Et bien voilà une petite nouvelle (même pas une nouvelle, à peine un texte nain) qui m'est venue il y a une demi-heure.
J'étais en train d'écouter un peu de Vangelis (la musique pour le film 1492) et de lire les vieilles news, plus précisément l'article de la page 4 ou 5 qu'Anhelo a posté le 19 janvier 2006 à 19h23 (notez la précision), celui qui concerne les peines de prisons pour homosexualité au Niger et.. et voilà. Ca ne vaut pas grand-chose mais c'est pas trop mauvais, il me semble. Enjoy.
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Je m’appelle Fatima.
Aujourd’hui, je sors enfin de prison.
Malgré que ce ne soit pas la première fois, respirer une bouffée d’air frais en tant qu’humain libre quand on en a été privé durant cinq ans, ça fait toujours quelque chose.
Mais pourquoi étais-je en prison ? Bonne question.
J’ai comis un crime très grave. J’ai été complice d’une offense terrible à la religion. J’ai caché les criminels chez moi, je les aidé, et grâce à moi ils se sont enfuis. On ne les a pas rattrapés, merci Allah.
Pourtant, je suis religieuse. Musulmane pratiquante depuis ma plus tendre enfance. Mais voilà, j’ai été faire mes études en Europe avant de retourner au Niger, mon pays.
Et en France, j’ai appris à réfléchir par moi-même, à contester, à me forger une opinion, à ne pas en avoir peur, à l’assumer, et à ne pas hésiter à me dresser contre les puissants, à ne pas hésiter à renverser les barrières, même les plus solidement ancrées, si cela me paraissait nécessaire. Et cette barrière-là, elle était vraiment de trop. Alors, comme on balaie des miettes du revers de la main, je l’ai balayée. Plusieurs fois. A chaque fois, je faisais fuir les criminels, et c’est moi que la police attrapait. Cinq ans de cabane.
J’ai été battue, maltraitée, sous-alimentée, déshydratée, violée, et bien d’autres choses encore.
Et, dès que je sors, je recommence. Il y a toujours l’un ou l’autre de ces criminels que je dois aider sous peine de ne plus pouvoir me regarder dans une glace.
Ce matin, le Soleil me frôle doucement, comme pour refaire connaissance, comme s'il ne me reconnaissait pas. Je ne lui ai pas souvent montré me bout de mon nez, ces cinq dernières années. C’est normal qu’il lui faille un peu de temps pour me retrouver. J’ai l’impression de revoir un vieil ami oublié.
Je murmure une prière de remerciement à Allah, jette un dernier regard méprisant au gardien et, mes maigres affaires sous le bras, m’avance dans la lumière dorée ce cette matinée déjà chaude.
J’arrive enfin chez moi. Ma sœur m’accueille à bras ouverts, son mari aussi. Je sais qu’il me déteste mais, comme c’est moi la propriétaire des lieux, il ne peut rien dire ouvertement. Du moins quand je suis là. Et comme c’est la troisième fois que je suis absente pendant cinq ans, je suppose qu’il s’en donne fréquemment à cœur joie.
Ma sœur va chercher une caisse et me la donne. Elle contient des centaines de lettres. La plus ancienne date d’un mois après ma dernière arrestation. L’expéditeur, en réalité
les expéditeurs, sont mes amis, les derniers criminels en date que j’ai aidés à s’enfuir. Il y en a aussi quelques-uns des précédents. Moins, mais quand même, ils n’ont pas oubliés qu’ils me doivent beaucoup.
Le droit d’être eux-mêmes.
Le droit de vivre dans un pays où ils sont acceptés.
Le droit de s’aimer en paix.
Parce que, mes criminels, mes amis, leur seule faute, c’est d’être amoureux. D’une personne du même sexe qu’eux.
Et qu’ici, dans mon pays, grand coin de désert perdu, on n’accepte pas cela.
Alors il y a des gens comme moi, qui sont près à payer pour d’autres, près à souffrir pour que d’autres soient heureux.
Parce que la Liberté à un prix.
Mais, au fond, pourquoi je fais ça ? C’est simple. Parce qu’il y a de cela quelques temps, deux gosse de seize et dix-sept ans vivaient au Liban.
Leur crime fatal fut de s’aimer.
Ils furent pendus en place publique, pour homosexualité.
Et je les connaissais. Et je n’ai rien fait.
Alors je me fais pardonner. Je paye pour les autres.
Dès ce soir, j’aurai rendez-vous. Un nouveau couple à sauver. A qui donner une chance de vivre ailleurs et autrement, une chance de s’aimer. En Belgique ou en France, le plus souvent.
On m’attrapera ou pas. On ne les attrapera pas.
Jamais.
Plus jamais.
Ils n’auront plus à se cacher.
Plus à endurer.
Je suis là pour ça, c’est ma part du boulot.
Eux, ils ont à vivre heureux.
Je ne sais pas pour qui ce sera le plus difficile…
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