était en chacune des fibres de son corps. Cette sinistre dépression lui tordait le bas du ventre, la faisant hurler de chagrin.
Morgana endurait cette tristesse, horriblement elle avait si mal qu'elle serra entre ses doigts la terre molle et humide.
La jeune sorcière en tremblait de morosité et pour la première fois de sa vie, elle savait ce que la plus terrifiante des peines pouvait apporter.
Respirant avec difficulté, ses membres frissonnaient aux rythmes des battements de son cœur si cruellement meurtrie.
Et des larmes…
Des larmes de cette peine et de cette souffrance tombèrent de ses yeux. Elle cligna de ses paupières lorsqu'elle assimila enfin qu'elle n'aurait jamais imaginées qu'une telle douleur pouvait exister.
Elle la pénétrait comme si elle était sienne et ce mal qui la rongeait doucement lui démontrait à quel point sa haine contre Arthur n'était rien à côté de ce que subissait Emrys.
Morgana n'en pouvait plus, sa poitrine se comprimait à tel point qu'elle laissa échapper des hoquets suivis de plusieurs sanglots.
Elle sentait les vibrations de sa gorge au souffle de ses cris amers tout comme ses lèvres qui se mobilisaient aux mouvements de ses hurlements…
Elle secoua la tête avec difficulté :
_ Je… ça fait mal !... Cria-t-elle en fixant les yeux bleutés de son juge.
Oui, elle souffrait et apprenait ce qu'était la vraie souffrance, de celle qui persévérait et de celle qui s'insinuait au plus profond de votre être...
La douleur n'était pas physique, elle l'avait bien compris mais le plus dur avait été d'interpréter cette trahison de l'être aimé, de ressentir cet abandon soudain…
Même la douleur d'un poignard n'était rien comparée à celle-ci. Elle était tenace et ancrée en son âme et son pauvre cœur.
Morgana lâcha ses gémissements plaintifs… cette mortelle sensation… de n'avoir jamais réellement existé… de n'avoir jamais été accepté…
Tout ce que Merlin avait ressenti et malheureusement, ce dernier la ressentait encore davantage à ce moment.
La main toujours sur sa poitrine, elle essayait d'arrêter ses pleurs et ces tremblements mais sa gorge trépidait encore de cette douleur.
Alors Emrys, l'observant, lui souffla douloureusement :
_ Tu aurais pu me poignarder autant de fois que tu l'aurais souhaité… ce que tu ressens à cet instant est la pire des émotions… une condamnation des plus affligeantes…
Les doigts du juge lâchèrent le menton de la sorcière et il ajouta d'une voix vibrante et cassée :
_ Le fardeau est lourd… mais tu sais ce qui est le plus terrifiant à supporter ?… demanda-t-il sans cacher sa nervosité soudaine.
Il voyait dans ses yeux la souffrance qu'elle commençait à peine à réaliser, oui, Emrys la ressentait avec elle…
Et sa mémoire avait gardé le regard noir et sombre du jeune roi à son encontre. Il secoua la tête comme pour évacuer cette image et il continua sur le même ton :
_ L'indifférence !… voilà la pire des sanctions que je pouvais ressentir après autant de dévotion !… après autant d'amitié que j'avais idéalisé !…
Emrys laissa encore de nouvelles larmes couler… des larmes où regorgeaient la colère de son souverain...
Il la sentait se perdre dans cette affreuse tourmente et la relevant de sa main, debout face à lui, par sa force attractive, il lui hurla, essoufflé :
_ Tu as brisé mon lien !… tu as détruit ma vie !… tu as tué !… celui qui faisait de la mienne l'objectif de ma destinée !
Flottant à quelques centimètre du sol, Morgana, ravagée par le supplice du juge, réussit à bredouiller entre ses sanglots :
_ Je… suis… désolée…
Le jeune sorcier serra des dents avant de se pincer la lèvre inferieur :
_ Je ne peux te pardonner car de ton acte, j'ai été banni !... trahi !... rejeté et ignoré !
La colère commençait peu à peu à le reprendre de part et d'autre, alors fermant ses paupières, il prit une profonde respiration car tel un juge, il se devait d'avoir les idées claires.
Si cela n'avait tenu qu'à lui, il lui aurait demandé pourquoi lui ? Pourquoi avoir conservé cette rancœur quand Arthur souhaitait l'aider ?
Il lui aurait demandé d'ouvrir ses yeux et de comprendre qu'à cause d'elle, lui, Merlin ne représentait plus rien au regard de Camelot !
Il lui aurait hurlé sa peine tout en lui demandant si cela la réjouissait tant de voir l'un des siens mourir de la sorte !
Pourquoi devait-il, lui qui était si puissant, se sentir vidé pour un seul homme ! ?
Pourquoi son amour avait été balayé par le seul geste d'un regard meurtrier ! ?
Oui, Merlin avait cette rage au fond de lui et il détestait la sentir parcourir tout le long de son corps… comme ce jour où tout avait basculé…
Mais le juge ne fera rien de tout cela…
La contemplant d'un regard encore plus brillant, faisant accentuer les nuances bleutées et dorées, il lui souffla seulement :
_ Je ne te priverai jamais de ta vie Morgana. Nous sommes faits de la même magie mais ton cœur est trop noir et trop rempli de haine…
Il soupira profondément et ajouta :
_ De ta mémoire, je t'efface tout… de tout Camelot, de toute ta vie, tu ne te souviendras de rien… de ta magie, tu n'en auras plus…
La jeune sorcière, tremblante, le coupa en posant une main sur sa joue, effleurant de ses doigts ses perles, lui chuchota :
_ Je ne mérite pas ta clémence… commença-t-elle en pleurant à chaudes larmes.
Morgana déglutit et reprit :
_ Ta peine m'a fait entrevoir qu'elle était encore plus terrible que la mort de Morgause, plus dure que toutes mes pertes… si je pouvais changer cela, je le ferais…
Emrys la maintenait encore de la force de sa main, immobile en hauteur, elle bascula la tête en arrière lorsque la pluie cessa subitement.
Les nuages semblaient doucement s'écarter pour laisser le soleil éblouir la jeune fille. L'obscurité reprenait ses couleurs d'automne de cette fin d'après-midi.
Sanglotant de sa défaite mais surtout de ses regrets, parce que la Terre les avait ressenties dans ses gouttes, Morgana voulait que tout disparaisse.
Elle désirait que tout ce qui faisait d'elle une traitresse soit scellée en ce jour où elle avait tué son frère.
Or le juge avait déjà fait son choix et lui annonça sa sentence.
_ Je me suis battu pour Camelot, je me suis battu pour Arthur Pendragon… que cette phrase le faisait souffrir…
Douloureusement, il peina à respirer et sous les rayons caressant du soleil comme pour l'inciter à continuer, il ajouta :
_ Je me suis battu pour celui que j'aime… mais j'ai quand même perdu…
Emrys éclata finalement en sanglots… car sans l'attaque de Morgana, il n'aurait jamais su le fond des pensées d'Arthur envers lui et ce fut cette découverte qui le blessait encore le plus.
_ Et de par ma colère divine et du droit accordé par la Terre, tu retournes à l'état de nourrisson et ce… dès maintenant auprès d'Hunit…
Entre le tonnement des éclairs qui fuyaient, le hurlement de Kilgarah, les secousses de la Terre et ses cris de tristesse… Morgana lui souffla
'' Merci ''….
La nature avait repris ses droits et dans cette continuité, la magie de la terre quitta le corps du jeune sorcier, contente de son choix.
Tel un verdict digne d'un juge, elle savait que Merlin ne l'aurait jamais tué mais il avait pu au moins soulager cette part de colère contre l'une des siennes.
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Merlin s'écroula à genoux, laissant ses perles tomber inévitablement sur cette terre humidifiée par les pluies de tristesse.
Posant ses deux mains sur ses tempes, le jeune sorcier releva son regard doré au ciel et sous les rayons, il hurla !
Cela n'avait en rien changé ses mots... il continuait à les entendre... tel un refrain...
'' Sorcier ! Hors de ma vue sorcier ! Hors de ma vue menteur que tu sois ! Je ne veux plus jamais te voir ! Où je te mettrais moi-même au bucher ! '' Cela n'avait en rien changé ses émotions… il continuait malgré tout à les ressentir…
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Arthur ressentait peu à peu ses membres et ce souffle étrange qui lui rendait lentement sa vie, le ramena dans son corps dépourvu de blessure.
La chaleur du soleil sur sa peau et la caresse du vent le réveilla… Toussant de sa gorge sèche, il sentit un bras se poser sous sa nuque.
Avec difficulté, il ouvrit ses paupières et à l'ombre du visage d'un homme, Arthur découvrit le visage de Merlin.
Dans ses yeux, le jeune Pendragon, y décela une petite lueur bleutée mélangée à la couleur or.
MerlinLe cœur serré, il aperçut les trainées que les larmes avaient marquées sur ses joues. Sa main tenta de les effacer mais Merlin tourna son regard sur son torse.
Arthur le suivit dans ce geste et à sa surprise, il n'avait plus rien… Seule sa tunique avait été déchiré par cette attaque.
De ses yeux, il vit Merlin fixer la marque de sa sœur au-dessus de sa poitrine et à nouveaux, il détourna sa tête.
Soudainement, Merlin le lâcha, le faisant tomber pendant qu'il se mit à crier en posant ses mains sur ses oreilles.
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Merlin entendit la voix de sa Terre lui murmurait : '' Il est en vie ''… Le cœur battant, se plantant devant le corps du jeune roi, un léger sourire se dessina sur son visage.
Avec douceur, il passa sa main sous la nuque de celui-ci.
Lorsqu'il croisa furtivement le regard bleu de son souverain, la douleur d'entendre à nouveau ses paroles se firent encore plus violentes.
Fermant ses yeux quelques secondes, Merlin revoyait la dureté et cette noirceur au fond de ses yeux qu'il avait tant regardés avec respect et… amour.
Le corps chancelant, le jeune sorcier savait… il ne pourrait pas continuer ainsi. À répétition, cette horrible voix revenait le hantée, alors se redressant, il ne voulait plus les entendre.
Même ses mains ne les empêchaient pas de pénétrer sa conscience.
Il vit qu'Arthur essayait de s'approcher alors le regard doré, il planta un mur invisible entre eux et tristement, Merlin recula et se tourna sur la vue du lac.
Fermant son regard un instant, il revit sa renaissance…
_ Merlin, je ne peux me résoudre à croire que ta vie se termine ainsi. Avaiit-il entendu de la voix vibrante de Kilgarah.
Il se souvint que seul l'ombre de lui-même était présent, comme s'il ne pouvait pas répondre. Mais la douleur que lui avait faite le roi était toujours pesante et présente.
Ses paroles répercutaient encore dans sa tête, le faisant frissonner de tout son être.
_ Merlin, la seule chose que je peux te proposer est de revenir l'enfant que tu avais été et de grandir au fil du temps… et quand l'heure arrivera, j'accepterais ton choix.
Merlin posa une main sur son cœur blessé. Baissant la tête, il savait qu'en restant ici ou ailleurs, sa peine ne fera qu'augmenter.
Pouvait-il survivre avec ses échos dans la tête ? Même ses mains n'interdisaient pas le cri de traverser ses tympans.
Et cette douleur d'avoir donné foi en un sentiment qu'il aurait cru partager… Le regard humide, Merlin se pinça les lèvres.
Un sanglot résonna dans l'air du temps transportant avec lui tout l'amour qu'il aurait pu lui offrir… pour seulement un homme, pour son roi…
Merlin sourit légèrement en secouant la tête… même cela le roi n'en était pas digne, se disait-il…
Et pourtant, il savait… mais ce crétin royal ne s'en apercevait pas, tout comme il n'avait vu pour sa magie.
Alors levant son regard une dernière fois sur la beauté que lui exposait le lac, ces paroles le dominaient.
Vivre chaque jour en entendant encore et encore ses mots qui l'avaient brisé, Merlin fit le choix incertain de retourner là où il aurait sa place.
Merlin se tourna sur le jeune roi quand ce dernier l'interpella.
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Face au jeune sorcier, Arthur percuta ce mur et posant ses deux mains dessus pour deviner la chose, il resta figé sur place, contemplant Merlin.
Il ne ressentait rien de bon et détaillant l'attitude du jeune sorcier mais à ses mouvements, le torse comprimé, il comprit. Et de toutes ses forces, Arthur cria :
_ Que fais-tu Merlin ? !
Le jeune Pendragon vit ce dernier reculer d'un pas dans le lac ce qui fit tressaillir son propre cœur, déjà broyé par sa peine. Cet organe si vital semblait vouloir sortir de sa poitrine…
Ce dernier tapa de ses mains sur ce pan de mur en tentant de résonner Merlin.
_ Merlin ! Je t'en prie ne fais pas ça ! hurla-t-il avec rage.
Sa gorge semblait perdre sa voix et voir son ami si près de l'eau l'effrayait. Il ne pouvait admettre que Merlin était revenu juste pour le sauver et repartir de la sorte sans qu'ils en aient discuté.
Le brun s'avança d'un second pas faisant enrager Arthur avec plus de vivacité.
_ NON !
Le blond ne voulait pas, il ne pouvait pas regarder Merlin s'enfoncer dans le lac. Arthur sentit son cœur se briser de toute sa mélancolie.
Tapant honteusement cette cloison, il ne cessait de beugler le nom de son valet. Il vit ce dernier se retourner et durant un instant ils se fixèrent sans dire un mot.
Merlin le regardait droit dans les yeux. Il avait fait un choix et rien ne pouvait l'empêcher d'accepter l'offre de Kilgarah.
Et même s'il lisait de la tristesse dans ceux du roi, son tourment était bien trop profond pour être soigné.
Arthur le dévisagea, il ne comprenait pas sa raison de fuir cette vie. Il savait que son erreur avait été fatale mais le jeune roi ne pouvait s'autoriser une nouvelle fois à le perdre.
_ Je t'en prie Merlin ! Ne fais pas ça !
Arthur sentait ses larmes chaudes couler sur ses joues. Il crut une minute que le jeune sorcier allait se jeter dans l'eau et se dressant contre le mur, il frappa hystériquement celui-ci.
_ Ne fais pas ça Merlin ! Pardonne-moi ! cria-t-il entre ses sanglots.
Merlin voulait qu'il se taise, sa voix ne faisait que lui rappeler ses mots, alors le fixant durement, enfin il lui répondit le plus calmement possible :
_ Comment pourrais-je vous pardonner ? Combien de fois m'avez-vous humilié quand j'avais raison ? Combien de fois m'avez-vous enfermés au cachot pour vous avoir sauver ?
En chacune de ses questions, il sentait cette émotion revenir lui transpercer le cœur comme le jour où…
Le jeune sorcier secoua la tête en la baissant.
_ Je suis désolé Votre majesté mais ma vie s'achève ici… finit-il doucement.
_ Non ! hurla Arthur, tel un excité derrière cette séparation.
_ J'ai fait mon devoir, puis levant son regard humide Merlin ajouta, vous avez un royaume à gouverner… moi… plus rien ne me retient…
Arthur tomba à genoux, Merlin le tiraillait de l'intérieur. Le corps tremblant, il demanda :
_ Que puis-je faire pour effacer ce que je t'ai dit ?
Le jeune roi hoqueta, il avait, pour la première fois de sa vie si peur que tout ce qui comptait pour lui, était que Merlin reste. Il avait la chair de poule et ses membres étaient secoués de ses frissons tenaces.
Et ces larmes étaient versées seulement pour cet homme qui avait plusieurs fois été présent dans sa vie.
Merlin, les mains en forme de poing :
_ Vous ne pouvez plus rien sir ! Vos paroles ne s'effaceront jamais ! Elles se sont inscrites au fond de mon âme… s'imprégnant de votre propre colère ! hurla Merlin.
Arthur serra des dents… et toujours en fixant le brun, il lui dit d'une voix cassée :
_ Je regrette Merlin… je regrette tellement ce que je t'ai dit…
Le blond ne supportait plus cette poignante douleur alors il pleura, traînant sa peine en chacune de ses perles.
Tandis que Merlin le regardait, ce dernier malgré son dévouement, ne pouvait plus continuer sa vie de cette manière.
_ Il est trop tard pour cela…
Le jeune sorcier fit face au lac et à peine deux pas qu'Arthur reprit de plus belle. Debout, le corps mitraillé de tension inconnue, de sa main droite, il frappa à nouveau ce pan de mur :
_ Merlin ! Non ! À tes quatorze ans tu m'as dit que tu ne me quitterais jamais ! À tes seize ans tu m'as dit que j'étais important pour toi !…
Arthur souffrait en repensant à chacun de ses souvenirs et entre sanglots et affliction, il continua :
_ A dix-sept ans, tu m'as dit que si tu pouvais, tu resterais avec moi…
La dernière phrase fut tellement mêlée de tristesse et de malaise qu'il frémit de tout son être.
_ Je n'étais pas moi ! répondit rageusement Merlin, soudainement en s'approchant de son interlocuteur. Tu as essayé de m'attendrir ! Tu t'es joué de mon innocence !
Le roi avait touché un point sensible, espérant l'éloigner du lac. Le tutoyé était signe que Merlin hésitait encore.
_ Tu m'as tué ! Et ça Arthur, je ne peux pas te le pardonner ! Ta haine contre les miens m'a littéralement foudroyé !
Le blond s'étrangla dans ses hoquets en entendant Merlin lui infliger ses paroles.
Merlin serra sa mâchoire, retenant ses larmes et lui tonna :
"_ Tu as tellement été loin qu'à chaque fois que je pense à toi, ce sont tes mots qui me tuent à petit feu !
Chaque fois que je te regarde, j'entends ta voix si pleine d'amertume que ça me brule ! Et je sais que je ne le supporterais pas !"Arthur réalisa la douleur qu'avait engendrée ses terribles paroles. Il allait lui répondre mais Merlin le coupa en pointant son index sur lui :
_ Je t'interdis de me retenir !
Le jeune roi sentit une vague de souffle le repousser en arrière et à travers ce geste, il sentit la colère du jeune sorcier.
_ Si je dois subir ta colère, Merlin, je préférais mourir de tes mains que de vivre une minute de plus avec ma honte ! Lui cria le roi.
Le cœur d'Arthur sombrait dans la même démence que Merlin. Oui, il préférait mille fois plus endurer le courroux de celui-ci que de vivre sans lui.
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Mais Merlin était tout sauf idiot et sans un regard, il se tourna à nouveau sur le lac. Marchant d'un pas décidé, il pouvait entendre les hurlements du jeune roi tapant hostilement contre la paroi.
Le jeune sorcier n'avait plus la force de le regarder. Sa vie n'a été que pour veiller sur un homme qui ne le respectait même pas.
Devant l'étendue d'eau, les mots revenaient se pendre à son oreille. Refermant à nouveau ses mains en des poings, il savait qu'il n'y avait plus aucun espoir pour rétablir cette paix qu'ils avaient autrefois.
Merlin se souvint de son Arthur d'avant mais celui-ci l'avait poignardé de toute sa haine. Lentement, il posa une main à l'emplacement de sa marque qu'il avait partagé avec lui.
Dans sa crainte de perdre le roi, sa magie avait récupéré une partie des blessures du jeune roi. Et quand de ses lèvres, soufflant ses mots d'une autre religion, il avait réparti sa peine… ses sentiments…
Peu importait, maintenant, il savait que rien ne changerait et cette douleur qui l'assenait sans arrêt lui était insupportable.
Les pieds dans l'eau, il ne regrettait en rien de l'avoir veillé parce qu'au fond, il savait que ce roi sera le meilleur de tous.
Le brun ferma un instant ses yeux ressentant encore cette souffrance. Non plus rien n'avait d'importance…
Inévitablement, Merlin se laissa empoter par le lac…
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Arthur ne sentait plus ses jambes le soutenir. Merlin avait déjà fait son choix et le cœur meurtri, il hurla en brutalisant durement ce mur.
Fou… il était fou… il ne pouvait rien faire d'où il était. La rage au ventre, il continua ses coups. Arthur avait tellement mal que jamais il n'aurait pensé qu'elle serait encore plus dure à vivre.
Quand il a su la façon dont il s'était laissé mourir, il s'en était voulu mais quand devant ses yeux, la même chose se produisait, il n'avait pas le pouvoir d'arrêter la marche de Merlin.
La gorge nouée, il criait le nom de son valet jusqu'à ce que sa voix ne parvienne plus à sortir un son. Il resta figé lorsqu'il s'aperçut qu'il ne voyait plus que le torse de Merlin.
Arthur tremblait de tous ses membres. Les mains contre ce mur invisible, la tête baissée, ses perles affluaient vers le sol d'une vitesse phénoménale.
_ Non ! Brailla-t-il.
La douleur était sinistre et perverse. Entre ses larmes, enfin il comprenait sa vraie souffrance.
Plus il tentait de hurler plus sa gorge semblait s'arracher d'elle-même, et son cœur… si Arthur avait pu l'extirper pour ne plus souffrir, il aurait arracher sur le champ.
Arthur avait eu tort d'avoir agi sous l'impulsion car Merlin avait confiance en lui mais surtout il avait eu foi en sa nature. Et son âme… se mourait avec le brun…
_ Mon dieu, comme je regrette Merlin !… continua-t-il en n'apercevant plus que les épaules de celui-ci se confondre avec l'eau.
Secouant la tête, il ne tolérait pas son échec tout comme il n'admettait pas que le jeune sorcier l'abandonne.
Baissant son regard rougis, il sentait à nouveau ce vide s'emparait de lui. Il ne pourra jamais régner si Merlin ne faisait plus partie de sa vie. Alors sa tristesse redoubla encore plus…
Arthur souhaitait vivre avec Merlin, il voulait qu'il lui revienne… et cet élancement qui tirait son cœur vers l'extérieur lui faisait effroyablement souffrir.
La douleur était trop grande, tout comme l'un que pour l'autre…
Il lui avait fallu se trouver au pied du mur pour enfin laisser son coeur s'ouvrir lentement...
Pourquoi tenait-il tant à lui ? Pourquoi voulait-il qu'il soit avec lui ? Pourquoi son cœur semblait vouloir sortir quand il le sentait loin de lui ?
Respirant douloureusement de ses souffles rauques et relevant son regard brouillé sur Merlin, il entendit la mélodie siffler dans cet air...
Et dans un silence baigné de solitude, enfin, cette mélodie portée par le souffle du passé trouva l'oreille destinée à écouter ces mots qu'elle avait conservée.
Je lui aurais donné ma vie…
J'aurais veillé sur la sienne…
Je l'aurais suivi où qu'il aille…
J'aurais traversé des royaumes pour lui…
Je lui aurais prouvé que la magie est douce…
Je lui aurais expliqué que la mienne vient de lui…
Et j'aurais fini un jour par lui dire….
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La force divine de la Terre figea le temps entier. Merlin n'avançait plus, le jeune roi était immobile comme toute le reste de la planète.
Dans un silence que le souffle du vent portait, elle murmura tel un fantôme :
'' Il est temps Arthur, temps que vous vous rendiez enfin compte ce que représente Merlin…''Dans un éclatement, le corps d'Arthur fut projeté dans un monde où pour une seule journée entière, il devra vivre sans Merlin…
Dans un monde où la magie n'existait pas, où sa vie resterait celle qu'il avait connue avec Uther, où ils espéraient qu'il se souvienne de lui…
Une épreuve que lui avait prédite cette mère…
La Terre, mère de toutes les essences vitale, le soleil, père de toute vie… avaient senti la décision hésitante de Merlin qui vacillait et tant que Kilgarah ne lui accordait pas son choix, ils préférèrent intervenir.
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Le vent était plus calme que le matin, faisant à peine virevolter les feuilles. Le soleil paraissait apaiser la tension de la nature car elle savait que ce jour tant attendu été arrivé…
Seuls les êtres magiques pouvaient entendre le souffle mélancolique qui avait tant espéré… Pleurait-elle de joie ? Peut-être… Pleurait-elle de peine ? Peut-être…
Kilgarah survolait le lac le cœur battant au rythme de son seigneur… triste et accablé…
De ses mouvements, le vent caressait avec amour son corps qui se mouvait avec élégance dans cette atmosphère vide…
Aussi vide qu'était la magie de Merlin, aussi vide qu'était le cœur d'Arthur…
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