Texte écrit en décembre 2009, récemment corrigé et légèrement réécrit.
PG -13 pour le sujet abordé, mais je ne pense pas qu'il y ait besoin de placer derrière le voile.
Suis-je un criminel ?
Je suis là, sur un lit d'hôpital. Dans cet endroit que je hais tant, entouré de ces couleurs trop claires qui me donnent mal aux yeux. Aujourd’hui, j'ai vraiment tout pour le haïr, cet endroit. Tout, oui, vraiment tout. La seule chose que j'aime ici est cette personne qui pleure en me tenant la main. Cette personne qui ne m'a pas quitté depuis que je suis là. Il me parle, il me supplie, et il pleure. Quant à moi, je ne lui réponds pas, je ne lui dis rien. Après tout, comment le pourrais-je ? Je suis endormi, ou dans le coma, ils ne le savent pas encore. J'entends tout, ressens tout comme un être normal, éveillé, mais je suis endormi. Couché, là, sur ce lit blanc, dans cet endroit trop blanc, dans ce lieu que je déteste.
Et pourquoi suis-je là ? D'après certaines personnes, car je suis une erreur de la nature. D'après d'autres parce que je suis un être dégoûtant. Une chose perverse, ne cherchant qu'à pervertir les autres. Mais ceux qui disent ça ne me connaissent pas, et ne savent rien de moi. A vrai dire, ils ne cherchent pas à savoir. Pour eux, je suis cette chose. Cet objet. Cette horreur.
Et pour ça, je vais mourir.
Je m'appelle Vincent, et aujourd'hui est le jour de mes 18 ans. Aujourd'hui, je suis majeur. Et aujourd'hui aurait dû être le plus beau jour de ma vie. Sauf qu’il s’agit désormais du contraire. Ce matin, j'avais avoué mon amour à la personne qui pleure doucement à mon chevet. Et cette personne m'avait rendu cet amour. Je lui avais donné tout ce que j'avais, dont ma virginité. Et si je vais mourir, c'est pour cela. Parce que notre amour est interdit. Parce qu'il est mal vu des autres, parce que le monde n'accepte pas.
Cette après-midi, j'ai été agressé à cause de mon amour, et personne n'a cherché à m'aider. Pourtant, je n'étais pas dans une petite ruelle où personne ne passe, j'étais dans un endroit très fréquenté. Les passants m'ont tout simplement évité, ignoré. Ils étaient passés à côté de moi comme si j'étais un objet infâme, repoussant. Comme si je ne méritais pas de vivre.
Mais tout être a le droit de vivre, qu'importe envers qui son amour est dirigé, non ? Apparemment, cet avis ne fait pas l’unanimité. Et c'est précisément ce changement de jugement qui me tue petit-à-petit.
J’écoute les sanglots de mon veilleur. Je sais que s’il n’avait pas été présent, la Faucheuse aurait déjà emporté mon corps. Mort dans la rue, ignoré de tous mais encerclé par la foule. Savoir que les gens peuvent faire preuve d'une telle insensibilité me fait peur. Dans quel monde vivons-nous pour laisser passer de telles choses ?
Mais je ne veux pas mourir. Pas aujourd'hui, pas maintenant. Je veux vivre, pour lui. Pour lui, uniquement pour lui. Malheureusement je ne peux pas. Plus. Je n'ai plus la force, en cette fin de journée. Je suis fatigué. Je sens mon souffle diminuer, et je me vois m'endormir de plus en plus profondément. Je me sens mourir.
Je suis désolé.
Je suis désolé de te faire autant de mal.
J'aurais tellement aimé que nous puissions nous aimer encore et encore, jusqu'à ce que nous soyons vieux et ridés. Jusqu'à ce que la vieillesse se soit montrée sur nos visages.
Mais désormais nous ne pouvons plus.
Nous n'aurons pu nous aimer qu'un seul et vulgaire jour. Une seule journée m'ayant pourtant rendu heureux. Sans doute la plus belle de ma vie.
Mais maintenant je meurs, inévitablement.
Mon crime ?
T'avoir aimé. Toi, mon ancienne idole.
T'avoir aimé. Toi, qui étais mon meilleur ami.