Non, pas les gosses ! ça gâche tout ces trucs là ! ça fout la merde !
Chapitre 50 : 1939
Dans la chambre d’hôpital, Steve avait fini par s’endormir. Il avait résisté longtemps, voulant rester éveiller pour veiller sur son compagnon. Seulement, l’obscurité aidant, il avait céder au sommeil, la tête penchée sur l’épaule, les paupières closent : maintenant, il rêvait.
Il était en Novembre 1939, c’était l’anniversaire de Buck. Steve avait quitté son travail à 19h00. Il faisait nuit, il n’avait pas vu son ami depuis plusieurs semaine, Madame Barnes lui avait fait remarquer qu’il ne posait pas à la maison et que, elle non plus, ne le voyait plus beaucoup. Ce soir là, il espérait le trouver enfin. Il lui manquait, pendant des années, ils ne s’étaient que très peu quittés. Ils se voyait presque tous les jours. Depuis quelques mois, c’était différent, Buck paraissait l’éviter, Steve se demandait s’il avait fait quelque chose de mal, il ne trouvait pas. Il avait longtemps cherché quoi lui offrir, il avait finalement opter pour un aftershave Aqua Velva, sachant que Buck se ruinait en s’en aspergeant tous les jours. Il frappa chez lui, Mme Barnes ouvrit. Elle sourit largement : « Steve ! Comme je suis contente de te voir, Buck est dans sa chambre, il est rentré tout à l’heure et s’est enfermé, il a une tête terrible, ça n’a pas l’air d’aller fort. J’ai même pas pu lui parler…
Steve montra le petit paquet cadeau qu’il avait dans la main.
- J’ai ça pour lui…
- Si c’est toi, il ouvrira.
- J’espère…
Steve monta, frappa contre la porte à la peinture écaillée. Buck bougonna :
- Fichez-moi la paix.
- C’est Steve.
Il y eut un court silence, finalement, Buck reprit :
- J’ai envie de voir personne.
- J’avais un truc pour toi… pourquoi tu fais la tête ?
- Je suis fatigué.
- Ouvre-moi, grand imbécile, j’ai besoin de te parler.
- Pour quoi faire, depuis quand ma vie t’intéresse !
- Bucky ! Tu es mon ami depuis toujours, si tu vas mal, ça m’intéresse.
- Je vais très bien.
- Bon, fit Steve, je pose ça par-terre et je m’en vais.
La menace fit son effet. Dans la pièce, des pas se firent entendre.
- Non Steve ! Pars pas…
La clef tourna dans la serrure. Buck ouvrit. Il apparut, la chemise débraillée, sortie du pantalon, les cheveux emmêlés. Il avait maigri, il avait les yeux cernés, la bouche triste. Steve entra. L’autre referma la porte à clef avant de retourner s’allonger sur son lit. Il enlaça son oreiller difforme et y fourra son nez boudeur. Steve s’assit près de lui. Il vit l’ours en peluche tombé sur le ventre sur un coin du matelas, son regard revint vers Buck. Il eut envie de passer sa main dans les cheveux ébouriffés, il chassa l’idée, c’était ridicule, Buck n’était plus un petit garçon.
- Bucky, dit-il, c’est ton anniversaire…
- Je sais.
- J’ai un cadeau pour toi.
Il posa le petit paquet sur le chevet en ajoutant :
- Bon anniversaire, mon vieux…
- Merci, c’est gentil… mais tu sais, le fait que je sois né n’a rien de glorieux, c’est une calamité…
- Ne dis pas de connerie.
Buck lâcha son oreiller pour s’asseoir près de Steve. Il arracha le papier cadeau et sourit en voyant l’emballage de la bouteille.
- Tu me dis toujours que j’en mets trop et tu m’en offre !
- C’est pour t’éviter de te ruiner…
Buck ouvrit le flacon, mouilla le bout de son doigt le renifla, puis dit en le posant sur le bout du nez de Steve.
- Ça sent bon.
Il referma la bouteille la boite, la posa sur le chevet et se recoucha, cette fois sur le dos, les bras derrière la nuque.
- Merci, Steve, je te prendrais bien dans mes bras mais je sais que tu n’aimes pas ça…
- Si ça peut te faire plaisir, je ferais l’effort.
L’autre se redressa d’un coup. Il saisit son compagnon et le pressa contre lui de toutes ses forces. Steve en eut le souffle coupé. Ensuite, il resta à l’observer en le tenant toujours par les épaules. Il sourit encore une fois en remarquant :
- Tu sens bon…
- Tu m’as mis de l’aftershave sur le nez.
- Tu me manques, Steve…
Surpris, celui-ci constata :
- C’est toi qui disparaît sans donner de nouvelles !
- Je ne peux pas faire autrement…
- T’es vraiment bizarre, Buck, parfois.
- Tu ne peux pas comprendre.
- Si tu m’expliquais, j’y arriverais peut-être.
- Non…
- Tu fais chier, Buck, tu le sais ça !
- Si tu le dis.
- J’ai l’impression que tu ne me fais pas confiance ! Je suis ton ami, si tu ne me parle pas, à moi, à qui tu te confieras ?
- A personne, je n’ai rien a confier à personne.
- Tu vas mal, tu crois que je ne le vois pas ?!
- Je m’en sors comme je peux… Steve, je fais au mieux…
- Tu appelles ça, « faire au mieux » ! tu t’es regardé ? Tu as maigri, tu as les cheveux trop longs, les yeux battus ! qu’est ce que tu fabriques ? Tu vois une fille ces derniers temps ?
- Non, rien de sérieux en tout cas.
- Ça veut dire quoi, ça ! Que t’en change tous les jours ?
- C’est un peu ça.
- Je ne pense pas que faire ça puisse te rendre heureux !
- Rien ne peut me rendre heureux.
- Merde.
- Comme tu dis…
Buck s’était de nouveau allongé, les bras croisés sous la nuque. Steve insista :
- Tu étais où ces derniers jours ?
- Chez des filles…
- Ça te sert à quoi de jouer à ça. Tu ne crois pas qu’une relation sérieuse serait plus productive.
- La personne que j’aime ne veut pas d’une relation sérieuse.
- Mais c’est qui cette fille ? Tu m’en parles tout le temps !
- Laisse tomber, Steve.
- Non, je veux savoir ce qu’elle a de si particulier !
- Elle ne m’aime pas comme je l’aime, c’est tout.
- Alors, passe à autre chose !
- Je ne peux pas. Cette personne c’est toute ma vie, je me détruis parce que sans elle, je ne suis rien.
- Mais Bucky ! Des filles il y en a d’autres !
- Je sais, c’est pour ça que je me change les idées avec les autres.
- Ça n’a pas l’air d’être la solution miracle, t’as l’air de plus en plus malheureux !
- C’est vrai ? tu trouves que j’ai l’air malheureux ?
- Oui, t’as une tête de chien battu, ça me fait de la peine. Il faut que tu oublies cette fille.
- Ça te fait de la peine de voir que j’ai de la peine ?
Steve haussa les épaules.
- T’es bête ! Évidemment que ça me fait de la peine, t’es comme mon frère, c’est flippant de te voir t’enfoncer comme ça…
L’autre fronça les sourcils :
- Je ne suis pas ton frère.
- Tu pourrais l’être.
- Non…
- Pourquoi ?
- C’est mon anniversaire aujourd’hui, et toi, c’est quand ?
- Dans trois mois…
- Tu en connais beaucoup, toi, des frères qui ont trois mois de différence ?!
- Idiot.
- Non, pas idiot, réaliste. Tu n’es pas mon frère. Tu es Steve… tu es juste Steve…
Il avait dit ça bizarrement. Steve l’observa, il avait presque l’impression qu’il allait pleurer en disant c’est derniers mots. Il tendit la main pour la poser sur un genou. Il demanda :
- Et à ce Steve, tu ne veux pas lui dire qui c’est cette fille ?
- Non, même à mon petit Steve, je ne lui dirai pas.
- Elle habite Brooklyn ?
- Oui.
- Je la connais ?
Buck hésita, il finit par répondre :
- Oui, plus ou moins…
- Ça veut dire quoi « plus ou moins » ?
- Que tu l’a sûrement déjà vu…
- C’est une femme mariée ?
- Mais non !
- Elle est plus âgée que toi ?
- Non, elle a mon âge…
- Qu’est ce qu’elle a de si particulier !
- Je l’aime Steve, je l’aime tellement…
- Mais si elle ne t’aime pas, ça avance à quoi tout ça !?
- A rien, ça fait horriblement souffrir, c’est tout…
- Je ne comprends pas, toutes les filles que je connais tomberaient dans tes bras sans problème…
- Toutes les filles, oui…
- Mais pas celle-là, c’est ça ?
- Tu ne comprends rien…
- Pardon ?
- Laisse tomber.
- Qu’est ce que je devrais comprendre ?
- C’est quelqu’un de très chouette… très gentil. C’est quelqu’un d’épatant… des cheveux blonds, des yeux bleus, un beau sourire… je l’aime tellement…
- Tu préfères les brunes en général…
- T’es vraiment bête…
- Merci, toujours sympa, bougonna Steve.
Buck se redressa pour venir s’asseoir près de lui, au bord du lit. Il posa une main sur une épaule.
- Steve, dit-il, même si tu ne comprends pas tout, tu dois savoir une chose : c’est que j’ai besoin de toi et que, même si t’as l’impression que je t’évite, j’ai besoin de toi, j’aurai toujours besoin de toi.
- Pourquoi tu ne te confies pas plus, alors ?
- Peut-être que j’y arriverai un jour… peut-être que tu finiras par comprendre…
- Je fais de mon mieux, mais tu me désespères.
- Désolé.
Steve passa ses doigts dans les cheveux trop longs. Il remarqua :
- Non mais, t’as vu ta tête !?
- Je ne te plais pas ?
- Tu as une tête d’idiot, comme d’habitude.
- C’est pas gentil, ça…
Comme Steve le dévisageait en souriant. Buck continua :
- Steve, je peux te demander un truc ?
- Tout ce que tu veux, c’est ton anniversaire.
- Reste là, cette nuit.
- Où veux-tu que je dorme ?
- Je te laisserai mon lit, je dormirai par-terre.
- Ça ne va pas ! Je vais dormir par-terre.
- Hors de question, tu aurai trop mal au dos demain !
Steve pris l’oreiller malmené, le jeta à la tête du lit et s’allongea en décidant :
- Alors tant pis ! Il faudra dormir dans le même lit !
Son ami se coucha près de lui en disant :
- Comme quand on était gamins, dans ta chambre ?
- C’est ça !
Buck laissa ses yeux errer sur le visage de son compagnon. Il roula sur le côté pour mieux le voir.
- Steve ?
- Oui ?
- J’étais malheureux, déjà…
- Pas pour la même raison, à l’époque, je savais pourquoi tu pleurais.
- J’avais beaucoup de chance de t’avoir.
- J’ai eu souvent, moi aussi, beaucoup de chance de t’avoir.
- Tu ne t’imagines pas à quel point ça me remontait le moral de t’avoir.
- Tu t’endormais contre moi, parfois.
- Steve ?
- Oui ?
- Tu le ferais encore, aujourd’hui ?
- Quoi ?
- Me serrer dans tes bras pour me consoler ?
- Tu es un peu grand pour ça, je pense.
- Je n’ai pas l’impression d’avoir tant changé, pourtant.
Steve se tourna pour le regarder.
- Tu es en manque d’affection ou quoi ?
- Peut-être…
Steve secoua la tête lentement, vaguement amusé.
- Tu veux un câlin ?
Buck ne répondit pas. Il se jeta contre Steve, fourra son visage au creux d’une épaule et se mit à pleurer. Steve se sentit tout bête. Ce qui lui paraissait tout simple quand il avait treize ou quatorze ans devenait embarrassant dans le contexte actuel. Néanmoins, il l’entoura de ses bras et le serra doucement.
- Ça va aller, Bucky, je serais toujours là pour toi…
- Promis ?
- Promis. Même si je n’y comprend rien. Si tes sentiments pour cette fille me semblent disproportionnés, je ne te laisserai jamais tomber.
- Tant que je t’aurai, toi, ça ira toujours…
- Idiot.
Toujours blotti contre lui, Buck proposa :
- Tu as faim ?
- Un peu.
- Je vais aller chercher à manger ! On va manger là, tous les deux !
Steve le lâcha et Buck s’assit sur le lit. Il passa ses paumes sur ses joues pour essuyer ses larmes, renifla :
- Je suis, idiot, c’est vrai…
- C’est pas grave, y’a longtemps que je suis au courant.
Buck se pencha vers lui pour l’embrasser rapidement sur la joue. Steve le scruta bizarrement mais ne dit rien. Son ami rougit un peu, il s’excusa en se levant :
- Pardon, je sais que tu n’aimes pas ça, j’avais besoin de t’embrasser… oublie ça… je vais chercher à manger. Tu ne bouges pas, je reviens !
Steve ressentait une tendresse particulière pour lui mais il ne comprenait pas pourquoi il éprouvait le besoin de l’embrasser. Toutefois, il ne s’en formalisa pas, ce n’était pas la première fois que ça arrivait. Il tendit la main pour s’emparer d’une bande dessinée qui traînait sous la table de chevet.
Ils mangèrent, discutèrent, jouèrent aux cartes puis Buck se jeta à plat ventre dans un coin du lit en déclarant :
- Je suis crevé, je dors…
- Avec tes chaussures ?
L’autre frotta ses pieds l’un contre l’autre jusqu’à ce que ses chaussures tombent par-terre. Steve ôta les siennes d’une façon plus prosaïque puis s’allongea près lui. Buck ramena la couverture sur eux, il éteignit la lumière. Au bout d’un long moment, il demanda :
- Pourquoi t’as pas voulu qu’on partage le même appartement ?
- J’ai besoin d’être indépendant, Buck.
- Ça aurait été chouette d’être ensemble.
- On pourrait se voir quasiment tous les jours, si tu voulais.
- Je ne peux pas, Steve, parfois, je ne peux plus…
- Tu ne peux plus quoi ?
- Je ne sais pas, il faut que je m’éloigne, c’est tout.
- Comment aurait-on pu vivre dans le même appartement, alors ?
- Ça aurait été différent, si tu avais dit oui, mais tu n’as pas voulu.
- Buck, tu es compliqué.
- Non, c’est la vie qui est compliquée…
Comme il ne disait plus rien, Steve demanda :
- Ça va ?
- Oui, je suis heureux d’être là, avec toi, comme avant.
- Si tu as besoin de moi, Buck, il faut me le dire.
- Tu as ta vie, j’ai la mienne… c’est tout.
- T’es vraiment bête des fois…
Buck resta silencieux, comme s’il hésitait sur ce qu’il devait dire. Il soupira puis finit par murmurer :
- Merci d’être là…
Il se mit en boule dans un coin du lit en ajoutant :
- Je suis si fatigué...
Steve voyait bien qu’il était à bout : sa maigreur, ses traits tirés, ses yeux rougis, cernés, en disaient long. Il remonta la couverture râpée sur le dos de de son ami.
- Essaie de dormir un peu, je ne sais pas combien de nuits blanches t’as dû passer, mais il faut vraiment que tu te reposes.
- Pardon, Steve…
- Idiot, dors. »
Buck s’était endormi facilement. Steve, lui, n’arrivait pas dormir. Le fait de sentir son ami près de lui, le troublait. Les choses n’étaient plus ce qu’elles étaient quand ils étaient gamins. A présent, le fait d’être allonger dans le même lit que son compagnon de toujours avait quelque chose d’embarrassant. Il émanait un certain érotisme de la détresse de Buck, Steve n’arrivait pas cerner cette tendresse qui l’assaillait. Ce besoin, s’il ne s’était pas fait violence, de le toucher, de lui montrer son attachement. Il regarda longtemps le dos de son ami qui respirait calmement : il était grand, robuste et, en même temps, tellement à fleur de peau, sensible, secret… Steve se demandait ce qu’il lui dissimulait avec un tel entêtement…
Il finit par se lever pour faire le tour de la chambre. Il s’assit devant le bureau bien rangé dans un coin de la chambre. Il y avait surtout des livres, toute une ligne, bien rangé sur le devant, Buck lisait Jules Verne. Steve resta un longs moments à lire les différents titres. Lui, ne les avait pas lu : il n’aimait pas. Buck lisait ça depuis qu’il le connaissait. Il passait des heures derrière un livre. Steve en feuilleta plusieurs, regarda les illustrations puis les remis en place. Il ouvrit les tiroirs, trouva d’anciens cahiers d’écolier. Il les sortit, tourna les pages. Dans le dernier tiroir qu’il ouvrit, il y avait sa photo. Une photo qu’il avait fait à l’âge de seize ans. Il était pas mal abîmée, ce qui montrait qu’on l’avait beaucoup manipulée. Steve l’a remis en place, referma le tiroir. Dans un coin du bureau, il y avait un cheval en bronze, dessous dépassait un coin de feuille. Steve s’en empara, l’ouvrit. C’était une sorte de poème en prose : « O toi… toi qui fait hurler mon cœur… pourquoi ne m’entend-tu pas ?… pourquoi me laisse-tu crier, seul ?… ma souffrance tu la vois pourtant… mais mon amour pour toi est une folie… j’ai mal, cette douleur, ce désir qui m’embrase quand nous sommes ensemble… Tu ne le partageras jamais ce désir, je suis perdu dans cet abîme sans fin… je tombes, je n’ai rien à quoi me raccrocher… O ! si tu pouvais me tendre la main, me voir, m’aimer… quel bonheur ce serait…
Steve relut plusieurs fois ces quelques phrases avant de remettre la feuille à sa place. De qui Buck pouvait-il être aussi amoureux ? A qui pouvait-il bien penser en écrivant ces mots ?
Steve se leva pour venir se rasseoir sur le lit. Son regard erra sur le jeune homme qui dormait. Il tenait l’ours en peluche dans sa main droite. Steve connaissait cet ours, c’était le sien, son vieux nounours qu’il lui avait donné quand ils avaient onze ans. Brusquement, quelque chose changea, il rêvait, il savait qu’il rêvait… Il allait se recoucher et dormir, la réalité, c’était ça. Mais tous ça n’étant qu’un rêve, Steve pouvait changer le passé, faire ce qu’il n’avait pas fait. Il posa sa main sur une épaule, Buck portait un débardeur blanc, il caressa la peau brune. Le jeune homme bougea, se retourna, ils se regardèrent, il était beau, tellement beau, Steve l’aimait comme un fou. Buck murmura : « Steve, fais-moi l’amour…
Il voulut l’embrasser, malheureusement le songe se terminait, il se réveillait, près de lui, une voix dit doucement :
- Steve ?
Il ouvrit les yeux et vit Buck qui le regardait. Il se frotta les yeux puis se leva pour venir s’asseoir sur le lit.
- Bucky, je m’étais endormi… ça va ?
- Je crois…
Steve caressa le visage trop pâle.
- Ça veut dire quoi « je crois » ?
- J’ai mal quand je respire, mais rien d’insupportable.
- Tu as un poumon perforé, ça passera…
Il poussa la couverture, écarta la chemise d’hôpital bleue et posa ses doigts sur le pansement qui couvrait les côtes sur le flanc droit. Il le sentait respirer, il lui sourit en disant :
- Tu respires, c’est tout ce qui compte…
- J’ai bien cru qu’il allait m’achever, sans l’intervention de ton bouclier, s’en était fini…
Steve caressait toujours les pansements.
- Je ne laisserais personne t’arracher à moi…
Buck referma ses doigts sur la main de son ami.
- Je suis tellement heureux quand tu es là…
- Je sais…
Il ôta ses doigts, ramena la chemise, remonta la couverture puis demanda en écartant les mèches qui tombaient sur le front :
- Tu as soif ?
- Oui.
Steve lui donna à boire. Il allait reprendre sa place sur la chaise, Buck bougonna :
- Steve, reste là…
- Le lit est un peu petit pour nous deux, il faut que tu te reposes.
- T’avoir près de moi ne m’a jamais empêché de dormir, au contraire.
Cela rappela son rêve à Steve. Buck dormait toujours mieux quand il était près de lui. Il revint s’asseoir sur le lit.
- Casse pied…
Buck lui fit une petite place en grimaçant :
- Viens.
- Arrête de bouger, crétin…
Steve s’allongea contre lui, l’entoura d’un bras et posa sa tête au creux d’une épaule.
- Là, ajouta t-il, tu vas être sage maintenant ?
- Je suis toujours sage.
- Tu parles !
- Quoi ! c’est vrai ! c’est toujours toi qui me faisait faire des bêtises !
Steve dû reconnaître :
- Oui, y’a du vrai… mais là, c’est moi qui veille, alors reste sage et essaie de dormir.
- Je suis fatigué…
- Évidemment, avec tout le sang que t’as encore perdu !
- C’est une malédiction.
- C’est un peu ça… mon pauvre bébé, il faudrait que ça cesse.
- Il faut peut-être que je paye pour toutes les horreurs que j’ai faites.
- Non ! Tu as assez payer, ta dose de malheurs tu l’as eu ! Tu as droit à la paix !
- Quand tu es là, contre moi, je suis en paix… en paix avec le monde entier.
- T’es mignon.
- C’est vrai ça ?
- Oui, si la situation n’était pas ce qu’elle est, je te serrais dans mes bras et je te ferais l’amour.
L’idée fit sourire largement son compagnon.
- Hum… faire l’amour puis se laisser glisser dans le sommeil…
- Arrête, tu m’excites, crétin !
- Obsédé…
- Non, juste très amoureux.
- J’ai envie de dormir…
- Dors.
- Je t’aime.
- Chut…
- St… »
Il dû vouloir prononcer son prénom mais le sommeil fut plus fort que lui. La main chromée qui reposait sur le bras de Steve glissa sur le lit. Celui-ci leva la tête pour lui jeter un coup d’oeil. Il avait les yeux fermés, ses lèvres entrouvertes respiraient paisiblement. Il ressemblait au Buck de son rêve, mais là, ce n’était pas un rêve, c’était un bonheur de chaque instant que de l’avoir là, tout contre lui…