V'la la suite !!!! Dieu que les hommes peuvent etre crétins parfois !
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Sous les yeux ébahit de l’homme et de l’elfe, la petite forme, facilement identifiable de la chouette, grandit sous la couverture jusqu’à devenir humaine.
— C’est… impossible, murmura Aragorn.
— Voyons, mon ami, je vous croyais un peu plus ouvert d’esprit. Depuis que nous nous connaissons, vous avez maintes fois vu la magie à l’œuvre.
— Gandalf, souffla faiblement une voix féminine.
— Ne craignez rien, vous êtes en sécurité, la rassura le sorcier avec chaleur. Racontez-moi, Poledra, que s’est-il passé ?
La jeune femme se tint coïte, prenant conscience qu’elle n’était pas seule avec le vieux sorcier. Ses yeux émeraudes se fixèrent d’abord sur Legolas, qui lui sourit avec bienveillance, avant qu’elle ne croise ceux, plus durs, d’Aragorn.
— Ainsi cela est arrivé, murmura-t-elle en voyant la couronne qui ceignait son front.
Il ne savait que dire. Il l’espérait depuis son retour mais son arrivée… elle était une… Comment diable avait-elle pu lui cacher cela ? Une violente colère s’empara de lui qu’il n’arriva pas à refréner. Elle s’était jouée de lui, Gandalf s’était joué de lui ! De quel droit avaient-ils changé le cours de son destin ? Legolas le contemplait de ses yeux céruléens et Aragorn sut qu’il était au courant depuis longtemps. Sans jeter un seul regard à la femme qu’il ne pouvait nier avoir aimé, il sortit de la pièce et descendit les marches de la tour aussi vite qu’il le put.
— Ne lui en tenez pas rigueur, l’excusa Legolas en elfique.
— Allez-vous fuir ainsi qu’il l’a fait ?
— Cela n’est pas dans mes intentions, je suis à votre service, dame Poledra.
— Merci, souffla-t-elle avant de se laisser glisser dans un profond sommeil.
Gandalf refréna son impatience à connaître les évènements. Il aurait aimé l’interroger sur ses frères, dans l’espoir qu’ils aient survécu. Il était tellement occupé à préparer la guerre contre Sauron, qu’il n’avait pas songé un seul instant que Saroumane attaquerait le berceau de leur ordre. Car il en était certain, cela s’était passé ainsi. Il l’avait cru en sécurité mais son manque de clairvoyance avait failli coûter la vie de la future reine et de l’héritier du trône du Gondor.
— Veillez sur elle, Legolas. Personne ne doit savoir.
L’elfe hocha la tête et prit place sur le rebord de la fenêtre. Il observa un long moment la sorcière endormie. Ses cheveux roux étaient épars sur l’oreiller, sa respiration était régulière, sa peau laiteuse portait de nombreuses marques de fatigue mais ce qui se remarquait le plus, c’était son ventre proéminent. Aragorn l’avait-il remarqué avant de quitter la tour ? Si ses calculs étaient exacts, songea l’elfe, la délivrance n’allait pas tarder.
***
Sa fidèle Anduril à la main, Aragorn faisait les cent pas dans la salle du trône qui était heureusement vide à cette heure tardive. Il faisait tournoyer son épée dans sa main droite, écoutant le bruit régulier de la lame reforgée par les elfes et qui, d’habitude, l’aidait à se calmer. C’était peine perdue et il le savait. Une foule d’émotions contradictoires avait pris possession de lui. Durant toute leur quête, il s’était laissé porter par l’espoir de vaincre Sauron et ses forces maléfiques. Il avait eu foi en Frodon, foi dans les hommes qui l’avaient rejoint pour l’ultime bataille. Il avait aussi gardé la foi malgré le départ d’Arwen, marquant la fin de leur amour. C’était pourtant lui qui l’avait incitée à rejoindre les siens, lui faisant croire qu’il était impossible. Un homme et une elfe… Comment auraient-ils pu vivre ensemble ? Et s’ils ne s’étaient pas rencontrés dans des temps aussi troubles leur amour serait-il seulement né ?
— Vous allez finir par l’user, fit une voix familière dans son dos.
— Si tel est mon bon vouloir, répliqua Aragorn en continuant ses moulinets.
— Je comprendrais qu’un autre que vous soit étonné, choqué peut-être, mais vous… après avoir affronté des orcs, des hurukaïs, des trolls et que sais-je encore… Après m’avoir vu chuter avec un balrog et revenir d’entre les morts, un peu de sorcellerie vous effrayes ?
— Effrayé, répéta le roi du Gondor avec énervement. Legolas me trouve frustré et vous, vous me trouvez effrayez !
— Frustré ? Reprit Gandalf, expliquez-moi donc cela.
— Je n’ai rien à vous expliquer. Durant toutes ces années, je vous ai fait confiance et vous ai suivi aveuglément, pourquoi ne m’avez-vous rien dit ?
— Parce que je n’en avais pas le droit, répondit calmement le sorcier en s’asseyant sur une chaise.
— Baliverne que cela !
— L’univers est régi selon des lois qui ne peuvent être contournées. Il en est de même pour la magie Aragorn.
— N’essayez pas de changer de sujet !
— Ne vous êtes-vous jamais demandé ce que j’avais fait durant les années précédentes au retour de Sauron ? Ne vous êtes-vous jamais posé aucune question sur moi ? Non, bien sûr que non, répondit le sorcier à sa place, vous m’avez pris tel que j’étais, pour ce que j’étais, sans avoir aucune idée de l’étendue de mes capacités, sans avoir aucune idée de l’existence de reclus que j’ai mené pendant longtemps.
— Je ne vois pas le rapport avec…
— Je n’ai pas terminé, le coupa sèchement Gandalf. Oui, c’est une sorcière et elle est bien plus âgée que vous. Oui, je l’ai placée sur votre chemin il y a bien longtemps dans le but de réaliser une ancienne prophétie dont vous n’aviez nul besoin d’entendre parler. Votre voie était tracée depuis longtemps Aragorn, vous l’avez reniée pendant un temps et force vous ais de constater que cela n’a servi à rien. Vous voilà roi et un roi a besoin d’une reine digne de ce nom, ainsi que d’un héritier.
— Que voulez-vous dire ?
— Que les deux se trouvent dans la tour Sud et qu’il ne tient qu’à vous de les rejoindre !
— J’ai peur de ne pas comprendre, répondit Aragorn qui avait soudainement arrêté de faire tourner Anduril dans sa main droite.
— Je crois au contraire que vous comprenez très bien. La seule question est celle-ci : votre amour pour cette femme est-il aussi fort que celui qu’elle vous porte ?
— Il suffit ! Vous parlez d’amour alors que tout n’a été que fourberies, perfidies et intrigues !
— Ara…
— Non, Gandalf ! J’en ai plus qu’assez de vos manigances, je croyais que tout était fini, que nous allions vivre enfin loin du mal mais…
— Gandalf, les interrompit Legolas en pénétrant dans la salle. Je crois que le moment est venu !
— C’est bien ce que je craignais, murmura le sorcier, le voyage l’a durement éprouvée. Aller cherchez la sage-femme et amenez-la dans la tour.
Legolas hocha la tête et s’éclipsa rapidement. Gandalf parla un moment dans sa barbe dans un langage qu’Aragorn ne connaissait pas. Il ne pouvait nier que l’interruption de l’elfe avait dissipé sa colère. Elle était en danger. Tant qu’il l’avait cru en sécurité, il avait pu laisser libre cours à son courroux mais il savait que nombre de femmes mourraient en couche, fut-elle sorcière que les risques n’en étaient pas moins grand. Il venait juste de tirer cette conclusion quand il s’aperçu que Gandalf n’était plus avec lui. Sans plus attendre, il emprunta le même chemin que le sorcier. Il pourrait toujours reprendre sa colère l’où il l’avait laissé, se dit-il en grimpant rapidement les marches de la tour.
A suivre...
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