Voici le dernier os de mon cru, reprenant la première fois des deux hommes
Bonne lecture
ooOoo
Assis appuyé contre la tête de lit, une cigarette éteinte au coin des lèvres, Robert fixait l’homme qui s’était endormi à ses côtés. Détaillant les courbes de ce corps fin qui s’étalait devant lui sans la moindre pudeur, il laissait son esprit dériver, se demandant encore comment ils en étaient arrivés là. Il n’avait plus touché un autre homme depuis des années, n’en avait même plus ressenti l’envie depuis qu’il était marié, et le voilà au lit avec ce presque inconnu auquel il venait de faire l’amour non pas une mais bien deux fois. Et dans le feu de l’action il n’avait même pas songé à utiliser de préservatifs. De vrais ados en proie à leurs hormones. Nul doute que cela apporterait par la suite quelques inquiétudes, mais Robert ne regrettait rien pour autant.
Il avait rencontré Jude deux heures plus tôt à tout casser dans le bureau de Guy Ritchie, où tout deux devaient signer leur contrat pour ce film qui allait les réunir. Evidemment, Robert connaissait l’Anglais au travers de ses films, des articles parus dans la presse et de quelques recherches qu’il avait faites lui-même en apprenant qu’ils allaient travailler ensemble. Bel homme, à la vie amoureuse tumultueuse… Mais par-dessus tout un personnage fascinant. Cela dit, jamais l’aîné n’aurait soupçonné que leur rencontre ne se passe ainsi, tant tout avait été irréfléchi, intense et absolument pas prémédité. Ils avaient un peu bavardé, échangé quelques banalités lorsqu’ils avaient quitté leur metteur en scène, puis Robert s’était entendu proposer d’accompagner Jude chez lui. Plus étonnant encore, il n’avait pas pris une seconde de réflexion avant d’accepter l’invitation.
Montant à l’arrière du taxi qu’ils avaient alors hélé, leurs corps s’étaient frôlés et la réaction provoquée en eux n’avait fait que confirmer ce qu’ils soupçonnaient déjà l’un comme l’autre. Tels deux aimants ils étaient irrémédiablement attiré l’un par l’autre. Un besoin physique impérieux, presque douloureux, leur faisait désirer plus de contact, plus d’intimité. Besoin de se découvrir, de s’apprivoiser. Ni l’un ni l’autre ne croyait au coup de foudre. D’ailleurs ce n’en était pas un à la réflexion. Ce qu’ils éprouvaient l’un pour l’autre n’avait rien de romantique, c’était juste animal.
Le bref trajet s’était déroulé dans un silence pesant, les deux hommes brûlant d’une impatience qu’ils contenaient avec difficulté. Ils s’étaient contentés de brefs regards furtifs jusqu’à ce que Robert, entreprenant jusqu’au bout, ne pose une main aguicheuse sur la cuisse de son compagnon, s’aventurant peu à peu vers son entrejambe en une caresse parfaitement maitrisée. Jude avait donné l’impression de ne pas réagir, mais la rougeur apparue sur son visage avait été une indication plus que suffisante pour l’autre homme.
Arrivés à destination, ils n’avaient même pas attendu que la porte d’entrée ne se soit refermée derrière eux pour se jeter avidement l’un sur l’autre.
Baisers, caresses, chaque geste avait trahi un empressement, une passion qui semblaient les dévorer. Robert avait pourtant eu un bref instant de doute lorsque, entre deux baisers, Jude lui avait chuchoté d’y aller doucement, que c’était sa première fois. Mais son hésitation n’avait pas duré plus d’une seconde, mise à mal par deux mains entreprenantes se glissant dans son pantalon. Et lorsqu’ils avaient finalement échoué sur le lit du cadet, c’est tout naturellement que Robert s’était retrouvé dans le rôle du dominant.
Le plaisir, pareil à l’envie, avait été intense, les satisfaisant comme rarement cela leur était arrivé, comme si le fait de se découvrir aussi intimement alors qu’ils se connaissaient à peine avait effacé toute inhibition, renforçant l’intensité du moment.
De la même manière, s’offrir l’un à l’autre une seconde fois ne fit que sceller et conclure de la plus belle façon qui soit une union qui resterait un acte isolé, unique.
Ils avaient ensuite parlé un peu, bien conscients de toute façon qu’à l’avenir ils auraient tout le temps de faire plus ample connaissance. Puis Jude s’était endormi. Un moment Robert s’était contenté de l’observer avant finalement de céder à l’une de ses mauvaises habitudes. Se levant le plus discrètement possible, il avait cherché son pantalon, qui gisait près de la porte, et avait récupéré son paquet de cigarettes dans la poche. Il en avait glissé une entre ses lèvres, sans l’allumer toutefois, avant de reprendre sa place auprès de Jude. Il fumait toujours après l’amour, une manie acquise des années plus tôt et que Susan, malgré tous ses efforts, n’était jamais parvenue à lui faire perdre. Pour autant il ne le faisait jamais à l’intérieur, à plus forte raison s’il n’était pas chez lui, mais il n’avait pas trouvé cette fois le courage de se rendre sur la terrasse. Il savait cet instant auprès du jeune homme éphémère et se refusait à en perdre un instant.
Oui, définitivement il restait surpris par la tournure qu’avaient prise les choses, mais en était tout à fait satisfait, et ne doutait pas qu’il en était de même pour son amant. Et puis cela n’en rendrait leur collaboration à venir que plus intéressante, plus enivrante. La sonnerie de son portable l’interrompit soudain dans ses pensées. Le récupérant dans sa chemise qui gisait au pied du lit, il vit s’afficher le nom de son épouse. Il sourit en décrochant tandis qu’à ses côtés Jude remuait légèrement. C’en était fini de cette parenthèse dans leurs vies, se dit-il avec néanmoins un soupçon d’amertume.
THE END