Voici la suite et fin de cette fic ! ^^
Cybelia.
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Tout son corps n'était plus que douleur. Il ne savait pas depuis combien de temps il était prisonnier de Cendred, mais il avait l'impression que ça faisait une éternité. Il aurait donné n'importe quoi pour que son supplice s'arrête. Il était même prêt à mourir pour cela. Mais si son tortionnaire s'arrangeait pour le faire souffrir suffisamment pour que ça soit insupportable, il se gardait bien de le tuer. Les ordres de Cendred avaient été clairs : Arthur devait rester en vie pour servir de moyen de pression sur Uther. Le prince se demandait si son père avait déjà mobilisé des troupes pour venir le chercher ou s'il ne s'était pas encore écoulé assez de temps pour que le roi soit inquiet de son absence. D'après ce qu'il avait entendu entre deux séances de torture, un messager avait été envoyé à Camelot pour proposer un échange à son père : la vie de l'unique héritier du trône contre la moitié des terres du royaume. Il n'avait pas réussi à savoir si la réponse était revenue et, le cas échéant, la nature de celle-ci.
Alors qu'il oscillait encore une fois au bord du précipice de l'inconscience, Arthur entendit qu'on ouvrait la porte de son cachot. Une exclamation de stupeur parvint à ses oreilles :
—Par tous les Dieux !
La voix était douloureusement familière, mais il savait qu'il devait être en plein délire car il était impossible que la personne à qui elle appartenait soit là, près de lui.
— Arthur... vous m'entendez ?
Une main fraîche se posa sur son front, repoussant les mèches collées par la sueur et le sang.
— Je vous en prie, répondez-moi ! Dites-moi que je ne suis pas arrivé trop tard...
La voix était si suppliante que le prince sentit ses paupières s'ouvrir instinctivement. Un grand soupir de soulagement lui parvint :
— J'ai cru vous avoir perdu !
Tout était flou autour de lui. Il n'arrivait pas à chasser les brumes qui obscurcissaient sa vision.
— Merlin ?
— Oui ! Je suis là ! Je suis venu vous sauver. Je sais que vous n'allez pas apprécier, mais je vais devoir utiliser la magie sur vous pour que vous puissiez marcher. Vous êtes trop lourd pour que je puisse vous porter hors d'ici.
Alors qu'il allait répondre que tout ce qui comptait, c'était de quitter cet endroit maudit, Arthur sentit des doigts se poser sur sa bouche :
— Chut, quelqu'un approche.
Il retint à grand peine un gémissement lorsque Merlin s'éloigna en direction de la porte. Quelques secondes plus tard, le sorcier revint près de lui et marmonna des mots incompréhensibles. Immédiatement, Arthur se sentit mieux. Il avait toujours mal, mais c'était devenu supportable. Et, surtout, sa vision s'était améliorée. Il pouvait à présent voir le visage inquiet de son ami penché sur lui.
— Comment vous sentez-vous ? Vous pouvez marcher ?
— Je pense...
Merlin l'aida à se lever. Ses jambes n'étaient pas très sûres, mais il réussit à tenir debout sans assistance.
— Je vais utiliser un autre sort pour nous rendre invisibles jusqu'à ce qu'on soit sortis du château. Des chevaux nous attendent dans la forêt. Nous devons les atteindre rapidement car mes sorts ont une durée limitée et je ne sais pas du tout à quel moment ils vont se dissiper.
— Alors, qu'attendons-nous ?
Merlin eut un petit sourire, puis tendit une épée à Arthur, son épée.
— Comment...
— Je vous expliquerai tout quand nous serons en sécurité.
Il prit le bras du prince, puis souffla :
— Surtout, ne me lâchez pas, quoiqu'il arrive. Le sort ne peut fonctionner sur nous deux qu'en présence d'un contact physique.
Le sorcier récita à nouveau des mots dans une langue inconnue du prince, puis lui fit signe de le suivre. Il sortirent du cachot et montèrent l'escalier sans croiser âme qui vive. Une fois en haut, il leur restait à traverser la salle de garde et la cour avant d'arriver au pont-levis qui les mènerait dehors. Dans la première pièce, six soldats jouaient aux dés ou discutaient. Merlin attira soudain Arthur contre lui au moment où l'un des gardes passait à côté d'eux. Les deux hommes retinrent leur souffle, mais l'autre ne sembla rien remarquer d'anormal. Ils traversèrent silencieusement la salle et passèrent la porte qui menait dans la cour. Là encore, ils réussirent à avancer sans encombre jusqu'au pont-levis.
Alors qu'il pensait qu'ils allaient réussir à quitter les lieux sans être vus, Arthur entendit soudain la voix de Merlin grogner :
— Le sort se dissipe déjà. Il va falloir courir !
Avant qu'il ait eu le temps de réagir, le sorcier l'entraîna avec force en direction de la sortie. Le prince eut du mal à le suivre, sentant le retour de la douleur. Des exclamations s'élevèrent derrière eux lorsqu'ils redevinrent totalement visibles. Arthur trébuchait presque à chaque pas tandis que son ami l'encourageait :
— Allez ! On y est presque ! Courage !
La peur de se faire reprendre par les hommes de Cendred et, surtout, que Merlin se fasse également capturer et torturer, sembla donner des ailes au prince qui réussit à courir sans tomber. Ils arrivèrent rapidement près des chevaux que le sorcier avaient dissimulés dans un bosquet d'arbres. Merlin aida Arthur à monter et une fois en selle, il prit les rênes des deux chevaux et les entraîna au plus profond des bois. Le prince avait du mal à rester conscient alors que la douleur l'avait à nouveau totalement envahi. Il s'effondra sur l'encolure de l'animal, s'efforçant simplement de ne pas en tomber.
***
Arthur reprit conscience dans un endroit sombre et frais. Il ne se souvenait absolument pas s'être évanoui, mais n'était pas surpris, compte tenu de la douleur qui tiraillait toujours son corps. Un gémissement lui échappa lorsqu'il tenta de bouger.
— Restez tranquille, souffla la voix douce de Merlin près de lui. Nous sommes en sécurité dans la grotte de mon père. Personne ne nous trouvera ici. Je sais que j'aurais dû vous ramener à Camelot où Gaius aurait pu vous soigner, mais le chemin était trop long. Les soldats de Cendred nous auraient rattrapés avant que nous ayons atteint la frontière. Je ne voulais pas prendre ce risque.
Arthur soupira, puis referma les yeux, essayant de ne pas penser à sa souffrance, de se concentrer uniquement sur la voix de son ami. Il sentit une main se glisser sous sa nuque pour lui redresser la tête et le bois d'un récipient contre ses lèvres closes.
— Buvez. C'est une potion dont j'ai trouvé la formule dans les affaires de mon père. Cela soulagera un peu votre douleur le temps que je fabrique de l'onguent.
Le prince obéit. Le liquide était tiède et avait mauvais goût, mais ce n'était rien à côté de tout le reste. Il avait l'impression que chacun de ses os étaient brisés, ce qui était sûrement le cas pour certains d'entre eux. La main de Merlin reposa sa tête sur l'oreiller, puis vint caresser ses joues et son front.
— Tout est de ma faute... Je n'aurais jamais dû vous laisser partir en pleine nuit...
Arthur voulut protester, mais il était trop épuisé pour parler. Le sorcier soupira :
— Essayez de dormir, je vais aller préparer l'onguent. Je ne serai pas loin.
Le prince l'écouta s'éloigner. À peine quelques secondes plus tard, il sombrait à nouveau dans le néant.
***
La douleur avait reflué. Elle était encore présente, mais beaucoup plus supportable que lors de son dernier réveil. Arthur ouvrit les yeux et plongea directement dans le regard tourmenté de Merlin posé sur lui. Il voulut parler, mais sa gorge était sèche. Il réussit à murmurer :
— Soif...
Son ami lui fit boire de l'eau fraîche, puis caressa encore une fois son front et ses joues.
— Vous avez eu un peu de fièvre, mais elle semble être tombée. Vous devez encore vous reposer. L'onguent devrait totalement soigner vos blessures. Il faut juste lui laisser le temps d'agir. Est-ce que vous avez faim ?
Arthur répondit d'un signe de tête négatif. Il demanda d'une voix un peu rauque :
— Comment m'as-tu retrouvé ?
— Je vous ai vu en rêve... Vous étiez enchaîné dans un cachot et vous vous faisiez torturer par un homme. Il y en avait un autre à côté de vous que j'ai reconnu comme étant Cendred.
— Combien de temps suis-je resté là-bas ?
— Il s'est écoulé deux jours entiers depuis votre départ d'ici. J'ai eu ce songe la nuit dernière et je suis parti immédiatement à votre secours. Je vous avoue que j'ai dû « emprunter » les deux chevaux que nous avons utilisés, mais je les rapporterai à leur propriétaire dès que vous irez mieux.
Un voile de terreur assombrit le regard clair de Merlin au moment où il soufflait :
— J'ai eu si peur d'arriver trop tard... Je n'aurais jamais pu supporter de vous perdre... Lorsque vous êtes parti, j'ai eu l'impression que l'on m'arrachait une partie de mon cœur, mais à l'idée que vous soyez mort...
Il s'interrompit, au bord des larmes. Arthur eut soudain l'impression de retrouver « son » Merlin, avec sa fragilité, sa candeur et sa maladresse. Et c'est à cet instant précis qu'il réalisa quelle était la nature exacte de ses sentiments pour celui qui se tenait près de lui. Il comprit pourquoi le départ de Merlin l'avait autant affecté, pourquoi il s'était réjoui que Gwen épouse Lancelot et pourquoi il avait pris autant de risque pour venir chercher celui qu'il savait être un sorcier. Cette révélation s'accompagna d'une autre qui lui serra le cœur : il avait lui-même du mal à comprendre comment il pouvait avoir de tels sentiments pour un homme alors il savait qu'il allait à son tour devoir garder un lourd secret et mentir. Il n'avait aucune envie que Merlin s'éloigne à nouveau de lui.
Inconscient de son trouble, le sorcier souffla soudain :
— Je n'aurais jamais dû venir à Camelot... Si je n'étais pas venu, vous...
— J'aurais été tué par la sorcière qui avait pris l'apparence de Lady Helen... ou par le chevalier Vaillant... ou par l'un des autres monstres que tu as vaincu. D'ailleurs, je me demande comment j'ai fait pour survivre avant ton arrivée !
Un léger sourire étira les lèvres de Merlin, réchauffant le cœur de l'autre homme.
— Je me le demande aussi...
Son visage se ferma à nouveau lorsqu'il reprit :
— Des gens innocents sont morts à cause de moi...
— Et tu en as sauvé des centaines d'autres ! Merlin, tu ne dois pas te sentir coupable de...
— Je le suis !
— Alors je le suis également ! Je suis coupable d'avoir été aussi aveugle, de ne pas avoir deviné plus tôt qui tu étais vraiment...
— Si vous l'aviez su, j'aurais été exécuté, soupira Merlin.
Arthur sentit l'agacement le gagner :
— Pourquoi tout le monde croit toujours que je suis comme mon père ?
Devant le regard surpris de son ami, il se calma et expliqua :
— Il est sûr qu'au départ, j'aurais eu peur et je t'aurais sûrement fait enfermer... mais ensuite, j'aurais compris que tu n'avais fait que sauver des vies et je t'aurais fait confiance. Je te fais confiance... Si tu nous avais voulu du mal, à mon père ou à moi, je ne serais déjà plus de ce monde. Je sais que tu as toujours voulu faire le bien. Ne crois-tu pas qu'il m'arrive de me sentir coupable d'avoir survécu lorsque tous mes hommes meurent au cours d'une bataille et que je survis ?
Merlin ne répondit pas, mais il sembla se rasséréner un peu.
— Vous devriez dormir encore, souffla-t-il au bout d'un moment. Vos blessures seront guéries à l'aube.
Arthur referma les yeux et se laissa emporter par le sommeil.
***
Cette fois-ci, lorsque le prince s'éveilla, il se sentait en pleine forme. La douleur s'était totalement envolée, mais il était affamé. Il s'assit et jeta un regard autour de lui. Merlin n'était nulle part en vue. Un peu inquiet, il allait se lever lorsqu'il vit son ami entrer dans la grotte. Le jeune sorcier sourit :
— Comment vous sentez-vous ?
— Beaucoup mieux ! Et j'ai une faim de loup !
— Je l'avais prévu.
Merlin lui apporta une assiette d'un appétissant ragoût et un énorme morceau de pain frais. Puis il alla s'asseoir près du feu, tournant le dos au prince.
— Tu ne manges pas ? Demanda Arthur entre deux bouchées.
— J'ai déjà pris mon petit-déjeuner tout à l'heure.
Le ton triste de son ami coupa presque l'appétit du blond qui souffla :
— Qu'y a-t-il ?
Merlin soupira profondément avant de répondre :
— Maintenant que vous êtes guéri, vous allez repartir.
Arthur posa son assiette et se leva. Ses muscles étaient un peu engourdis. Il s'étira consciencieusement puis alla rejoindre son ami. Merlin leva un regard surpris sur le prince lorsque celui-ci lança :
— Il est hors de question que je parte sans toi !
— Vous le devez ! Je ne peux pas retourner à Camelot maintenant que...
— Que je connais ton secret ? Tu veux vraiment me vexer on dirait !
— Non, je...
— Je t'ai déjà dit que je ne suis pas comme mon père. Si c'était le cas, je ne serais pas venu ici te chercher mais te tuer.
— Me chercher ?
— Pourquoi croyais-tu que j'avais fait tout ce chemin ? Ton secret est en sécurité avec moi. J'ai confiance en toi, Merlin... et j'aimerais que tu aies autant confiance en moi...
— C'est le cas, mais...
— Mais ?
Le sorcier baissa les yeux en soupirant.
— Vous ne savez pas encore tout de moi... Être un sorcier n'est pas le seul secret que j'ai dû vous dissimuler...
Arthur s'agenouilla à côté de son ami, surpris.
— Dis-moi.
— Vous ne m'avez pas haï pour ce que je suis... apparemment, vous ne me haïssez pas d'avoir libéré le dragon... mais vous me haïrez pour... cet autre secret que je ne peux vous révéler...
Un peu agacé, le prince grogna :
— Tu en dis trop ou pas assez... Puisque tu sembles si persuadé que ce que tu dissimules me fera te fuir, pourquoi ne pas me le dire ? Ainsi, je repartirai... seul... et tu n'entendras plus jamais parler de moi.
— Ce serait peut-être effectivement la meilleure solution pour vous comme pour moi... Il me sera ainsi plus aisé de vous oublier si je sais que vous me haïssez.
— M'oublier ? Ai-je donc été si terrible avec toi durant le temps où tu as été à mon service que tu veuilles m'effacer de ta mémoire ?
Merlin se leva d'un bond, visiblement mal à l'aise. Il s'éloigna d'Arthur qui se leva à son tour et se planta contre la paroi, les bras croisés. Il voyait bien que son insistance faisait souffrir son ami, mais la petite lueur d'espoir qui s'était allumée dans son cœur l'empêchait d'abandonner la partie. Il devait savoir si ce que Merlin dissimulait était ce à quoi tout son être aspirait... ou s'il se faisait simplement de cruelles illusions. Le sorcier lui tourna le dos, puis finit par répondre à sa question :
— Je n'ai aucune envie d'oublier votre existence... J'aimerais juste... que les sentiments inavouables et interdits qui emplissent mon cœur disparaissent à tout jamais...
À cet instant précis, Arthur sut qu'il avait deviné juste. En une fraction de seconde, tous les obstacles à leur bonheur traversèrent ses pensées, mais il les ignora. Il voulait être heureux, peu importe les conséquences. Il s'avança vers Merlin qui lui tournait le dos, le front appuyé contre l'une des parois de la grotte.
— Ne t'es-tu pas demandé pourquoi je t'accorde ma confiance alors que tu es un sorcier ? Ne t'es-tu pas demandé quels pouvaient être les sentiments inavouables et interdits qui emplissaient mon propre cœur ?
À ces mots, Merlin fit volte-face et sursauta presque en voyant que le prince n'était plus qu'à un pas de lui.
— C'est impossible... souffla le sorcier en le fixant avec ahurissement.
— Totalement incroyable oui, impossible non, sourit Arthur.
Il franchit la distance qui restait entre eux et posa ses mains sur les hanches de l'autre homme. Leurs visages se touchaient presque. Merlin baissa les paupières. Arthur sentait le souffle de son ami contre ses lèvres. Il hésita un court instant avant de poser avec douceur sa bouche sur celle du jeune sorcier. Celui-ci était figé, mais ne le repoussa pas, finissant même par se détendre au bout de quelques secondes. Le prince recula, le cœur battant à tout rompre. Aucun des baisers qu'il avait jadis donnés à des femmes n'avait affolé ses sens ainsi.
— Suis-je en train de rêver ? Souffla Merlin, les yeux toujours clos.
— Regarde-moi...
Le sorcier ouvrit les paupières. Leurs regards se soudèrent.
— Tu ne rêves pas, sourit Arthur.
Merlin enfouit son visage dans le cou de son compagnon qui le serra contre lui, savourant ce moment sans penser à rien d'autre qu'à celui qui était entre ses bras. Au bout d'un long moment, le sorcier se redressa et repoussa légèrement son ami qui lui demanda :
— Vas-tu rentrer avec moi à Camelot ?
Merlin le fixa un instant en silence, puis sourit :
— Comment crois-tu que je pourrais me passer de toi à présent ?
Malgré le soulagement que cette réponse lui apporta, Arthur était inquiet :
— Mon père doit être fou de rage s'il a reçu le message de Cendred.
— Alors nous devrions partir immédiatement ! Je nous prépare des victuailles pour la route.
— As-tu rendu les chevaux ?
— Non.
— Alors nous allons les utiliser pour rentrer. Il nous faut retourner à Camelot au plus vite avant que mon père ne lance une armée à ma rescousse. Si la guerre est déclarée entre nos deux royaumes, la paix sera des plus difficiles à retrouver.
***
Les deux hommes chevauchaient rapidement vers Camelot. Ils ne parlaient pas, l'un et l'autre aussi tourmentés à l'idée que l'armée d'Uther ne soit déjà en route. Alors qu'ils émergeaient au sommet du colline qui surplombait la rivière qui servait de frontière entre les deux royaumes, ils virent avec effroi qu'une trentaine de soldats de Cendred était alignés le long du cours d'eau, empêchant quiconque de le franchir. Et, en levant les yeux vers l'horizon, ils purent voir au loin un groupe de chevalier de Camelot qui approchaient au grand galop.
Arthur ne voyait pas quelle solution s'offrait à eux. Ils n'avaient aucun moyen de traverser la frontière sans se faire prendre. Et si les hommes d'Uther rencontraient ceux de Cendred, tout cette histoire allait se terminer dans un bain de sang.
— Tu me fais confiance ? Demanda soudain la voix de Merlin près de lui.
— Bien sûr ! Ne te l'ai-je pas déjà dit ?
— Si, mais je voulais l'entendre à nouveau. Je sais comment nous faire traverser les lignes ennemies. Mais, je dois bien sûr avoir recours à la magie...
— Si quelqu'un découvre que...
— Personne n'en saura rien. Suis-moi et surtout ne me quitte pas des yeux !
Il partit au galop en direction de la frontière. Arthur le suivit abasourdi. Alors qu'ils descendaient la colline, s'approchant de la rivière, une brume épaisse les entoura soudain, rendant la visibilité quasiment nulle. Le prince avait le plus grand mal à distinguer son compagnon devant lui. Il fonçait droit devant, espérant que le sortilège utilisé par Merlin dure suffisamment longtemps pour qu'ils puissent passer la frontière.
Tout à coup, aussi brusquement qu'elle était apparue, la brume se dissipa. Arthur vit qu'ils se trouvaient dans la forêt, en sécurité sur les terres de Camelot. Merlin ralentit l'allure, se laissant rattraper.
— Bien joué !
— Merci ! Sourit le sorcier.
Ils reprirent leur route au trot. À présent, il n'y avait plus aucun risque. Ils ne leur restait plus qu'à rejoindre la troupe envoyée par Uther et rentrer à Camelot avec les chevaliers.
— Merlin ?
— Oui ?
— J'aimerais que tu me promettes d'être très prudent lorsque tu utilises la magie.
— Je le suis toujours !
Arthur lui jeta un regard circonspect.
— Oui, bon... en général, je le suis... la preuve, tu n'as rien soupçonné pendant des mois !
— C'est vrai. Mais tout a changé maintenant. Je veux que tu ne prennes aucun risque. Je ne veux pas te perdre...
— Je te promets d'être très prudent. Encore plus qu'avant.
— Merci.
Ils chevauchèrent encore quelques minutes en silence, puis Merlin lança :
— Arthur ?
— Oui ?
— Quelque chose me tracasse depuis tout à l'heure...
— Je t'écoute.
— Il m'avait semblé... je pensais que... Et Guenièvre dans tout ça ?
Arthur sourit :
— Elle va épouser Lancelot.
Merlin lui jeta un regard abasourdi :
— Quoi ?
Le prince raconta sa discussion avec la jeune femme. Son compagnon n'eut pas le loisir de réagir aux informations qu'il venait d'apprendre car la troupe de Camelot apparut soudain en face d'eux. Ils furent surpris de voir le futur époux de Guenièvre parmi les chevaliers.
— Sire !
Plusieurs exclamations fusèrent. Arthur répondit de son mieux aux interrogations pendant que Merlin s'éloignait un peu avec Lancelot. Finalement, ils reprirent la route vers Camelot.
À peine Arthur était-il descendu de cheval qu'il se retrouvait emprisonné dans l'étreinte puissante de son père.
— Mon fils !
— Je vais bien, Père.
Uther le repoussa pour le regarder, l'air inquiet.
— Tu n'es pas blessé ?
— Non.
Devinant les pensées qui traversaient l'esprit de son géniteur, Arthur souffla :
— Je me suis enfui avant que Cendred ait eu le temps de me torturer.
— Comment as-tu réussi un tel exploit ?
— Je vous raconterai tout ceci devant un bon repas, je meurs de faim !
Uther sourit. Il prit son fils par les épaules et l'entraîna à l'intérieur. Du coin de l'oeil, Arthur vit Merlin rejoindre Gaius qui le serra dans ses bras. Pendant le trajet, le prince avait eu le temps d'inventer un mensonge assez plausible pour expliquer son évasion du château de Cendred. Lorsqu'il le sortit à son père, celui-ci ne sembla pas mettre sa parole en doute. Arthur savait que les seules personnes à même de dévoiler la vérité à Uther étaient leurs ennemis, que le roi ne risquait donc pas de croire, et Merlin.
Après avoir mangé et pris un bon bain, Arthur prétexta être fatigué par le voyage et monta dans sa chambre. Il ne fut pas surpris d'y trouver le sorcier, debout devant la fenêtre.
— Que va-t-il se passer pour nous à présent ? Demanda Merlin sans se retourner.
Arthur ferma la porte à clé, puis s'approcha de son ami. Il se colla contre lui, l'enlaçant. Le brun laissa sa tête reposer sur l'épaule de son compagnon et ferma les yeux.
— Il est hors de question de faire comme si de rien n'était, souffla le prince. Je connais mes sentiments et les tiens.
— Personne ne devra savoir...
— Tu es un expert dans l'art de dissimuler des secrets, non ?
— Oui, sourit Merlin. Si seulement tu n'étais pas prince...
— Je le suis... je ne peux pas changer ce que je suis... ni ce que tu es... ni ce lien qui s'est tissé entre nous...
— Ma mère m'a dit un jour que nous étions les deux faces d'une même pièce. Je n'aurais jamais pensé qu'elle puisse avoir autant raison.
— Ta mère est une femme sage.
Ils restèrent un long moment silencieux, puis Merlin demanda :
— À présent que notre relation a changé, est-ce que je devrai toujours cirer tes bottes et faire reluire ton armure ?
Amusé, Arthur répondit :
— Bien sûr ! Il faut sauver les apparences. Les autres serviteurs ne comprendraient pas que tu bénéficies d'un soudain traitement de faveur. Et puis, je ne vais quand même pas faire mes corvées moi-même !
Merlin se retourna, déposa un léger baiser sur les lèvres du prince, puis se dégagea de son étreinte.
— Alors, ça veut dire que j'ai du travail à faire !
Un peu gêné, le blond souffla :
— Je t'accorde une journée de congé. Tu l'as bien méritée.
— Hors de question !
Arthur le fixa, un peu méfiant.
— Depuis quand as-tu un tel intérêt pour les tâches ingrates ?
— Depuis que le fait de les accomplir avec zèle peut me procurer une rémunération... en nature...
Et il quitta la chambre, laissant le prince avec la promesse de la prochaine découverte de délices inconnus.
Fin.