Voilà quelques petits textes que j'aimais encore assez bien et que j'ai écris à mon cours d'écriture...
En gros, on nous a donné des thèmes, et on devait écrire là-dessus plus ou moins dix minutes...
Donc voilà, si ça vous interesse... Ce serait sympas d'avoir des avis extérieurs... ^^ (j'ai mis le thème à chaque fois en titre)
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Partir.
D’accord. J’ai compris. ça va, je me barre! J’m’enfuis, j’me casse, j’me taille... Loin...
Ah! Si seulement j’étais un playmobil! Assez petit pour m’envoler sur un avion de papier! Ou même, je ferais comme Nils Olgerson, j’irais à dos d’oie parcourir le monde...
Paraîtrait qu’ailleurs, ce serait moins gris. Gris? Même le mot est moche! C’est con, gris, c’est petit.
Moi, j’aimerais goûter un mot comme zinzolin, un mot comme turquoise, ou pourpre, ou safran! Je me planterais tout en haut d’une montagne et alors, je saurais ce qu’ils veulent dire, tout ces noms de couleurs...
Une libellule, peut-être, sera ma compagne de voyage. Tout le monde a besoin de compagnie! Mais moi, je ne veux pas d’un truc collant, gluant, et qui cause sans cesse. Alors une libellule, ce sera bien... C’est joli et discret. ça fait chic.
J’irais un peu au fond de l’océan. Histoire de voir comment ça va, là-bas. Si c’est comme on dit, noir et froid. Peut-être pas, après tout! Peut-être que ça sent la menthe poivrée et que les pieuvres géantes chantent du Julien Clerc en agitant leurs huit bras.
J’ai toujours voulu avoir une pieuvre géante pour amie. Dans les dessins animés, comme ami, les héros ont toujours des animaux! Pourquoi pas une pieuvre, hein?
Mais Lola - c’est comme ça que s’appellera ma libellule - sera sûrement jalouse. Je lui donnerais des crackers au fromage pour la réconforter.
Après la montagne et l’océan, le ciel. Chouette!
(écris en dix minute)
sentiment fort décris comme amour puis comme haine...
Je m’assied sur le tabouret tendu de velours rouge. Je pose mes doigts, et merde, ça me fait des frissons du bout de mes orteils aux fourches de mes cheveux! Je calme les battements de mon coeur.
Est-ce que je souris? Oui, je crois bien.
Ne pas paraître idiote, surtout! Pas de fausses notes!
J’attrappe la partition, elle est posée sur le dessus, comme toujours. Elle est vieille, elle appartenait à ma grand-mère. Ce sont les inventions à deux voix de Jean-Sebastien Bach.
Je caresse un peu la couverture - faire durer le plaisir -, je hume les pages usées. Bon. Il faut y aller.
Je tremble. J’ai les mains moites. Je tente de poser la partition, mais elle glisse, dégringole et fait sonner «la, si do» avant de tomber par terre, ouverte à la page dix.
Pardon!
Je reste figée dans le silence. Puis, doucement, je ramasse le livre, le pose sans trembler cette fois. Mes mains moites glissent sur le clavier. Allez. Le début, c’est quoi encore?
Peur mêlée d’impatience du plaisir à venir...
Les touches blanches sourient aux touches noires: «Bonjour, ça va?». Elles m’attendent, n’attendent que moi, que mes doigts. Donc: Fa, la, fa do...
J’y vais. Je martelle les touches. Tac, tac, tac...
Fureur soudain. Envers cette musique qui m’enchaîne, m’emprissonne, envers mes doigts qui n’arrivent pas à dire ce que ce truc, là, au fond de mon ventre et que certains appellent l’âme me hurle...
Jean-Sebastien Bach. Je joue une cathédrale.
Je m’énerve stupidement toute seule, j’accélère le rythme, le pousse à l’extrême, ma main dérape, ça devient bouillie, les deux voix se mélangent, on n’y comprend plus rien...
Stop! Stop. Silence, un peu. Mal aux poignets.
Je n’y arrive pas! Je n’y arriverais jamais. Stupide Bach, stupide piano, horreur noire à pattes velues!
(écris en sept minutes. Achevé.)
Lunette.
Dégeulasse. Ces toilettes sont dégeulasses. Non mais, regardez-moi la lunette! Franchement, on se demande ce que foutent les madame pipi de toute la sainte journée!
Voilà ce que pense Anna, en ce mercredi dix-sept septembre, à treize heure trente. Aujourd’hui, elle a Jérôme avec elle. Il voulait aller au Quick, bon, ils vont au Quick... Mais franchement, ces toilettes... Pas bravo, hein!
Elle peste en remontant son pantalon, s’énerve sur la braguette qui refuse de se fermer. Quelqu’un a griffoné «sale pute» sur la porte. Elle enroule ses paumes de papier toilette pour attrapper la clinche. C’est vrai, on ne sait pas qui l’a touchée, cette clinche! Quels horribles microbes sont déposés dessus!
Elle se lave les mains, se les frotte à se les rendre rouges. Ses mains blanche comme une souris de laboratoire, ses mains aux longs doigts fins...
Les ongles sont rongés jusqu’au sang.
Le miroir des toilettes du Quick est brisé. Juste une large fêlure, au milieu. Juste une large fêlure sur le visage d’Anna.
Elle évite de croiser son propre regard trop vide, sèche ses doigts sur son jean’s et se dirige vers la sortie de cet horrible endroit...
Mais il y a quelque chose, au sol. Une larme.
Anna sait que c’est une larme parce qu’elle-même a beaucoup pleuré.
Sur le sol des toilettes du Quick de la rue Neuve, il y a donc une larme. Les gens n’ont vraiment aucune dignité! Pleurer dans des toilettes!
Anna secoue la tête, consternée. La larme la regarde de son regard de larme, pathétique ou sublime.
Elle sort des toilettes. Ecrase la larme.
Qu’est-ce qu’une goutte d’eau salée dans des toilettes publiques, après tout?
A sa table, Jérôme attend sa maman.
(Ecris en dix minutes. Achevé.)
Les grandes questions philosophiques.
Où vais-je? Moi, je sais!
Je vais sur un rocher qui surplombe la mer d’Irlande. Je vais avec piano et crayon comme Malbrough s’en va en guerre.
Je vais faire connaissance de chaque brin d’herbe, de chaque nuage qui croisera mon chemin.
Je vais, pour lire tout ce qui se lit, connaître tout ce qui se sait - et le reste, je l’inventerais.
Je vais. Tout simplement. A dos de chameau, en train, en sous-marin, je vais!
En Irlande, sur mon rocher.
Je pourrais être au Kenya et rester là-bas. Sur mon rocher.
Je vais comme un oiseau qui se barre avec le vent, je surferais sur les étoiles, saluerait les comètes...
Je vais comme d’autres se saoulent à la vodka vers un avenir de solitude et de lumière.
Je m’en vais, d’ici, d’ailleurs et de nulle part. Pour aller à d’autres ici, ailleurs et nulle part. Sur mon rocher. En Irlande.
Je vais à la rencontre de légendes et de mythes. Je vais dans les forêts anciennes retranscrire leurs musiques.
Je vais pour rester la même moi.
Je vais pour pouvoir revenir, m’écrier: «ce que vous m’avez manqué!»
Je vais pour pouvoir raconter, enfin, mon Irlande et mon rocher. Pour immortaliser l’infini, pour capter l’éphémère, à tout jamais.
Je vais. Loin. Là où tout est possible, où la mer et le ciel se touchent et mélangent leur cheveux... Je serais au milieu.
(écris en dix minutes. Achevé.)
_________________ «-Tu es un drôle d'animal, Forster Tuncurry. Fou le soir, malade le matin, normal le midi. Et l'après-midi?
-Tout à la fois. Ou autre chose... Qui sait?»
L'escalier C, Elvire Murail.
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