C'est la 1ère fois que je me lance dans une histoire originale... Je sais pas si c bien ds l'esprit du forum, mais il y a du slash partout dc j'espère quand même que ça va plaire à 1 ou 2...
J'invente tout un univers, donc si ça en intéresse certains, J'ai une tonne d'idées pour continuer, et j'essayerais de fr des mises à jour assez régulières.
Le slash fait partie intégrante de l'histoire, mais c'est surtout le scénario qui reste primordial. (même si bien sûr les histoires de coeur des personnages vont jouer un rôle extrèmement important
). Et puis j'adore la magie, alors les histoires de sorts et les explications techniques risquent d'être assez fréquentes aussi... ^^'
Donc dites moi ce que vs en pensez, et si vs seriez intéressés pr connaître la suite... ^^
Je suis assez content de ce 1er épisode, mais je me suis retrouvé un peu dépassé par 2 trucs : la description de l'univers petit bourgeois du XVIIIe à la fin, avec domestiques et compagnie ^^' ... et surtout la manière dont je me suis trouvé décrire les prêtres... Bien sûr ils sont...comme ils sont ds cette histoire...
mais on peut faire qqes parallèles avec la religion chrétienne dc sachez que j'y ai pas dutout pensé de manière volontaire, ça s'est retrouvé comme ça sur le moment ^^'' (même si j'apprécie pas particulièrement les religions en général mais bon...)
Et puis j'ai aucune imagination pr les noms propres, dc ts les noms utilisés proviennent soit de tolkien soit d'un jeu vidéo... (mais pas d'aragorn ni de frodon, vs inquiétez pas ^^'' lol)
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Le comte Indoril Nérévar parcourait les longs couloirs du château avec anxiété. La guerre allait commencer, disait-on. On racontait que des villages de paysans en bordure du royaume s’étaient déjà faits attaqués par des groupes d’orcs, sortis d’on ne sait où. Une convocation officielle du Roi Neldoreth IV ne venait que confirmer les rumeurs d’une période de conflit imminente. Indoril arriva à la grande porte richement décorée de la salle du trône, gardée par deux hallebardiers en armure étincelante, immobiles, une expression sérieuse et arrogante sur leurs visages. « Très prestigieux comme position, garde de la salle du trône… Mais ces deux-là ont-ils la moindre idée de ce qu’est la guerre ? » se demanda Indoril avec une pointe de mépris. Les gardes se murent de concert, et ouvrirent chacun un battant de la porte. l’un d’eux cria pour couvrir le brouhaha :
- Indoril Nérévar, comte de Dren, affilié à l’Ordre des Guerriers.
Indoril marcha d’un pas lent et digne, d’une allure toute protocolaire, le long du tapis menant au trône sur lequel siégeait le Roi. Il remarqua que d’importantes personnalités avaient été conviées, parmi lesquels les Hauts Prêtres Nevrast et Haleth, dans leur robe blanche immaculée. Les Hauts Prêtres, au nombre de quatre, dirigeaient l’Ordre des Prêtres et avaient acquis énormément de pouvoir et de considération auprès du Roi depuis quelques années. Beaucoup commençaient d’ailleurs à s’en méfier. Indoril constata également la présence d’autres nobles de rang plus ou moins égal au sien, comme Brandir, un autre membre de l’Ordre des Guerriers, et bien sûr Helseth, de l’Ordre des Mages, qui était également conseiller personnel du Roi. Helseth lui fit un clin d’œil discret, un sourire charmeur aux lèvres, mais Indoril resta impassible.
Le duc de Dren s’agenouilla et présenta ses respects à son Roi, Neldoreth IV.
- Relevez-vous, maître Nérévar, ordonna le Roi. Nous n’avons guère de temps à perdre en vaines courbettes protocolaires. Prenez un siège, je vous prie.
Indoril alla s’asseoir sur l’une des chaises installées de part et d’autre du tapis, près du trône.
- Maître Nérévar, je dois dire que je suis très ennuyé que le maître de votre ordre n’ait pas répondu à mon appel, tant nous aurions eu besoin de ses conseils avisés…
- Nous pourrons nous passer de lui, coupa froidement Nevrast.
- Oui… soit.
La situation politique était très tendue au sein du royaume de Neldor. L’autorité du Roi avait commencé à décliner sous le règne de Neldoreth III, et lorsque Neldoreth IV hérita de la couronne, il se retrouva vite enlisé dans cette sorte de cohabitation. Dans les faits, le Roi, qui était également par tradition grand maître de l’Ordre des Mages, partageait le pouvoir avec l’Ordre des Prêtres, avec à sa tête les quatre Hauts Prêtres, et l’Ordre des guerriers, dirigé par l’elfe Fëanor. Ces trois ordres étaient des sortes d’académies militaires. Les personnalités de haut rang devaient s’affilier à l’une ou l’autre de ces trois maisons pour, à la base, y apprendre le maniement des armes, des sorts, et les techniques de commandement et de stratégie militaire. Mais l’entrée dans l’une de ces trois maisons garantissait également de grandes perspectives d’avenir au niveau politique.
- Bien, poursuivit Nevrast. Comme vous le savez sans doute, certaines contrées en bordure du royaume ont vu l’arrivée de groupes d’orcs, qui n’ont pas hésités à piller et massacrer des villages entiers…
La manière dont le Haut Prêtre dirigeait le débat parut extrêmement insultante à Indoril vis-à-vis du Roi. Mais celui-ci ne disait rien… Pourquoi était-il aussi effacé ? Que se passait-il réellement à la cour ? Indoril avait hâte que cette réunion soit terminée pour pouvoir retrouver Helseth. Lui savait tout ce qui se tramait dans les couloirs les plus sombres du château. Il tourna la tête dans sa direction. Son ami était assis de l’autre côté du tapis, près du Souverain. Indoril remarqua qu’il portait la tunique brodée qu’il lui avait fait confectionner spécialement, en cadeau lors de son dernier passage à la capitale. Helseth était accoudé à sa chaise, son poing venant soutenir son visage aux traits fermés. Il n’écoutait Nevrast que d’un air distrait et avait l’air assez préoccupé. Helseth finit par lever les yeux. Il vit qu’Indoril l’observait et lui adressa un sourire.
- Savons-nous qui envoie ces orcs ? demanda Brandir.
- Bien sûr ! s’exclama un seigneur mage. Je me suis moi-même fait attaquer, et mes terres sont situées juste à la frontière du royaume de Fornor. Ce sont eux qui les ont envoyés. Ils préparent un mauvais coup, c’est sûr. Et tout le monde sait que leur Roi élève des orcs dans sa forteresse de Bélorith !
- Calmez-vous, je vous prie… tempéra Haleth, le deuxième Haut Prêtre qui n’avait jusque-là pas laissé entendre sa voix spéciale, grave et rauque. Cela ne peut-être qu’un coup monté... Fornor n’a aucune raison de nous attaquer... Non,… pas Fornor… Je pencherais plutôt pour le royaume de Nethrim… Nous avons déjà été en guerre contre lui par le passé... Il doit certainement leur rester quelques rancunes… Il doit nous envoyer ces orcs pour tester notre réaction…
Neldoreth IV s’indigna contre ces dernières paroles.
- Nethrim ? Mais ce sont nos plus fidèles alliés… Nos royaumes ont été en guerre, c’est vrai, mais cela fait presque un siècle ! Tout est oublié depuis longtemps !
- Il est cependant nécessaire de considérer la question, dit Nevrast d’un ton posé. Et vous, mon seigneur, dit-il en s’adressant à un noble inconnu d’Indoril, mais qui portait l’insigne blanc des prêtres sur son habit : un cercle barré d’un trait vertical. Vos terres sont situées en bordure du royaume de Nethrim, n’est-ce pas ? N’avez-vous rien vu ?
- Euh…. Il est vrai que… On m’a rapporté que des paysans avaient vu certains orcs rôder… hasarda le noble d’un ton hésitant.
- Vous voyez, votre Majesté, dit Nevrast, satisfait. Votre confiance envers Nethrim vous aveugle.
Mais quel était donc ce simulacre de discussion ? se demanda Indoril. L’attitude des Hauts Prêtres envers le Roi était impardonnable. Il prit la parole.
- Votre Majesté, qu’attendez vous des vassaux que vous avez conviés aujourd’hui ?
- Nous n’avons pas identifié nos ennemis avec certitude, mais je vais faire en sorte de clarifier la situation rapidement. Il est cependant sûr que les temps de paix sont révolus et que des heures bien sombres sont devant nous. C’est pourquoi je vous demande à tous, membres des trois grands Ordres, de respecter votre serment d’allégeance à la couronne que j’ai l’honneur de porter. Que tous les seigneurs ici présents lèvent une armée dans leur contrée, prête à se battre sous la bannière du royaume de Neldor.
Neldoreth IV s’était levé et avait prononcé ces phrases solennelles avec toute la grandeur que lui conférait son statut, la couronne d’or sertie de rubis qu’il portait et son Bâton Écarlate de grand maître de l’Ordre des Mages posé sur un présentoir à quelques pas de lui. Mais cela restait bien vain. Personne dans la salle n’était dupe de cette autorité moribonde...
][
Plus tard dans l’après-midi, Indoril était de nouveau dans la chambre d’invités dans laquelle on l’avait installé. Il terminait le compte-rendu de l’assemblée que lui avait demandé de lui faire parvenir Fëanor. Il aurait dû être là pour voir ça par lui-même, pensa Indoril. Pour constater à quel point la situation était grave, beaucoup plus sur le plan interne qu’à propos des affaires extérieures. Il plia le papier et le glissa dans une enveloppe qu’il cacheta. Il s’apprêtait à partir, l’enveloppe à la main, lorsqu’il se ravisa. Non, se dit-il avec un sourire. Il ne pouvait pas attendre cinq minutes de plus. Indoril reposa la lettre sur son bureau et quitta sa chambre. Au détour d’un couloir, il croisa Haleth. Il se courba respectueusement, mais le Haut Prêtre ne lui adressa pas le moindre regard. Indoril se retourna et le regarda s’éloigner avec interrogation. Cependant, cette mystérieuse rencontre n’allait pas le détourner de son objectif. Quelques minutes plus tard, il frappait à la porte de la chambre du conseiller du Roi.
- Indoril ! s’exclama Helseth après avoir ouvert la porte.
- Ça fait des heures que j’attends de pouvoir te voir en privé…
Helseth referma la porte derrière son ami avant de lui sauter au cou. Indoril resserra ses bras autour de l’être qu’il aimait.
- Et moi ça fait des mois…
Alors qu’Helseth disait ces mots, Indoril remarqua que son sourire s’était légèrement estompé. Il était vrai qu’ils n’avaient pas beaucoup d’occasions de se voir, l’un à Nelda, la capitale de Neldor, et l’autre dans le lointain comté de Dren, fief de l’Ordre des Guerriers.
- Excuse moi… je devrais venir plus souvent. Toi aussi tu m’as vraiment manqué tu sais…
Indoril scruta en détail son ami, comme pour réimprimer dans sa mémoire chacun des traits de son visage, traits qu’il n’était pourtant pas prêt d’oublier, tant il y pensait et repensait sans cesse, chaque jour passé loin de lui. Helseth avait le visage fin et ses cheveux bruns bouclés lui donnaient une apparence légèrement juvénile. Mais ses yeux dégageaient quelque chose… Son regard était d’une profonde intensité, et, en insistant plus longuement, on pouvait voir comme un reflet dans ses yeux, l’étrange lueur indéfinissable caractéristique de ceux possédant une haute maîtrise de la magie. Indoril baissa les yeux et remarqua avec humour :
- Mais dis moi… tu portes une bien jolie tunique.
- Mmm… oui… cadeau d’un ancien amant…
- Ah oui… ancien, n’est-ce pas ?
Indoril attira Helseth contre lui et le regarda dans les yeux pendant quelques secondes, ces yeux si pénétrants, avant de poser ses lèvres contre les siennes. Leur baiser resta longtemps plus tendre que passionné, jusqu’à ce que les caresses d’Indoril se fissent plus pressantes et plus aventureuses.
- Helseth… tu m’as vraiment manqué, dit Indoril dans un soupir.
- Tant que ça ? demanda son amant sur un ton amusé. N’y a-t-il donc pas de beaux garçons dans le comté de Dren prêt à satisfaire les désirs de leur comte ?
- Si, mais… c’est tellement différent…
Indoril n’était cependant plus à la conversation. Il libéra un a un chaque bouton de la riche tunique sur laquelle était discrètement brodée la petite flamme rouge, symbole de l’Ordre des Mages, et y glissa ses deux mains pour caresser son torse finement musclé, détail qui n’était pas désagréable, surtout chez un mage, pensa Indoril avec amusement. Helseth lui enleva à son tour son vêtement pour révéler un corps aux reliefs beaucoup plus saillants, venant attester des nombreuses heures d’entraînement aux armes, avec en prime une belle zone de poils s’étendant entre les deux tétons, et une autre sur le ventre.
Helseth s’attaquait maintenant au pantalon tout en l’attirant vers son lit.
- C’est pareil pour moi. Personne ne peut te remplacer…
][
Le calme était revenu dans la chambre du conseiller du Roi ; Indoril allongé sur le dos et Helseth tout contre lui, la tête posée sur sa poitrine. Tous deux savouraient l’instant de quiétude de l’après, qui leur paraissait au moins tout aussi bon que ceux venant de s’écouler. Les pensées négatives reprenaient cependant peu à peu leur ronde dans l’esprit d’Indoril, qui rompit le premier ce silence apaisant.
- Helseth…
- Mmm… ?
- Qu’est-ce qui se passe ici, en ce moment ? La réunion de tout à l’heure était vraiment…
- Oui, je sais, coupa le jeune mage avec amertume. C’est comme ça depuis plusieurs mois. C’est maintenant l’Ordre des prêtres qui détient les rênes du royaume. Et ils ne cherchent même plus à s’en cacher… Nevrast, Haleth, Elgath et Meandros font ce que bon leur semble et donnent des ordres à tout le monde au château, y compris à leur propre Roi.
- Et le Roi accepte cette situation ? Mais comment a-t-on pu en arriver là ?
- Et bien… c’est assez délicat.
- Comment ça ?
- Neldoreth n’ose pas leur barrer la route. Il ne peut pas… il ne peut rien faire.
- Mais pourquoi ??
- Je ne sais pas si je devrais en parler… Un conseiller du Roi doit savoir garder certaines choses secrètes... tu comprends ?
Indoril resta silencieux un moment avant de répondre :
- Je ne sais pas où va mener cette situation, mais ça ne laisse présager rien de bon, surtout avec ces attaques vers nos frontières…
- Oui, tu as raison, mais… C’est difficile de faire quoi que ce soit, parce que…
Helseth s’interrompit un instant pour bien réfléchir à chacun des mots qu’il allait prononcer :
- En fait… l’Ordre des Prêtres a acquis un moyen de pression contre lequel le Roi ne peut rien… Une sorte d’arme… très dangereuse. Plus dangereuse que tout ce qu’on peut imaginer.
- Une arme ?
- Non... Désolé, je ne peux rien dire de plus. Même si… peut-être qu’il serait bon qu’une personne extérieure à la cour sache… Je ne sais pas…
Un long silence vint ponctuer la discussion, puis Helseth reprit :
- Indoril… pourquoi t’es-tu lié à l’Ordre des Guerriers ?
- Ma famille est affiliée à cette Maison depuis des générations. Déjà, par tradition, je n’avais pas vraiment le choix en quelque sorte… Mais au delà de ça, j’aime l’idéal des guerriers. Et puis la magie ne m’a jamais intéressé. On doit compter sur les éléments, les forces invisibles… C’est trop compliqué pour moi. Et trop… instable. Que se soit la magie élémentaire, ou, surtout, la magie mystique des prêtres. Quand tu es guerrier, tu peux ne compter que sur toi-même. Je sais de quoi je suis capable. Je connais réellement ma force, et elle ne m’abandonnera jamais.
Helseth acquiesça. Sans, bien sûr, partager son opinion, il le comprenait tout à fait. Il ferma les yeux et rapprocha son corps de celui d’Indoril. Il se laissa alors bercer par l’aura de son ami que ses capacités lui permettaient de ressentir, cette aura d’une très grande intensité, et qui pourtant dégageait une sérénité immense, ce qu’il n’avait jamais ressenti chez personne d’autre. Bien sûr qu’Indoril était un guerrier. Jamais il n’aurait pu en être autrement.
- Mais toi, ton truc c’est quand même la magie, hein ? remarqua Indoril avec un ton gentiment provocateur, en passant une main caressante sur le dos de son ami. C’est quoi déjà ta spécialité ?
- Je suis maître de la sphère du feu, déclara Helseth avec fierté. La même spécialité que le Roi, précisa-t-il Même si bien sûr, je ne lui arrive pas à la cheville…
Indoril sourit. Le choix de cette compétence n’était certainement pas dû au hasard. Indoril connaissait l’ambition de son ami. Après tout, il ne fallait pas s’étonner si, à seulement 27 ans, il avait été propulsé au poste de conseiller du Roi…
Helseth se redressa en s’étirant.
- Excuse moi, mais j’ai encore beaucoup de travail cet après midi. Le Roi doit déjà m’attendre…
- D’accord… dit Indoril avec déception.
- On pourrait sortir en ville ce soir… J’aimerais bien te faire visiter quelques quartiers mal famés de la capitale, dit-il avec un sourire jusqu’aux oreilles.
- Mmm… Pas mal comme programme, dit le guerrier en plissant les yeux.
][
Vers dix heures du soir, Indoril était à la fontaine du parvis du château. D’ici, il surplombait la ville et avait pu voir les lampadaires qu’on allumait, un à un, au milieu de l’étendue de maisons. C’était l’été et la nuit n’était tombée que depuis une heure. La température élevée n’avait diminué que de quelques degrés depuis l’après midi, et le comte de Dren se disait que décidément, il se verrait bien vivre ici, à écouler des jours paisibles aux côtés d’Helseth, au lieu de se contenter des rares occasions qui le faisaient se rendre à la capitale. Il savait pourtant que cela était impossible : il devait administrer son domaine. De plus, Indoril était le héraut de Fëanor, le maître de l’Ordre des Guerriers, dont le quartier général était la forteresse de Molag Tir, également située dans le comté de Dren. Il devait toujours rester près de son supérieur pour recevoir ses ordres. Indoril scrutait les minuscules silhouettes des gardes faisant leur ronde sur le mur d’enceinte de la ville, lorsque Helseth arriva.
- Désolé du retard… Les affaires du royaume, tu sais bien… on en a jamais fini.
- C’est pas grave, répondit Indoril, trop content de revoir son ami. Alors… où allons-nous ?
Indoril se laissa guider à travers les ruelles de la ville. La vie nocturne se dévoilait peu à peu : une musique diffuse s’échappait d’une taverne, un homme saoul invectivait un couple bourgeois outré, et, dans les recoins sombres, protégées du regard inquisiteur des gardes, les ombres s’adonnaient à toutes sortes de commerces fort peu licites.
- Entrons là-dedans, proposa Helseth à l’abord d’un établissement dont l’enseigne, « À la Dame Galante », était bien le seul aspect qui tentait de rendre le lieu plus ou moins accueillant.
Helseth et Indoril s’installèrent à une table.
- Tavernier ! cria Helseth. Deux pintes de ton meilleur cidre.
- Tout de suite, grogna le gros bonhomme derrière son bar.
- Mmm… Intéressant comme endroit, remarqua Indoril avec amusement. Un peu dans le même style que celui de la dernière fois…
Le soir venu, la grande distraction de Helseth était d’enfiler ses plus vilains habits pour aller se mêler à la populace la moins fréquentable de la ville, s’accoquiner avec quelques canailles, voire même tremper légèrement dans certains petits trafics… Il s’était d’ailleurs bâti une solide notoriété, parmi ces gens qui restaient pourtant bien loin d’imaginer qu’il était en fait noble de l’Ordre des Mages, qui plus est conseiller personnel du Roi.
- Bien sûr, répondit son ami. C’est dans ce genre d’endroits qu’il se passe les choses les plus intéressantes. Et puis… pour la plupart gens, c’est ça la vraie vie. Ça remet les idées en place de voir ce qui se passe en dehors du château, dit-il discrètement. Tiens ! Ça ferait du bien à Nevrast, vivre dans la vieille ville pendant toute une semaine !! Ajouta t-il plus haut avant d’éclater de rire.
Un homme barbu, aux vêtements sals et odorants et à la dentition qui puisait dans une palette de couleurs allant du jaune au noir s’approcha.
- Ah ça, pour sûr, on lui en ferait voir de belles, nous autres !
- Hé ! Athris ! Comment ça va ?
- Oh, ça… je m’en sors, je m’en sors… Et lui, qui c’est ? demanda l’homme en parlant d’Indoril. Je l’ai jamais vu dans le coin…
- Indoril, enchanté. Je suis… commerçant. De passage en ville…
- Mais… c’est qu’il a des manières ton ami dis donc ! Et… commerçant dans quoi, si je peux me permettre ?
- C’est pas du tout ton secteur Athris, t’inquiète pas ! coupa Helseth avec un rire qui dissipa toute curiosité mal placée.
- Très bien. C’est tout ce qui m’importe. Et bien, Monsieur Indoril, bienvenue à Nelda !
On leur apporta leurs consommations et ils discutèrent quelques temps, parlant des rumeurs et des nouvelles de la rue, jusqu’à ce qu’un mystérieux individu vienne les interrompre.
- Excusez-moi messieurs… C’est bien vous qui parliez du Haut Prêtre Nevrast, tout à l’heure ?
- Mmm… possible, marmonna Athris dans sa barbe sans lever la tête pour identifier l’inconnu.
- Qu’avez-vous dit exactement ?
Les groupes autour de la table de Helseth, Athris et Indoril avaient baissés d’un ton. Cette fois-ci, Athris se redressa pour regarder son interlocuteur dans les yeux avec un air ostensiblement provocateur. Il parla en détachant bien chacun de ses mots.
- On a dit que si Nevrast ramenait son petit cul béni par ici, il serait sans doute plus au courant des problèmes du royaume, et la propagande qu’il fait distribuer dans toute la ville se retrouverait moins souvent dans les fosses à purin.
Toute l’assemblée s’était tue. L’individu empoigna son épée.
- Comment osez vous parler d’un Haut Prêtre de la sorte ? Vous allez payer ça !
Le propriétaire du lieu tenta de s’interposer.
- Oh la ! Pas de politique dans mon établissement ! Rengainez-moi cette épée !
Cela ne suffisait cependant pas à calmer les ardeurs partisanes du jeune homme. Un petit groupe de cinq personnes se détacha de la foule pour venir aux côtés du fanatique qui déclara :
- La dictature de l’Ordre des Mages doit cesser ! Il est temps que cette cité et ce royaume acceptent la voie montrée par l’Ordre des Prêtres. Les insultes ne resteront pas impunies !
Les trois compagnons s’étaient levés pour faire face aux perturbateurs. Indoril évalua rapidement la situation. Les fauteurs de trouble voulaient-ils réellement embrocher le malheureux Athris, ou était-ce de la provocation ? Helseth pourrait se débarrasser d’eux en un clin d’œil, mais une démonstration magique casserait l’image de roublard des bas-fonds qu’il s’était créé… Non, Helseth ne ferait rien. Lui peut être ? Indoril n’était pas armé mais ces quelques vauriens n’avaient pas l’air extrêmement dangereux… C’est alors qu’une autre personne se détacha de la foule.
- Les pantins du temple ne sont pas les bienvenus. Allez colporter vos sales idées ailleurs. Ici, personne ne veut les écouter…
Le fauteur de trouble et ses compagnons se rendirent alors compte que l’assemblée qui les entourait n’était pas réellement passive, comme ils l’espéraient sans doute, et même plutôt hostile à leur égard. Ils se dirigèrent prudemment vers la porte
- Je vois… Ainsi, cette taverne s’oppose ouvertement aux prêtres. Vous verrez, les choses vont changer. Bientôt, tout le monde reconnaîtra la seule et unique voie à suivre. Et à ce moment là, vous aurez intérêt à avoir changé d’avis…
- Très bien, dit Helseth. Maintenant partez avant que les gardes arrivent. Ils seraient sans doute très intéressés par votre point de vue.
][
Plus tard, les deux nobles étaient de retour au château du Roi Neldoreth IV, dans la chambre d’Helseth.
- Excuse-moi pour la soirée. Je pensais pas qu’on allait tomber sur ces fanatiques de l’Ordre des Prêtres…
- Oh… C’était plutôt distrayant finalement, répondit Indoril pour remonter le moral de son ami, bien que lui-même ne fût qu’à moitié convaincu par ces paroles.
- Les conflits de la salle du trône se propagent jusque dans les ruelles de la vieille ville… Les prêtres distribuent au peuple une sorte de manuel qui leur explique les règles de conduite de l’Ordre des Prêtres et leurs pseudo idéaux de justice… Les quelques gens du peuple qui savent lire racontent ensuite toutes ces bêtises aux autres et réussissent à convaincre de plus en plus de monde... Indoril, la situation est vraiment grave ici… J’ai… j’ai peur pour le Roi. Et... peur pour l’avenir…
- Demain matin, je retourne à Dren. Je parlerai de tout ça à Fëanor. L’Ordre des Guerriers s’est toujours tenu à l’écart de la politique, mais cette fois-ci, nous devons faire quelque chose.
Helseth hocha la tête en silence.
- Je… peux dormir ici ? demanda Indoril sur un ton faussement timide qui fit sourire son compagnon.
- L’intendant du château t’a officiellement assigné l’une des plus belles chambres réservées aux invités. Et tu préfères quand même rester là ?
- Oui… Disons que c’est plus… convivial.
- Mmm… convivial hein… ?
Helseth s’approcha de son guerrier et le prit dans ses bras.
- Convivial. Et même… chaleureux.
Le sourire de Helseth disparut et il regarda Indoril d’une manière étrange.
- Indoril… Je suis… content de t’avoir. Des fois, j’ai l’impression que… Tu es le seul en qui je puisse avoir confiance… Et que tu es mon seul ami.
Indoril déglutit une fois avant de déclarer avec gravité :
- Tu pourras toujours compter sur moi, Helseth. Quoi qu’il arrive. Je t’en fais la promesse.
Helseth scruta longuement le regard de son ami dans l’espoir de pouvoir sonder son âme. Bien sûr qu’il était sincère. Mais… pourrait-il réellement tenir ce serment au vu des évènements qui s’annonçaient ? Le jeune mage finit par lâcher Indoril, et commença à se déshabiller. Celui-ci fit de même et ils se couchèrent en silence. Une sorte de tension était présente dans l’air. Chacun se coucha d’un côté du lit, le dos tourné dans la direction de l’autre. Indoril ferma les yeux. Puis Helseth se retourna soudainement.
- Indoril !
Le guerrier se redressa pour faire face à son ami.
- Tu dois savoir. Et… Fëanor aussi. Tu devras lui dire.
Indoril hocha la tête. Il allait enfin connaître le fond du problème.
- Les Hauts Prêtres ont mis la main sur des écrits très anciens dans des ruines d’une vieille place forte, dans un de leur fief, au nord du royaume. Il s’agit d’un rituel… Pour déclencher un sort mystique… très puissant. Un sort d’invocation…
- Et… pour invoquer quoi ?
- Le texte parle d’un archange.
Indoril fronça les sourcils.
- Un archange ? Mais… comment ça ? Et de toute façon, le Roi aussi est un grand invocateur. Son bâton appelle le Dragon Écarlate, aussi fort qu’une armée entière… tu le sais mieux que moi, non ?
- Un archange est un des êtres ayant participé à la création du monde. Ses pouvoirs seraient infinis… Et il serait sous le commandement de toute personne ayant participé au rituel…
- Mais c’est… c’est impossible ! Ce genre de créature n’existe que dans les mythes ! Ça ne peut pas être vrai… C’est du bluff. L’Ordre des Prêtre utilise ce mensonge pour intimider le Roi.
- Le Roi lui-même a vu le texte en question. Il est sûr qu’il est parfaitement authentique.
- Ah… Et si… quelqu’un d’autre pouvait accomplir le rituel avant les Hauts Prêtres… ?
- Il faut forcément une maîtrise immense de la magie mystique pour pouvoir lancer un tel sort. Personne d’autre sur Neldor, et sans doute personne d’autre dans le monde n’aurait la possibilité d’accomplir une telle chose, à part Nevrast, Haleth, Elgath et Meandros…
- Et ils comptent réellement le faire ?
- Je ne sais pas… Pour l’instant ils s’en servent comme moyen de pression sur le Roi. Ils peuvent faire tout ce qu’ils veulent, et si Neldoreth les contrarie, rien ne les empêchera de faire sécession avec le royaume, pour ensuite déclarer la guerre à Neldor. Le Roi et son Dragon Écarlate feraient alors bien pâle figure…
Un long silence passa. Indoril se recoucha.
- J’en parlerai à Fëanor. Il est très sage et il trouvera certainement une solution.
- Mais tu ne comprends pas ! Il n’y a aucun espoir. Rien ne pourra arrêter les prêtres !
- Tu entends ce que tu dis ? Il y a toujours un espoir. Dors, maintenant.
Sans un mot, Helseth s’étendit à côté de son compagnon et ferma les yeux. Le sommeil se fit attendre un long moment avant que ses pensées angoissées ne se muent peu à peu en d’inquiétants cauchemars…
][
Indoril et Helseth étaient aux écuries du château. Les affaires d’Indoril étaient chargées dans la voiture, les chevaux et le cocher étaient prêts. Helseth regardait son ami sur le point de partir avec un pincement au cœur.
- Et bien… Bon voyage…
- Merci…
L’idée de passer encore de longs mois sans se voir et les problèmes actuels du royaume rendaient ces adieux particulièrement difficiles, même si aucun des deux ne le laissait paraître d’une manière directe. De toute façon, une embrassade passionnée et de vives effusions auraient parues un peu trop déroutantes pour les nombreuses personnes présentes sur les lieux.
- Tu feras attention à toi, hein… ? poursuivit Indoril.
Il serra ses lèvres et envoya un regard empli de souffrance à Helseth, un peu comme un appel à l’aide. Mais celui-ci ne pourrait rien faire. Il ne pouvait pas faire en sorte qu’il reste au château, il ne pouvait pas venir avec lui, il ne pouvait pas l’aider à lui communiquer tout ce qu’il aurait voulu lui dire en cet instant.
- Oui… toi aussi, fait attention.
Ils ne pouvaient pas utiliser les mots : les gens entendraient et la rumeur se répandrait bien vite. Et quand bien même, Helseth n’était pas sûr de pouvoir trouver les mots justes. Mais, se dit-il, au-delà même des mots, il leur restait encore ce dernier moyen de communication : le regard. Et, en fin de compte, cela suffisait pour se comprendre.
- Bon… Je dois y aller… finit par trancher Indoril.
-Mmm… au revoir, termina Helseth en fixant ces lèvres qu’il ne pouvait pas embrasser.
Indoril monta et ferma la porte de la voiture. Le cocher démarra. Helseth suivit le convoi jusqu’au dehors, dans le matin encore assez frais. Il regarda la voiture s’éloigner, jusqu’à la voir disparaître alors qu’elle tournait à l’angle du chemin, après avoir dévalé la colline du château. Puis il resta là quelques instants encore.
][
Le lendemain soir, après deux journées de route, Indoril était de retour à Amras, petite ville au milieu de la campagne qui restait cependant la plus peuplée du comté de Dren. Le convoi traversa la ville et se dirigea du côté de la demeure familiale des Nérévar. Un domestique vint à sa rencontre et ouvrit la porte de la voiture
- Bonsoir, maître. Avez-vous fait bon voyage ?
- Oui… répondit laconiquement le comte.
Le cocher se dirigea vers les écuries
- Madame votre mère et mademoiselle votre sœur ont dîné, et sont même déjà couchées, mais je peux demander au cuisinier de vous préparer quelque chose… Vous devez être épuisé.
- Très bien, merci. Pourriez-vous ensuite aller aux écuries aider le cocher à monter mes bagages ? Et dites à Helkar que Tonnerre devra être prêt demain à l’aube. J’aurai à faire à Molag Tir, et je veux mon meilleur cheval.
Indoril pénétra ensuite dans la grande bâtisse et monta en direction de sa chambre. Il croisa un autre domestique à qui il demanda :
- Pouvez-vous appeler Landras pour moi, s’il vous plaît ? Je suis dans ma chambre.
Quelques minutes plus tard, le maître d’armes entrait dans la chambre du comte.
- Bonsoir Indoril. Votre voyage s’est bien passé ? Comment était la capitale ?
- Mmm… la situation est… assez préoccupante. Le Roi a demandé à tous ses vassaux de préparer une armée. Je te laisse t’en charger… ?
- J’annoncerais l’avis de conscription demain matin.
- Très bien, merci.
Indoril continuait à ranger ses affaires qu’on lui avait montées, et ne se préoccupait plus de Landras. Celui-ci restait pourtant là, immobile, devant la porte. Il finit par se décider à demander :
- Vous… hum… Vous avez revu Monseigneur Helseth, le conseiller du Roi ?
Indoril arrêta ses occupations et se tourna vers Landras. Il lui répondit d’un ton assez froid, presque cassant :
- Bien sûr que oui.
Landras hocha la tête et se retourna pour quitter la pièce. Alors qu’il avait ouvert la porte, il se retourna une nouvelle fois et hasarda :
- Désirez-vous que je vous rejoigne… un peu plus tard ?
Indoril qui était retourné à ses activités de rangement ne lui jeta cette fois-ci qu’un rapide coup d’œil, puis lui dit d’un ton égal :
- Non… Je vais simplement manger, et dormir. Je me lève tôt demain.
- Très bien.
Le maître d’armes quitta la pièce. Il refermait la porte derrière lui quand Indoril l’interrompit :
- Landras !
- Oui ?
- Excuse-moi… Je suis très fatigué.
- Je comprends.
Quelques minutes plus tard, Indoril, affamé, descendait à la cuisine.