Une dernière petite fic Fedal pour les amateurs (après j'aurais moins de temps disponible) et pour remercier
NathDW, Lucy, Mom, jashenry13 [b]et Djorie[/b] (et les autres) de leur assiduité
Bon l'actu n'étant pas fantastique pour Roger en ce moment, c'est surtout lui qui trinque au début mais j'ai promis une happy end à Mom
Le chant du cygne1- Il faut que j'y aille.
- Il préfèrera peut-être rester seul.
- Non, je sais ce qu'il ressent, il faut que j'y aille.Perdre est une composante du sport. Quelle saveur aurait la victoire si elle n'était pas parfois contrebalancée par des échecs? Pourtant, Roger détestait perdre, cela expliquait sans doute son incroyable palmarès et cette pression qu'il s'était mis en permanence pour rester au sommet et devenir le grand familier des premières marches du podium... Du moins, jusqu'à cette année noire où plus rien n'allait comme il le voulait... Trois défaites consécutives contre des joueurs classés en bas de l'ATP, le regard désolé et presque fuyant de ses proches et tous ces journalistes qui paraissaient se gargariser de ses derniers faux pas comme des charognards prêts à annoncer la chute du maître...
Cela faisait tellement mal. Et tellement mal aussi de faire semblant que tout cela n'était rien... De donner le change... De sourire... Toujours...Alors, quelques heures après cette dernière défaite, lorsqu'il fut enfin seul dans le vestiaire, il laissa éclater sa rage aussi violemment que dans ses jeunes années, laissant libre court à des larmes d'amertume qui lui donnaient l'impression de lui brûler le cœur. Pourquoi? Pourquoi tout s'effondrait si vite? Son poing frappa le carrelage du mur à plusieurs reprises, rien ne semblait pouvoir calmer la fureur désespérée qui l'habitait.
Au beau milieu de sa crise, les yeux brouillés par son chagrin, il releva la tête et il l'aperçut,
lui. Une apparition improbable. Car Rafael n'avait rien à faire ici.
Ici, à Gstaad, chez lui, en Suisse... Avec son air gauche et son sourire doux et compatissant, il lui tendait la main.
Mais en cet instant de douleur pour le suisse, Rafael n'avait plus rien de l'ami proche qu'il avait toujours été, il faisait partie de tous
ceux-là, de tous ceux responsables de ses maux. Rafael peut-être même plus qu'un autre. Il lui avait volé tant de victoires, tant de trophées et avait provoqué tant de larmes...
À quoi bon faire semblant? Il n'y avait pas de caméras dans ce vestiaire, pas d'obligations de faire bonne figure... Les yeux noirs de désespoir, il le repoussa violemment avec tout l'orgueil qu'il lui restait.
- Va-t-en!
L'autre homme ne bougea pas, encaissant sans broncher la déferlante d'injures que le suisse déchargeait à présent à moitié en anglais et à moitié dans sa langue.
Il savait. Il comprenait sa douleur. Et quand son aîné sembla épuisé par sa colère, il le prit dans ses bras avec une poigne ferme presque autoritaire.
- Calme-toi...
Le contact du majorquin, loin de le réconforter, sembla le brûler. À nouveau, il eut un geste de rejet...
- Ne me touche pas, ne m'approche pas, tout est de ta faute...
- Ce n'est qu'un match, ça ne veut rien dire... Rogelio, por favor.
Il recula pourtant de lui-même devant l'orage dans les prunelles sombres du suisse, chargées d'une telle rancœur qu'il était difficile de ne pas trembler devant cette tempête d'émotions.
- Si tu n'avais pas existé, j'aurais été plus heureux. Je souhaiterais de toute mon âme que tu disparaisses de ma vie !
Il aurait du voir la tristesse s'abattre comme une ombre sur le plus jeune. Il n'aurait pas du sous-estimer sa sensibilité, sa sincérité et l'attachement profond qu'il lui vouait. Peut-être alors qu'il aurait compris à quel point il le blessait. Mais en cet instant, ses mots étaient comme du venin supposé le décharger de sa propre peine et il ne fut pas capable de s'arrêter.
Doucement, l'espagnol lâcha le bras de l'autre joueur qui ressentit inexplicablement comme un sentiment de manque. Doucement, il lui adressa un dernier regard brillant d'une tristesse contenue mais si intense que le suisse sentit comme un grand froid en lui. Il n'eut pas le temps d'en analyser la raison que, répondant à sa demande, Rafael disparaissait du vestiaire... Le froid qui étreignait toujours sa poitrine s'intensifia, lui donnant la désagréable impression que le jeune homme ne se contentait pas seulement de disparaître de ce vestiaire...
mais après tout, c'est ce qu'il voulait, n'est-ce pas ?Cette sensation de perte distilla sa colère et sa peine et le laissa avec une profonde impression de vide.
Il s'apprêta à quitter les lieux, épuisé par ces différentes émotions mais finalement apaisé, lorsque quelqu'un lui barra brutalement le passage. Il leva les yeux sur un regard noir de désaprobabation.
- Novak ?
- Il voulait juste te réconforter.
- Quoi ?
- Rafael. Il est venu de Majorque juste pour toi.
Roger sembla comprendre les mots du serbe qui étaient assenés avec une dédain très marqué, mais il s'entêta malgré tout :
- Sans lui...
- Sans lui quoi? Tu aurais 25 titres au lieu d'en avoir 17?
Quelque chose comme ça. Mais dans la bouche de Novak, ça avait tout de suite l'air d'une mesquinerie absolue. Il ne répondit rien. L'autre homme en profita pour renchérir.
- Et quoi? Ta vie se résume à quelques statistiques? Rafa représente bien plus qu'un score sur le Guiness, tu n'es qu'un pauvre imbécile si tu n'es pas capable de comprendre ça.
Le regard triste de Rafael lui revint furtivement en mémoire, comme la vague conscience que le numéro un mondial avait plus ou moins raison, mais là en cet instant, ses défaites et sa lassitude supplantaient tout le reste. Il continua de se taire, faisant monter d'un cran la colère du joueur devant lui qui le toisait toujours de ce regard acier sans concessions.
- Il n'est pas responsable de tes échecs, Roger et il n'a sûrement pas mérité que tu le traites avec autant de mépris. Tu crois que sans lui, tu aurais remporté plus de titres, je pense moi que c'est tout le contraire.
- Comment ça ?
- Il t'a poussé à devenir meilleur.
Il se retira enfin du passage, laissant au suisse la possibilité de quitter les lieux. Il posa cependant sa main sur son épaule dans un geste plus brutal qu'amical qui contrasta avec l'hésitation de sa dernière phrase :
- J'aurais donné beaucoup pour que Rafael me regarde comme il te regarde.
Cette fois-ci, le Bâlois regarda le champion serbe dans les yeux et pour la première fois de la journée, il oublia tout ce qui concernait sa défaite, trop choqué par ce qu'impliquait cette dernière phrase.
- Nole, tu...
- Désolé pour ton match.
- Non, attends, qu'est-ce que tu veux dire?
- ... que tu es resté aveugle trop longtemps.
Et il quitta le premier la pièce.
A suivre.