Voilà un petit quelque chose qui me trottait en tête. Je suis passionnée par Salieri, je vous livre là un essai à vous de me dire ce que vous en pensez.
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Sa musique me brûle, elle me consume, elle me rends complètement fou. Il est le maître dans son art, peu importe les titres, peu importe ce qu'en pense les imbéciles. Les notes vrillent mon cerveau, leur perfection m'écorche. Jamais je ne pourrai faire de même. On m'oubliera, totalement effacé par le génie d'un jeune homme volage, sans attache, totalement impie et irrespectueux. Moi qui est consacré ma vie à remercier Dieu. Pour ce don qu'il m'avait octroyé. Dieu est un enfant cruel, il m'a donné une infime parti de ce qu'il a légué à Mozart. Les doigts crispés sur mon clavecin je suis bien incapable de composer la moindre chose. Sa musique m'a transcendé, me rendant incapable de réfléchir, incapable d'imaginer une mélodie, les notes se mélangent dans ma tête pour ne donner qu'une cacophonie insupportable. Je frappe un grand coup sur le bois lisse, me redressant. Je croise mon regard dans le miroir qui orne un mur. Est-ce bien moi ? Ou est mon regard fier, mon allure confiante. Il n'y a qu'un homme anéanti, je m'approche, et dois me retenir au guéridon pour ne pas sombrer. L'envie de pleurer m'obstrue la gorge. Mon talent n'égalera jamais le sien. Pourquoi ne suis-je pas mort avant qu'il n'apparaisse, ne pas avoir à vivre dans son ombre. Ne pas avoir à entendre son assourdissante perfection.
Ma haine pour lui s'est transformé en une haine pour moi même. Comme le haïr alors que je suis tombé fou amoureux de sa musique. Une folie telle qu'elle me rends incapable d'entendre autre chose, mes compositions me paraissent vulgaire. Les erreurs de mes élèves m'irritent plus qu'à l'accoutumée. Rien ne va plus dans mon monde depuis qu'il est apparut. Lui et ses rires. Lui et la facilité insultante qu'il a de composé les plus belles œuvres, de rectifier les miennes. Pourquoi ? Seigneur pourquoi faut-il qu'il s'en prenne à mon travail, qu'il m'en montre les défauts, qu'ils parviennent à améliorer une sonate fade pour la transformer de la plus merveilleuse manière.
« Maestro Salieri ? »
Je sursaute, une domestique est entrée, elle regarde le désordre que j'ai causé, les feuilles de partition répandu à terre. Elle paraît désolée, j'ignore si c'est pour moi ou pour le travail que je lui donne à faire. Elle finit par s'incliner, mais surgit dans la pièce, comme de l'enfer, avant qu'elle n'est plus l'annoncer.
« Je peux m'annoncer moi même. Wolfgang Mozart. »
Il s'inclina exagérément, il s'était toujours moqué du protocole. Une rage sourde m'envahit, que faisait-il ici ? De quel droit m'imposait-il sa présence dans mon refuge. La domestique nous jeta un coup d'oeil, puis devant le silence pesant préféra s'esquiver. Nous laissant lui et moi seul.
« Que me vaut l'honneur de vôtre visite ? »
Mon ton était acide, bien décidé à lui faire comprendre que sa venue à une heure aussi indue était peu apprécié.
« Salieri, vous m'empêchez de dormir le savez vous ? »
J'haussais un sourcil, voilà qui était nouveau, il était responsable des insomnies de Mozart, à la bonheur ! Ils étaient deux maintenant.
« Votre musique, il ne lui manque presque rien pour être parfaite ! Vous m'inspirez Salieri. Je veux travailler avec vous. Et je ne quitterais pas cette pièce tant que vous n'aurez pas accepté. »
Voilà autre chose. Salieri senti son sang bouillir dans ses veines. De quel droit venait-il poser ses exigences ! Venir porter un jugement sur ses œuvres. Il fit quelques pas vers lui, diminuant la distance entre eux.
« Partez. Vous n'êtes qu'un petit prétentieux, osez me demander de composer avec vous rien ne... » « Ah ! Assez ! Nous sommes musiciens, cela vous amuse de jouer le jeu de la cours qui aimerait tant que nous nous détestions pour alimenter les conversations dans les salons ? Vous valez bien mieux que d'être le patin torturé de quelques nobles mal poudré ! »
Son intervention me laissa pantois. Et pour la première fois, je ne sus que répondre. A son sourire il l'avait compris, et m'avoir mouché semblait lui procurer un incroyable plaisir. Il s'assit au clavecin, et joua les premières notes d'une composition que je ne parvenais à achever. Le voir jouer ma musique, l'entendre cela me procura une sensation incroyable.
« Je vous ai entendu répéter inlassablement ses quelques notes, elles sont parfaites, mais je me languis de la suite. Et je ne suis guère patient Salieri. Je l'exige. » « Vous l'exigez, qui êtes vous pour cela. » « Mozart, celui que vous jalousez inutilement. Vous bridez vous même votre talent en ne jouissant guère de la vie, et en vous cloisonnant à ce que demande la cours. »
Son franc parlé m'outrait et me fascinait, ses mots étaient aiguisés, précis, ils me lacéraient, me blessaient, me libéraient. Il avait raison.
« Je suis libre de composez, car je n'offre guère mes compositions à un public, mais à l'art, je compose à la beauté. L'Art seul doit être une motivation, non la reconnaissance et l'approbation d'une cours incapable de discerner les instruments dans un orchestre. »
Avait-il répété son discours avant de venir me tourmenter. L'approbation de la cours me suffisait, leurs louanges. Mozart avait raison. Jusqu'à le rencontrer je ne cherchais qu'à compter un public profane. A nouveau ma musique s'éleva emplissant la pièce. J'avais le cœur au bord des lèvres, soudain je m'écœurais moi même. J'avais été pleins d'entrain, pleins d'espoir, puis je m'étais laissé apprivoiser par le luxe et les quelques belles paroles que l'empereur m'adressait.
« Sortez. Sortez de chez moi. » « Il n'en est pas question. »
Une décharge me parcourus, et j'attrapais son bras, l'empêchant de jouer. Il leva vers moi des yeux pleins de défis. Ses cheveux blonds mal peigné, luisait étrangement autour de son visage, le visage d'un ange béni. J'éprouvais l'envie de le détruire, de le blesser, qu'il souffre pour senti à quel point j'avais mal.
« Toute cette violence, toute cette passion, elle ne demande qu'à être libéré ! Vous n'êtes pas aussi austère que vous y paraissez. Jouez ! Jouez ! »
Mes doigts s'étaient resserrés sur son bras, incapable de bouger, ses mots se répercutaient dans mon esprit. Il était diabolique, et il savait éveiller en moi un tempérament que je ne soupçonnais guère. Je le relâchais, passais ma main sur mon visage, puis m'assis sur le banc, sans même le regarder j'attrapais ma partition, puis la rejetais derrière moi. Je recommençais à jouer, fermant les yeux, me laissant guider par mes émotions. Je continuais cinq minutes durant, oubliant jusqu'à l'endroit où j'étais, mais pas la présence de Mozart, non au contraire je la ressentais dans chaque fibre de mon être. La dernière note s'égraina, et Mozart poussa une exclamation ravis.
« Travaillons ensemble. Aidez moi. »
Je tournais le regard vers lui, il paraissait plus heureux que jamais. Nous travaillâmes le reste de la nuit. Et nous achevâmes au petit matin « Per la ricuperata salute di Ophelia ». Nous étions fébriles, dans un état que je n'avais jamais connus. Nous parlions fort, arguant chacun des arguments sur la continuité du morceau. La plupart du temps Mozart avait raison, mais je ne pouvais longuement lutter contre lui.
« Nous la présenterons demain à la cours. »
J'avais si hâte de la faire entendre à tous. Mais le visage de Mozart s'assombris.
« Cette composition est bien trop personnel. C'est notre musique, notre œuvre. »
Il paraissait si grave. Et je compris, nous nous étions livré dans cette composition, il y avait là des choses trop personnel pour que quiconque puisse l'écouter. Ca aurait été comme se livrer à nu, un instant j'eus honte de l'avoir proposé. Cette nuit serait un secret, non un secret honteux, mais un instant à garder au fond du cœur. Mais je senti ma rancœur revenir, c'était là ma plus belle œuvre. Ma conscience rectifia, notre, mais je refusais de l'écouter. Je voulais la reconnaissance, je voulais la jouer avec Mozart, avec ce démon. Il s'était redressé, ses yeux étaient cernés, il semblait soudain bien accablé. Sans même y réfléchir, je me redressais comme un fauve, j'agrippais ses épaules et plongeait un regard qui devait lui paraître halluciné, dans le sien, plus interrogateur. Ma haine, me submergea, se sentiment fort. Il allait me rendre complètement fou, je ne pouvais déjà plus me passer de notre composition. Il voulait la taire ? Il était à ma complète merci, mais je savais que les menaces n'y feraient rien, il ne plierait pas. Il coupa court à mes réflexions d'une manière à laquelle je n'étais guère préparé. Brutalement il s'empara de mes lèvres, sa main se glissa contre ma nuque. Mon corps fut pris d'un puissant soubresaut. Ma haine ? Je ne pouvais posséder son talent, ni même lui faire entendre raison. Mais je pouvais le posséder lui. Son corps tout entier. Son âme je le compris il me l'avait livré dans notre musique, tout comme je lui avais livré la mienne. Notre baiser s'éternisa, fiévreux, nos mains se cherchèrent, et nous basculâmes sur un sofa. Je me foutais que se soit un homme. Je ne le haïssait plus, oh non, je l'aimais passionnément. Une passion qui me brulait avec la même intensité que celle qui semblait le dévorer. Nous nous unirent sans douceur, trop impatient. La fusion de nos corps me paraissait aussi intense que notre musique, j'en devenais accroc je le savais. Je désirais qu'il m'appartienne, en sachant pertinemment que Mozart n'appartenait qu'à son Art. Jamais notre musique ne fut joué en public, il n'existe qu'une partition inachevée, et nos souvenirs. Ma haine le faisait se sentir vivait, et moi pendant quelques instants j'étais libéré de son poids, incapable de m'en défaire totalement, je l'aimais trop cette haine, elle me permis de composer mes plus beau morceau. L'alliance divine ou démoniaque de la haine et l'amour, c'était notre histoire.
Notre jeu malsain qui chassait ses démons intérieurs et ma folie.
Il n'y a d'amour sans haine.
_________________ "I want the t-shirt for this season to be ‘It’s not Incest if it’s in a different universe" Seth Gabel aka Lincoln Lee
Dernière édition par Trazom le 09 Jan 2011 13:12, édité 3 fois.
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