Valà une petite suite. Au fait, j'ai enfin trouvé un titre!
<Gandalf>
J’aperçois soudain en plein milieu du repli Pippin faire à nouveau irruption dans le tas. Mais il est vraiment inconscient, celui-là ! Ah… Un problème avec le fanatique qui sert d’intendant à cette cité… Je le fais vite monter sur le cheval et m’élance.
Je déboule dans la salle mortuaire juste à temps tel un Zorro passé à l’eau de Javel.
- CESSEZ CETTE FOLIE !
Oooooh le vil ! Il a alluméééé le feu tout seul ! Puisque c’est comme ça, il va encore avoir droit à une petite bastonnade !
<Pippin>
Oh mon Dieu ! Faramir est au milieu des flammes, et je peux le voir frémir de mes yeux ! Tout à coup, je ne sais pas ce qui me prend : je saute en plein milieu du bûcher et mets à contribution toutes mes forces de Halfelin pour le faire rouler à terre. WOUHOUUU !!! Je me sens une âme de héros aujourd’hui ! Cette herbe est vraiment un bon coup ! Mais… Mais… AAAAAAAÏE !!! Mais il me fait mal, lui !! Aaaaah !! Comment peut-il lever la main sur un pauvre Hobbit sans défense ? Je pousse un cri plaintif et douloureux. C’est la fin, ce vieux va m’étrangler ou me balancer dans le feu, au choix !
<Gandalf>
Par tous les Valars!! Non mais pour quoi se prend ce vieux fumier ? Personne ne touche au Hobbit, à part moi !! Sans hésiter un seul instant, je lance Gripoil sur lui et, d’un bon coup de sabot bien placé, l’envoie valser dans son bûcher, relâchant ainsi mon pauvre bijou brutalisé. J’espère qu’il ne lui a pas fait trop peur… Dans tous les cas, il ne lui fera plus de mal dans son nouveau costume de torche humaine. Byebye, Denethor !
Nous voici à présent à attendre notre dernière heure derrière la porte du troisième niveau. Moi je m’en fous, c’est pour Pippin que je tremble… Ma vie a été bien assez longue et bien remplie comme cela. Mais lui, pauvre créature innocente si jeune et si douce… Savoir qu’il va bientôt y passer me révolte ! Il tremble, assis dans son coin de mur. Il lève les yeux vers moi et murmure :
- Je ne savais pas que ça finirait de cette manière…
Pauvre amour… Je ne veux pas qu’il vive ses derniers instants ainsi. Alors, sans réfléchir, je me lance dans un délire fantasmagorique sur un paradis brillant comme milles petites cuillères et tapissé d’étendues vertes à pertes de vue et plantées de pommiers fructueux en toute saison, en comptant sur l’aide de la feuille de Longoulet. Vu le regard que m’offre Peregrin, je crois que j’ai de la chance, elle fait encore assez effet… Je suis content. Grâce à moi il mourra au moins heureux. Il se serre contre moi pour me gratifier d’un câlin débordant d’affection. Vraiment… Le monde est injuste de faire trépasser des Halfelins comme lui. Enfin, au moins nous mourrons ensemble, comme dans les grandes histoires lyrico-épiques…
<Pippin>
Je suis niché contre la robe de Papy, et je ne veux pas voir ce qui va se passer. J’ai trop peur. Passer au pays des pommes, je ne demande pas mieux ! Mais ce sera sans mon Merry… A sa pensée je dois me retenir à grand peine de pleurer. Mais tout à coup, une sorte de grand vent vient souffler dans mes cheveux. Je jette un œil hors des plis de tissu blanc pour constater qu’une armée de spectre digne de celle des Douze travaux d’Astérix est en train de massacrer littéralement Trolls et orques qui nous menaçaient. Mon Dieu… La vie est bien faite, finalement !
Je suis sur le champs de bataille, à présent. Il est éclairé par de grandes taches de soleil dorées. Cependant ce n’est pas de la beauté de cette plaine de charniers dont je me préoccupe… A la vue d’un amas quelques mètres devant moi, je crois avoir trouvé ce que je cherchais. Mon cœur s’emballe. C’est lui ! C’est lui, j’en suis sûr ! Je m’élance et, indifférent à l’orchestre flûtiste elfique probablement caché derrière l’oliphant et qui vient d’entonner un air, je me jette impitoyablement sur le cadavre d’orque et le repousse sur le côté. Je découvre en-dessous… mon Merry. Il est étendu sur le côté, dans ce qui semble être la grâce du dernier repos. Sa tête inerte est posée sur le sol, exposant son cou blanc. Cette vision serre brutalement mon cœur battant. Est-il…
- Merry !
Je me penche sur lui et le redresse. Oh mon Dieu ! Quelle sale tête ! Mais… ses paupières s’ouvrent ! Oh mon Dieu ! Mon Dieu ! Dès que nous serons de retour dans la Comté, je me fais mormon !
- Merry, c’est moi… je murmure. C’est Pippin…
Je précise parce que ça me ferait quand même mal qu’il lâche « Frodon » ou « Sam » à la place… Il vient à peine de sortir des griffes de la mort ! Oh… Il a peut-être une triste mine mais ses yeux… ses yeux ne sont que plus sublimes que d’habitude, se réveillant soudain dans une fièvre incrédule. Il susurre avec une tendresse qui me donne envie de me liquéfier sur place :
- J’étais sûr que tu me retrouverais…
Forcément, avec la balise Argos qu’il a planqué sous son armure ça a été facile de le repérer au milieu de tout le champs de bataille… J’interromps là mes réflexions oiseuses car je sens sa main se glisser sous ma cape et me caresser tout doucement le bras tandis que l’autre tente tant bien que mal de trouver la mienne, posée sur sa poitrine. Je lui caresse les cheveux en réponse. Oh, mon Merry… Je suis si heureux de t’avoir retrouvé que je ne peux même pas en pleurer. Ce soulagement… cette joie… C’est meilleur que tout ce que j’ai ressenti dans ma vie.
- Est-ce que tu vas me laisser là ?
Mon Dieu… Mais comment ose-t-il sortir des fariboles pareilles ? Je m’empresse de le rassurer.
- Non, Merry… Je vais prendre soin de toi.
La seule chose qui me retient de m’emparer de ses lèvres fines et roses est qu’elles sont pleines de sang, et que c’est quand même un peu dégoûtant. Mais dans tous les cas le cœur y est. Je recouvre Merry d’une étoffe posée là très opportunément et lui fait un bref câlin avant d’aller prévenir papy.
<Gandalf>
Grrrrrrrrr j’enrage ! Il a fallu qu’il en réchappe, lui ! Quelle chierie… Et voilà, maintenant ils en sont à se murmurer des mots doux et à se câliner sous prétexte qu’ils sont tous les deux passés à un poil de la mort… Je détourne les yeux, ça me fait trop mal de voir ça. Je trouve ça parfaitement écœurant ! Et qu’on m’amène l’abruti qui a eu l’idée d’installer un orchestre elfique derrière le cadavre de Mùmak ! Bon, le petit vient me voir. Il a dû réaliser à nouveau que j’existais.
- Gandalf, j’ai retrouvé Merry !
- Ah… C’est bien…
- Heu… Il faudrait peut-être le ramener à la cité, il a besoin de soins !
Grumble… C’est donc pour ça qu’il s’intéressait à moi soudainement… Je m’avance vers le petit-gros à demi agonisant. Beh, il pue le sang d’orque ! Tchia, répugnant ! Je le charge sans ménagement sur mon pauvre dos. Pippin me jette un regard un peu choqué. Quoi ? Et avec ça il ne se rend pas compte de ce que je fais pour eux ? Mes pauvres reins, j’ai plus de 3077 ans, moi !