Voici l'avant-dernier chapitre de cette première partie. J'ai un peu de mal à avancer sur la partie 2 donc il risque d'y avoir un très long délai pour la suite, je m'en excuse d'avance.
Bonne lecture ! ^^
Cybelia.
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Chapitre 9 : Guenièvre
Il ne fallut que quelques jours pour que la nouvelle de la reconquête de la cité par les Bretons et surtout par le nouveau souverain légitime se propage dans toute la région. Beaucoup d’ouvriers et de marchands vinrent proposer leurs services pour aider à la reconstruction de la ville, abîmée par la bataille et les années d’occupation par les Pictes.
Le lendemain de leur arrivée dans le château, alors qu’ils continuaient leur exploration, Lancelot et Arthur tombèrent sur une pièce dissimulée dans les sous-sols et qui contenait une multitude de parchemins que personne ne devait avoir lus depuis des années. Après en avoir parcouru quelques-uns, ils s’étaient rendus compte qu’il s’agissait des lois de Bretagne établies plus de vingt ans plus tôt par Uther Pendragon. Ils avaient fait part de leur découverte au Seigneur Bohort et, depuis ce jour, le nouveau souverain passait presque toutes ses journées à étudier les lois dictées par son père. Lancelot, quant à lui, préférait aider à la reconstruction de la Cité. Les deux hommes se voyaient donc assez peu dans la journée, mais passaient toutes leurs nuits ensemble.
Ce soir-là, alors qu’Arthur débouchait du passage secret menant à la chambre de son compagnon, il trouva ce dernier en train de lire un parchemin, les sourcils froncés.
— Une mauvaise nouvelle ?
Lancelot jeta un bref regard à son ami, puis reporta son attention sur le papier.
— Il s’agit d’un message de mon père. L’un de ses amis, le Seigneur Leodagan de Carmelide, a fort à faire avec les Saxons et il me demande si nous pourrions lui envoyer des renforts.
— Avec la reconstruction de Camelot et le risque de voir de nouveaux ennemis tenter de nous prendre la Cité, cela risque d’être difficile de nous séparer de vaillants combattants.
— Je le sais… Cela m’ennuie pourtant de rester sans rien faire. Leodagan est puissant et respecté. S’il acceptait de vous prêter allégeance, vous pourriez être sûr que de nombreux seigneurs le suivront.
Arthur se laissa tomber sur la paillasse de son ami en soupirant.
— J’en parlerais à Bohort demain matin.
— Bonne idée. Mon père m’indique également dans son message qu’il va nous envoyer des ouvriers, des soldats et des serviteurs comme présent au nouveau souverain de Bretagne, en gage de son respect et de sa loyauté.
— Je lui enverrai un message de remerciement dès que j’aurais décidé quoi faire au sujet du Seigneur Leodagan. Comment se passe la reconstruction ?
— Nous avons presque terminé le grenier à grain et un boulanger vient d’arriver. Il devrait pouvoir nous faire du pain frais dès demain.
— C’est une très bonne nouvelle, sourit Arthur.
Lancelot posa le parchemin de son père et vint s’installer contre son compagnon. Ils échangèrent un baiser passionné avant de basculer sur le lit pour laisser parler à nouveau avec passion la force de leur amour.
***
Le lendemain matin, dès qu’il eut terminé son déjeuner, Arthur alla rejoindre le Seigneur Bohort qui était déjà plongé dans l’étude des lois. Il lui expliqua la nature de la demande envoyée par Ban de Benoïc et lui demanda son avis.
— Messire Lancelot a raison. Que Leodagan vous prête allégeance serait un immense atout pour convaincre les autres seigneurs.
— Vous le connaissez ?
— Je l’ai déjà rencontré plusieurs fois. Je n’approuve pas toujours sa façon de gérer son domaine et ses gens…
— Pour quelle raison ?
— C’est un homme qui a tendance à utiliser la violence pour se faire respecter. A ma connaissance, aucun autre Seigneur ne l’a jamais attaqué pour tenter de lui prendre son domaine. Ils ont trop peur de lui. Cela a dû fortement égratigner sa fierté de devoir demander de l’aide à Ban de Benoïc.
— Vous pensez qu’il pourrait refuser de voir en moi le futur Roi ?
Bohort réfléchit un instant avant de répondre :
— C’est possible… j’ai bien peur que vous dussiez combattre, et prouver que vous utilisez Excalibur, pour qu’il vous accepte en tant que nouveau Souverain.
Arthur soupira.
— S’il le faut, je combattrai.
— Je vais donner des ordres afin que nous partions dès demain pour la Carmelide.
— Je préfèrerai que vous restiez ici.
Devant l’air étonné de son ami, le jeune homme expliqua :
— La menace des Pictes n’est pas totalement écartée. Camelot a besoin d’un homme fort pour la gérer en mon absence… et vous êtes cet homme.
— Je vous remercie de votre confiance, mais…
— Lancelot m’accompagnera. En tant que fils de Ban de Benoïc, il pourra m’introduire auprès du Seigneur Leodagan.
Bohort hocha la tête.
— Il sera fait selon votre volonté. Je m’occupe de faire préparer votre escorte. Le voyage sera long, je vous invite donc à vous reposer aujourd’hui.
— Je n’en ai pas besoin. Continuons à trier ces parchemins.
— Comme vous le voulez.
***
Le lendemain matin, à l’aube, une troupe d’une quinzaine d’hommes partait en direction de la Carmelide. Arthur et Lancelot chevauchaient au milieu du groupe composé de soldats aguerris dont le Lieutenant Willem. Le trajet fut long et éprouvant. A l’aube du douzième jour, ils arrivèrent en vue du château du Seigneur Leodagan. Vers midi, ils en franchirent la porte principale. Leur éclaireur les y attendait près de deux serviteurs qui se précipitèrent pour conduire les deux jeunes hommes à leurs appartements où ils pourraient se rafraîchir avant de se présenter devant le maître des lieux.
Lorsqu’ils se furent lavés et changés, Arthur et Lancelot furent conduits dans la grande salle où ils étaient attendus impatiemment par leur hôte. Celui-ci était plus petit que les deux hommes mais avait une carrure massive et une musculature impressionnante qui se devinait sous sa tunique aux motifs guerriers. Son visage était partiellement dissimulé par une barbe noire broussailleuse et d’énormes sourcils de la même couleur sous une tignasse épaisse et courte. Leodagan se leva et s’approcha de ses invités, toisant Arthur de haut en bas. Il s’arrêta sur le pommeau d’Excalibur, reconnaissant apparemment l’épée du Roi Uther. Puis, sans plus prêter d’attention au blond, il se tourna vers Lancelot qui s’inclina.
— Monseigneur, je vous remercie de votre hospitalité.
— Mon cher ami, bienvenue dans mon domaine. J’étais sûr que votre père m’enverrait le plus vaillant de ses guerriers et je ne me suis pas trompé.
Lancelot s’inclina à nouveau, puis jeta un rapide coup d’œil à Arthur avant de lancer :
— Messire, j’aimerais vous présenter le nouveau Souverain de Bretagne, l’homme qui a retiré Excalibur du rocher où elle était plantée depuis la mort du Roi Uther Pendragon, son fils, Arthur Pendragon.
Le jeune homme s’inclina à son tour devant Leodagan qui sembla apprécier cette marque de respect. Il sourit, puis fit signe à ses invités de le suivre. Il les mena devant une table où s’étalait une carte de la Carmelide. Le maître des lieux expliqua :
— Les Saxons ont quatre navires ancrés dans cette crique. Nous avons tenté plusieurs fois de les en déloger, sans succès. Nos pertes ont été terribles. Nous avons jusqu’à présent réussi à les contenir de l’autre côté des falaises en surveillant et bloquant tous les passages vers les terres. Mais cette situation ne pourra pas durer éternellement.
— Comment se ravitaillent-ils ?
— Ils envoient de petits bateaux chercher de la nourriture et de l’eau douce sur l’un de leurs gros navires qui se trouve au large.
— Vous n’avez aucun moyen de leur couper cet approvisionnement ? demanda Lancelot.
— Ils ont coulé une bonne partie de ma flotte. Et ce qu’il en reste n’est pas assez puissante pour s’attaquer à la leur.
Arthur intervint :
— Et si vous les laissiez passer par ce défilé ? Faites-leur croire qu’il n’est gardé que par un ou deux hommes afin de les appâter. Vous pourriez leur tendre une embuscade et vous débarrasser d’une partie de leurs troupes.
— C’est dangereux. Si nous sommes vaincus, ils n’auront plus qu’à prendre le château…
— Il suffit qu’un bataillon se place ici et un autre ici, ajouta le blond en désignant deux points sur la carte. Une fois que les Saxons seront entrés dans le défilé, il seront à notre merci.
— Leurs comparses pourront arriver des navires pour leur prêter main forte, objecta Leodagan.
— Où sont les autres passages qui mènent des terres à la crique ?
Le seigneur montra plusieurs endroits sur le plan. Arthur les regarda un long moment, puis souffla :
— Vous mettez les deux bataillons où je le disais tout à l’heure, un troisième ici et un quatrième là. Ainsi, même si les Saxons arrivent en plusieurs vagues, ils se retrouveront toujours pris au piège.
Leodagan sembla réfléchir un long moment en fixant la carte. Puis, il finit par lever les yeux vers les deux hommes et demanda :
— Vous prendriez la tête d’un des bataillons ?
— Oui. De celui qui attendra les Saxons à la sortie du défilé.
— Je dirigerai celui de l’entrée, intervint Lancelot.
— Qu’il en soit ainsi ! Nous mettrons en place votre plan dès ce soir. S’ils sont aussi impatients que je le pense, les Saxons vont se précipiter dès l’aube demain pour tenter d’envahir mon domaine. Que les Dieux soient avec nous…
***
Lorsqu’ils eurent terminé de tout organiser, Lancelot et Arthur se retrouvèrent dans les jardins du château pour discuter à l’abri des oreilles indiscrètes.
— Je ne doute pas de vous, mon ami, commença le brun, mais votre plan est très risqué.
— J’en suis conscient. Pourtant, quelque chose au fond de moi me dis que j’ai raison, que c’est la meilleure tactique pour vaincre les Saxons.
— Je vous fais confiance, sourit Lancelot.
— Merci… j’espère ne pas faire d’erreur.
— Que pensez-vous du Seigneur Leodagan ? demanda soudain le brun, changeant de sujet de conversation.
— Il y a encore quelques mois, j’aurais été effrayé par un tel homme. Votre père et lui sont vraiment amis ?
— Aussi surprenant que cela puisse paraître, oui, ils le sont. Ils ont combattus ensemble de longues années lorsqu’ils avaient nos âges.
Arthur leva les yeux vers le ciel couvert, soupirant :
— J’aurais aimé connaître mon père…
— Je sais.
Le silence s’installa entre eux. Il fut rompu par le bruit d’une porte qui s’ouvrait et des pas légers qui approchaient. Une petite fille blonde, la peau très claire, avec de grands yeux verts s’approchait d’eux, l’air décidé. Elle se planta devant le banc où ils se trouvaient, fixant Lancelot.
— Bonjour. Je m’appelle Guenièvre. Je suis la fille du Seigneur Leodagan.
— Je suis Lancelot, fils de Ban de Benoïc et voici Arthur, fils d’Uther Pendragon.
La fillette tourna la tête vers le blond, l’air surpris.
— Pendragon ? Vous êtes le nouveau Roi ?
— Oui, acquiesça l’intéressé.
— Je suis enchantée de faire votre connaissance, Sire.
Elle lui fit une révérence puis reporta son attention sur Lancelot qui lui sourit.
— Vous allez vous battre contre les Saxons ? demanda t’elle.
— Oui. Et nous espérons bien les vaincre.
— Je vous souhaite bonne chance, Messeigneurs.
Et elle repartit comme elle était venue. Lorsqu’il fut certain que la fillette ne pourrait pas l’entendre, Arthur se tourna vers son ami en souriant :
— Je crois que vous venez de vous trouver une fiancée.
— Ce n’est qu’une enfant, souffla Lancelot en haussant les épaules. Et puis, de toutes façons, mon cœur est déjà empli de vous… il n’y a la place pour personne d’autre.
Arthur vérifia que personne ne pouvait les voir et embrassa tendrement son compagnon.
***
Peu avant l’aube, un éclaireur dissimulé dans les rochers vint avertir Arthur qu’un groupe d’une soixantaine de Saxons s’approchait du défilé. Le jeune homme l’envoya prévenir Lancelot et les autres bataillons. Il jeta un bref coup d’œil aux soldats qui l’accompagnaient et réalisa que c’était la première fois qu’il allait combattre sans que Lancelot soit à ses côtés. Bien sûr, son ami n’était pas loin, mais ça ne serait pas pareil. Il posa la main sur la garde d’Excalibur et se sentit immédiatement rassuré. Une douce chaleur pénétra son bras, remontant dans tout son corps, lui donnant force et courage. Sans savoir pourquoi, il n’avait aucun doute sur l’issue du combat et sur la réussite de son plan. La seule peur qui lui tenaillait le cœur était qu’il arrive malheur à Lancelot.
***
Lorsque le crépuscule arriva, un nombre impressionnant de Saxons étaient tombés sous les coups des Bretons. Quelques-uns des défenseurs avaient été blessés, il y avait également eu quelques tués. Arthur se laissa tomber sur un rocher, essoufflé. Il avait reçu un coup d’épée dans le haut du dos qui le lançait et avait du mal à rester debout. Lancelot le rejoignit, indemne. L’air inquiet, le brun se pencha sur la blessure de son compagnon.
— Ca ne saigne plus. Mais il va falloir nettoyer ça rapidement et y mettre de l’onguent.
— Je ne peux pas partir, les Saxons peuvent encore attaquer.
— Après ce que nous leur avons fait subir aujourd’hui, je pense qu’ils vont y réfléchir à deux fois avant de s’aventurer à terre.
Ils furent rejoints par Leodagan.
— Mes éclaireurs m’informent que les Saxons ont appareillés et quittent la crique. Ils vont sûrement revenir, mais leur départ va me permettre d’installer des défenses sur la grève afin qu’ils ne s’ancrent plus ici.
— C’est une bonne nouvelle ! sourit Arthur.
— Vous devriez rentrer au château, vous soigner et vous reposer. Vous le méritez.
— Merci, Messire.
Lancelot aida son compagnon à se lever et à grimper hors du défilé pierreux.
Une fois au château, les deux hommes allèrent dans les appartements du blond. Celui-ci ôta ses vêtements et se laissa tomber sur son lit à plat ventre. Lancelot nettoya la blessure à l’eau fraîche, puis y appliqua un onguent que lui avait donné Merlin. Arthur se sentait si bien, savourant la caresse des doigts de son compagnon sur sa peau, qu’il s’endormit rapidement.
***
Le lendemain, au déjeuner, Leodagan les informa qu’ils pourraient repartir pour Camelot dès qu’ils le souhaiteraient et les remercia pour leur aide. A la fin du repas, alors que les deux amis allaient préparer leur départ, le maître des lieux se planta devant Arthur et, à la grande surprise de celui-ci, il s’agenouilla devant lui.
— Sire, je vous prête allégeance. Vous avez prouvé que vous êtes un vrai combattant, valeureux, excellent stratège et qui n’hésite pas à risquer sa vie pour aider les autres. Je vous ai vu manier Excalibur. Votre adresse est aussi grande que celle de votre défunt père. Je vous reconnaît donc pour mon Souverain légitime et mets mon épée à votre disposition.
Revenu de son étonnement, Arthur lui sourit :
— Je vous remercie, Messire. Relevez-vous.
— J’ai autre chose à vous dire : je connais beaucoup de seigneurs des environs qui pourraient vous être hostiles. Je vais donc m’employer à les convaincre de la légitimité de votre titre. Et lorsque vous annoncerez votre couronnement, vous pourrez compter sur eux et sur moi pour vous apporter notre soutien.
— C’est un honneur pour moi d’avoir pu combattre à vos côtés, Seigneur Leodagan.
L’homme baissa la tête, puis sourit.
— Sachez que vous serez toujours le bienvenu dans ma demeure. Ainsi que vous, Seigneur Lancelot.
Arthur était heureux. Il venait de trouver un précieux allié. Suivi par son ami, il quitta la salle à manger. Ils croisèrent la jeune Guenièvre qui les salua, son regard clair fixé sur Lancelot, puis allèrent préparer leurs sacs en vue de leur départ imminent pour Camelot.
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A suivre...