Je suis officiellement de retour : ni les collégiens, ni le démon de l'informatique (ni mon plantage de Word engloutissant cette fic hier) n'auront ma peau ! Me revoici avec une première dans le fandom d'Esprits Criminels (dont je dévore les épisodes depuis un ou deux mois) et avec mon couple fétiche : Hotch/Reid !
N'hésitez pas à me donner des remarques ou des critiques positives, je cherche à cerner au mieux les personnages. Puis, pour les dialogues, j'ai l'impression que regarder les séries en VO n'est pas un avantage quand on passe à la rédaction de fanfic.
Pas de spoilers au-delà de la saison 3. Je situe ça (au moins) après la saison 5, sans évoquer quoique ce soit des épisodes des saisons 4, 5 et 6. Je les place dans une
relation déjà établie.
Inspirée par la chanson du Scientist (Coldplay), j'ai donné le titre de la chanson à ma fic. Assez de blabla !
♣♣♣♣♣Assis dans le sofa, les jambes soudées et le regard fuyant, Reid se demandait encore ce qui l’avait poussé à venir ici, sur ce qui ressemblait plus à un coup de tête ou un pressentiment qu’une décision mûrement réfléchie.
Si le visage de Hotchner demeurait impassible, il n’en était pas de même pour son regard. Une pointe d’inquiétude perçait dans ces yeux assombris par les deux sourcils froncés qui les surplombaient. Et c’est précisément ce que Spencer redoutait de voir. La situation empira encore lorsque l’aîné ouvrit la bouche pour prendre la parole :
- Qu’est-ce qu’il y a ?
Paniqué, Reid le dévisagea. Sur le chemin qui le menait ici, il s’était repassé la scène de nombreuses fois. Jamais, pas une seule fois, son imagination avait envisagé qu’Hotch puisse débuter la conversation par une question. Il s’attendait à de la colère, de la déception, de l’indifférence. Nullement à l’angoissante idée que l’homme ne réalisait pas la période chaotique qu’il traversait.
- Tu ne donnes aucune nouvelle durant deux jours, et tu débarques un dimanche à vingt-et-une heure sans raison ?
- Ca ne va plus.
Devant l’incompréhension de son interlocuteur, Reid reprit une comparaison vieille de deux ans. Celle-ci, comme il l’imaginait, fit mouche immédiatement.
- Le puzzle. Les pièces ne correspondent plus, j’imagine.
Adossé au mur du salon, Hotch demeura silencieux, muet et livide, tandis que son esprit voguait dans des souvenirs chers et heureux, datant de deux ans seulement. Un début de soirée anodin où il s’était proposé pour déposer un garçon de vingt-cinq ans à peine, un collègue inestimable, un gringalet attachant. Lorsque celui-ci lui avait proposé de rentrer pour boire un thé, Aaron n’avait pas eu le cœur de refuser.
Voguant dans l’appartement, il s’était arrêté à proximité de la table basse, dégageant un puzzle parmi les papiers et dossiers. Ignorant les bruits de vaisselle cassée provenant de la cuisine toute proche, il s’était focalisé sur le jeu, replaçant deux ou trois pièces. Lorsque le thé était arrivé entre ses mains, à moitié tiède et beaucoup trop sucré, Hotch avait continué à constituer le paysage en compagnie de Spencer.
Tout en auscultant les pièces, le jeune homme avait mené une conversation maladroite mais surprenante sur plusieurs sujets. Bavardant autour de la physique quantique, du travail ou, en fin de soirée, du divorce d’Aaron, celui-ci avait été surpris des efforts de son collègue. Lorsque la cent vingt-et-unième et dernière pièce était restée sur la table, Reid avait embrayé sur une comparaison étonnante entre ce jeu et la situation de son Boss :
- Les gens, comme les pièces, s’imbriquent les unes dans les autres. Si une pièce ne correspond pas, c’est que ce n’était pas la bonne. Ca ne sert à rien de forcer.
Laissant le privilège à Hotchner de placer le dernier élément du puzzle, il s’assombrit lorsque son supérieur embraya sur sa comparaison :
- Je n’étais peut-être pas celui qui correspondait à Haley.
Au moment de partir, en saluant cette longue silhouette qui se dandinait les mains dans les poches, Aaron ressentit une impression étrange. Il avait enfin posé des mots sur celle-ci, quelques mois plus tard, lorsqu’il avait enfouis son visage dans les cheveux bruns et posé ses lèvres sur la nuque blafarde et élancée. Ce jeu et cette soirée avaient été, en somme, le début de tout.
Un commencement qu’Aaron refusait de voir entaché par une fin aussi ridicule et injustifiée que celle qui se dessinait sous ses yeux.
- Je ne suis pas fait pour ça. C’est tout. Quand… Une pièce est abîmée, entaillée, elle ne rentre plus dans le puzzle. Elle ne s’accorde avec aucune autre.
- Tout allait si bien, répliqua Hotchner d’une voix basse, presque soufflée.
- C’est trop dur, j’arrête là.
Se décalant légèrement, l’aîné se plaça devant le jeune homme, à hauteur des yeux. Captant le regard hésitant de son compagnon, il se mordit la lèvre, étudiant les traits anxieux du surdoué.
- Personne n’avait dit que ce serait simple.
- Et personne ne m’a dit que ce serait aussi difficile, répondit abruptement Reid, désolé de causer tant de peine à celui qu’il admirait. Je n’ai jamais été doué pour manipuler. Mentir, se cacher aux yeux de tous-
- Il y a une personne auprès de laquelle tu n’as jamais eu à jouer la comédie. Pars si tu le souhaites, si tu penses sincèrement que c’est la meilleure chose à faire. Mais il est hors de question que je lui explique ton départ moi-même ou que je lui lise une lettre que tu aurais-
- Je ne suis ni mon père ni Gideon, répondit Reid, mal assuré.
Comment avait-il pu oublier cet innocent, celui qui subirait bientôt les dommages collatéraux de deux adultes qui se déchirent ? Il se retrouvait aujourd’hui dans la position qu’avait occupée deux de ses tuteurs, ses deux piliers qui s’étaient volatilisés. Avec, pour seul souvenir, une lettre révoltante qui regroupait ce qu’ils n’avaient osé lui dire de vive voix. Il refusait de suivre la même voie.
- Tu n’es pas un lâche. Tu as juste-
- Peur, c’est le mot que tu cherches ? Je cherchais aussi. Perdu, je dirai, peut-être. Je ne suis pas doué dans ces choses-là et- Je préfère partir avant de vous causer le moindre tord.
- L’amour n’est pas une science, Spencer. Il n’y a aucune loi, aucune théorie. Ca ne fonctionne qu’à l’instinct.
Le salon se plongea dans un silence apaisant. Se baladant nerveusement dans la pièce, Hotch demanda finalement l’autorisation de le rejoindre sur le sofa, s’installant à quelques centimètres de lui. Pensif, le jeune homme semblait étudier le bout élimé de l’une de ses chaussures, tentant visiblement de minimiser l’importance de ce qu’il déclarait :
- C’est la première fois. Tu es le premier. Je n’ai pas de points de repère, rien.
- Et tu as peur de nous blesser. Je vois.
Un sourcil se leva, du côté de l’œil gauche de Reid. Un éclair de suspicion agita sa voix lorsqu’il se retourna vers son conjoint :
- Tu n’es pas en train de me profiler, là, n’est-ce pas ?
Un sourire détendit presque les deux lèvres scellées de l’aîné. Celui-ci s’adressa finalement à son compagnon, posant subtilement sa main sur la cuisse du jeune homme :
- Tu as le droit de commettre des erreurs. Et quoique tu fasses, je serais là. Nous serons là. Tu dois te laisser le temps d’apprendre, de t’apprivoiser et d’apprivoiser les autres. C’est la seule règle…
- Et à cet instant précis, qu’est-ce que je suis censé dire ? L’interrogea son cadet en haussant les épaules, prenant cette mine désolée qui le rendait plus que désirable.
Celui-ci inclina la tête lorsqu’une main calleuse vint lui caresser la joue, brossant furtivement ses lèvres du pouce. Les yeux de son supérieur n’étaient plus aussi sombres qu’auparavant ; une drôle de lueur agitait les prunelles noires :
- J’ai envie de t’entendre dire que tu veux rester ici. Mais c’est à toi de savoir ce que tu souhaites réellement.
Nerveux, Reid planta ses ongles dans son propre poignet, meurtrissant machinalement son avant-bras. Il cherchait les mots, se rassura Aaron, patientant fébrilement pour une réponse. Un mince sourire en coin, une voix un peu faible mit un terme à son attente :
- Est-ce qu’il serait possible de tout reprendre à zéro ?
- Evidemment.
S’approchant doucement du corps imposant qui le rassurait toujours autant, Reid leva les yeux, demandant d’un regard la permission d’être étreint. Comme autrefois, Hotch ne lui refusa rien, repliant ses bras musclés autour de la frêle silhouette, respirant un peu l’odeur de ses mèches brunes. Etouffée, la voix du Docteur s’éleva timidement :
- J’ai besoin d’apprendre. Il t’en faudra de la patience… Même Gideon n’est arrivé à rien avec moi.
L’aîné ne put s’empêcher de sourire à l’évocation de son ancien collègue mais néanmoins vieil ami. Celui qui avait confié, sans que le principal intéressé ne le sache vraiment, Reid à ses soins, lui promettant de ne jamais heurter le fragile jeune homme.
- Je suis certain, Spence, que tu peux parfaitement exceller ailleurs que dans tes bouquins… Et j’ai d’autres moyens que Gideon pour te le faire comprendre, n’est-ce pas ?
Rougissant à l’évocation des choses qu’il avait découvertes il y avait quelques mois à peine et entre les bras d’Hotch, il se cala encore plus profondément contre le torse de son collègue. Amusé par l’extrême pudeur de son cadet, il lui susurra quelques mots à l’oreille porteurs de tendresse. Le plus jeune s’écarta légèrement et posa chastement ses lèvres sur celles de son compagnon, aussi hésitant et aussi doux que la première fois qu’il avait osé embrasser son Boss.
- Tu te sous-estimes. Et tu es quelqu’un de bien. Tu veux une preuve ? L’interrogea Aaron en désignant le couloir qui menait aux chambres d’un geste de la tête. Je n’aurais pas à expliquer à Jack, demain matin, que tu ne reviendras plus le bercer le soir ou lui raconter l’un de tes contes mexicains-
- Aztèques. Ce sont des légendes aztèques.
- Soit, se défendit Hotch, agacé par ce besoin d’exactitude irritant chez son compagnon. Tu as prit tes responsabilités. Et tu as fait, à mon avis, ce qu’il fallait.
La main crispée sur le col de chemise de son compagnon, Reid l’observa attentivement, décrivant l’arrondi de son menton, ses mâchoires carrées, ses lèvres étroites sans jamais croiser son regard. L’aîné comprit ce qui se tramait sous les traits placides et sereins du garçon. Glissant sa main le long du flanc du Docteur, il souffla un dernier conseil :
- La première chose à savoir est de… toujours exprimer ce que tu attends de l’autre. Ce que tu désires.
Spencer exprima son souhait, timide, d’une voix trop basse pour être entendue. Lorsque son amant insista pour l’entendre d’une voix audible et assurée.
- J’ai envie de toi. De- Rejoindre la chambre.
Après quelques gestes furtifs et habiles, Aaron parvint à caller les jambes de Reid autour de sa taille et, au prix d’une certaine agilité, de se redresser pour le porter jusqu’à la pièce voisine. Le cadet en profita pour l’interroger, redoutant la réponse à sa question :
- Tu n’en as pas marre de… t’occuper d’un assisté amoureux ?
Allongeant son compagnon sur les draps, Hotch se plaça au-dessus de lui et vint promener ses lèvres sur le lobe de son oreille avant d’y souffler quelques mots :
- Tu te souviens de ce que je t’ai dit la première fois que nous nous sommes allongés ici ?
- J’ai une mémoire auditive très-, il marqua une pause, ennuyé. Je m’en souviens très bien. Que- Que tu étais fier d’être le-
- Ton premier. D’avoir l’occasion de t’apprendre quelque chose que tu ne connaisses pas déjà. Ces paroles là, grave les quelque part, ne les oublie jamais, entendu ?
Reid sourit : une pointe d’autorité perça dans la voix de son aîné. Chassez le naturel, il revient au galop, nota le génie en levant la main, défaisant péniblement les boutons de la chemise de Hotch. Ni trop rapidement, ni trop lentement, comme il l’avait appris. Dégageant les pans de la chemise, il contempla le torse viril, ce ventre plat qu’il connaissait bien et leva les yeux vers le visage qu’il aimait autant, impatient :
- Je suis prêt pour une nouvelle leçon.
■■En tee-shirt et caleçon, enveloppé du drap blanc et des bras d’Aaron, Reid s’agita. Quelques pleurs émanaient de la pièce voisine. Proposant à son compagnon de s’en occuper, il se leva. Evitant de peu d’heurter la lampe, il se faufila jusqu’à la chambre jouxtant la leur. Redressé dans son lit, un lapin serré contre la poitrine, Jack le fixait de ses yeux aussi fascinants que ceux de son père.
- Un mauvais rêve ?
Le bambin acquiesça, la couverture relevée jusqu’aux épaules. Il lui bredouilla une histoire de monstres, semblable aux cauchemars de nombreux garçonnets de son âge. Reid l’écouta patiemment, brossant instinctivement les cheveux de l’enfant.
Se relevant, sur la pointe des pieds, il s’approcha du placard indiqué par le garçon, murmurant à un imaginaire intrus qu’il travaillait pour le FBI – et pour Jack. Ouvrant l’armoire, il ne mit à jour que des vêtements, un ou deux cartons et quelques figurines de jeu. Sûr de lui, il revint près du petit et le consola une nouvelle fois, justifiant qu’il ne pouvait y avoir de monstres dans la maison d’un agent. Jack lui donna raison et se recoucha, la joue appuyée sur sa peluche. Avant que Spencer n’aie eu le temps de sortir, le garçon s’adressa à lui :
- Tu restes demain matin ?
Que devait-il répondre ? Il ne savait pas encore l’heure à laquelle il comptait retourner chez lui, refusant de s’éterniser, pour un ridicule souci d’intimité, chez son compagnon. Il obéit néanmoins aux conseils de ce-dernier, se fiant à son instinct et rassura son protégé :
- J’attendrai que tu sois réveillé.
Avant de rejoindre son compagnon pour achever sa nuit, Spencer réalisa que l’une des plus belles récompenses à ces efforts difficiles à fournir, à cet apprentissage humain et hors-du-commun, fut probablement les derniers mots qui lui bredouilla Jack avant de s’endormir :
- J'aime bien quand t'es là.
Antoine de Saint-Exupéry a dit : « Tu ne dois pas l'oublier. Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé. » ♣♣♣♣♣J'espère que c'était a) cohérent, b) pas trop OOC, c) agréable à lire !