Je constate que certain(e)s ont vu où je voulais en venir, et j'espère que la suite ne vous décevra pas!
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Chapitre 6Il s'arrêta à la barrière et donna son nom au garde. Celui-ci consulta sa fiche, puis secoua la tête.
-Désolé, lieutenant Williams, mais je ne peux pas vous laisser entrer.
-Vous vous foutez de moi? On m'a dit de venir ici! Je veux parler au... argh, comment s'appelle-t-il déjà... au Capitaine Fremont.
-Un instant, je vous prie.
Le garde rentra dans son poste et décrocha un téléphone. Il parla un moment, écouta attentivement la réponse, puis raccrocha.
-Très bien, lieutenant. Vous allez tout droit, et vous tournez ensuite à la deuxième à gauche. Hangar n°94. Le Capitaine Fremont vous y attend.
Danny remercia du bout des lèvres et démarra dans une odeur de caoutchouc brulé.
Il suivit les indications qu'on lui avait donné, trouva sans problème le hangar 94 et se gara devant. Aussitôt, une petite porte en fer s'ouvrit sur le coté et un militaire vint à sa rencontre.
-Ravi de vous revoir, lieutenant Williams, dit le capitaine Fremont.
-Assez de politesse, capitaine! Expliquez-moi ce qui se passe ici.
-Comme je vous l'ai dit, je ne suis pas autoriser à vous communiquer cette information...
Danny ouvrit la bouche, mais le capitaine leva la main pour l'arrêter.
-... mais le Contre-amiral Perkins vous attend. Il vous dira tout ce qu'il pourra.
Danny enfonça ses mains dans ses poches pour se retenir de mettre une droite à ce satané militaire, puis le suivit à l'intérieur.
Il cligna un peu des yeux. Il s'attendait à ce que l'entrepôt soit sombre, mais il y faisait aussi clair que dehors. Il suivit le capitaine Fremont pendant un moment, à travers des couloirs et des escaliers, et il prit conscience qu'ils descendaient. Et l'entrepôt ressemblait de moins en moins à un entrepôt. Les murs devenaient plus blancs, les lumières étaient encore plus vives. Ils croisèrent plusieurs militaires en tenue, mais également d'autres personnes portant des blouses blanches, et Danny n'aima pas ça du tout.
Ils arrivèrent enfin dans une immense pièce au plafond haut. Au centre de la pièce se trouvait un gigantesque aquarium, et dans l'aquarium, le requin blessé, entouré par deux plongeurs qui lui faisait décrire des larges cercles le long des parois vitrés.
Danny regarda le squale évoluer pendant un moment. C'était fascinant, mais en même temps inquiétant. Si c'était bien ce à quoi il pensait, ça en était même complètement flippant. Il sentit un désagréable frisson descendre le long de sa colonne vertébrale.
-Lieutenant Williams?
La voix derrière lui le fit sursauter, et il manqua de glisser sur le sol légèrement humide.
-Contre-amiral Perkins, je suppose! répondit Danny en fixant le militaire.
L'homme hocha la tête. Ils se toisèrent pendant un moment, puis Danny rompit le contact visuel en reportant son attention sur le requin.
-Lieutenant Williams, vous avez conscience que je ne suis pas en mesure d'apporter toutes les réponses à toutes les questions que vous vous posez. Néanmoins, je ferai mon possible pour satisfaire votre curiosité.
Danny hocha la tête en silence. Il n'avait qu'une seule question pour le moment. Une qui lui brulait les lèvres depuis plus d'une heure.
-Est-ce que c'est lui? demanda-t-il soudain, en désignant le squale d'un signe de tête.
-Est-ce que c'est qui? demanda Perkins en retour.
-Ne jouez pas avec moi. Vous avez bien compris. Est-ce que c'est lui? Et ne me sortez pas vos conneries de secret-défense!
Le contre-amiral se balança subrepticement d'avant en arrière pour préparer sa réponse.
-Oui... C'est bien le capitaine McGarrett.
Danny sentit que sa tête se mettait à tourner. Il tendit une main pour s'agripper à quelque chose, n'importe quoi. Et il sentit qu'on l'attrapait par le bras pour le forcer à s'assoir. On lui proposa quelque chose à boire, et quelqu'un lui disait de respirer doucement, profondément. Ce qu'il fit pendant quelques minutes afin de retrouver son calme. Puis il écarta toutes les mains qui le touchaient d'un mouvement d'épaules et se releva.
Il descendit les marches qui menaient à l'aquarium. Du coin de l'œil, il aperçut deux militaires qui fonçaient sur lui, l'arme au poing, avant de s'arrêter net, surement sur un ordre.
Danny continua jusqu'à pouvoir poser ses mains sur les vitres de l'aquarium. Le requin eut un mouvement un peu plus réactif et se dirigea vers lui, suivit de près par les deux plongeurs.
Le squale effectua quelques allers-retours sous le nez de Williams, et à chaque fois, celui-ci put voir le dessin derrière l'aileron, celui qui reproduisait le tatouage que Steve portait au bas du dos, et qu'il avait un jour aperçut pendant qu'ils se changeaient dans les vestiaires.
Danny posa son front sur la vitre et ferma les yeux.
-Oh, babe... Mais qu'est-ce que tu as fait?
-Il était volontaire sur ce projet, dit Perkins dans son dos.
-Il était volontaire... Evidemment qu'il était volontaire! Cette tête brûlée! Comment ça s'est produit?
-Lieutenant Williams, je...
-Comment! insista Danny.
Perkins soupira puis indiqua une porte à Danny, l'invitant à le suivre.
Danny resta quelques secondes encore à fixer l'animal. Celui-ci tapa du museau contre la vitre, à l'endroit précis où la main de Danny se trouvait, ce qui arracha un maigre sourire au blond.
-Je reviens, murmura-t-il, avant d'emboiter le pas au militaire.
Ils s'installèrent de part et d'autre d'un bureau, et Perkins proposa un café à Danny qui l'accepta bien volontiers.
Il serra les mains sur sa tasse, avala une gorgée et reposa la question.
-Comment ça s'est produit? Qu'est-ce que vous lui avez fait.
-Sachez d'abord, lieutenant Williams, que tout ce que je vais vous dire est censé être classé secret-défense, et que rien, absolument rien, ne doit sortir de cette base.
Danny hocha la tête.
-Si j'accepte de vous en parler, c'est parce que je pense que vous allez pouvoir nous éclairer sur un point. Un point qui reste obscur depuis des années.
-Je vous demande pardon? fit le blond, incrédule. Commencez donc plutôt par le commencement, et après je verrai où, et si, je peux vous aider.
-Très bien... Le capitaine McGarrett s'est engagé dès sa sortie du lycée, à 18 ans. Nous, et je veux dire par là la Navy, l'avions approché lors de nos journées découvertes sur le campus de son établissement. Nous étions grandement impressionnés par ses aptitudes physiques, et notamment en natation. Quand, à 21 ans, il a commencé l'entrainement afin d'intégrer les SEALs, nous lui avons proposer de faire partie du projet "Caméléon".
-Projet "Caméléon"? Vos noms de missions sont vraiment pourris dans l'armée.
-La Navy! Lieutenant Williams!
-Navy, Armée, Air Force! Quelle importance... Vos noms de codes de missions sont aussi pourris les uns que les autres! Parlez-moi de ce projet, enfin si vous pouvez bien sur!
Le contre-amiral but une gorgée de son propre café avant de respirer profondément. Il outrepassait ses fonctions, il en était conscient. Mais l'homme en face de lui semblait déterminé à tout connaitre, et peu importaient les conséquences.
-Vous savez qu'il existe dans plusieurs pays des programmes pour améliorer la résistance des soldats et des forces armées. Les États-Unis ont commencé à travailler sur la projet "Caméléon" au milieu des années 80. L'idée était simple : injecter de l'ADN animal aux soldats volontaires pour améliorer leurs performances. Le requin pour les nageurs de combats, l'aigle pour les pilotes, le guépard pour les fantassins. Chaque animal a été choisi en fonction de ses aptitudes.
Danny recracha une bonne partie de son café sur le bureau et manqua de s'étouffer. Quand il réussit enfin à reprendre son souffle, son regard envers le militaire était terrible, et Perkins sentait qu'il était à deux doigts de lui sauter à la gorge.
-Vous en avez fait des cobayes! hurla-t-il.
-Ils étaient volontaires, répéta le contre-amiral. Ils connaissaient les risques encourus.
Danny se leva d'un bond. Il ne pouvait plus rester assis. Il fit les cent pas dans le bureau, marmonnant des jurons de plus en plus violents. Puis il s'arrêta, ouvrit la porte et jeta un regard vers l'aquarium. Le squale avait reprit ses cercles et les plongeurs avaient quitté le bassin.
-La métamorphose fait partie de ce... projet?
-Non. La métamorphose était inespérée. Seul une poignée de soldats en est capable.
-Inespérée! Vous en parlez comme d'un cadeau du ciel. Vous avez transformez Steve... et ces hommes, en... en... en animagus!
Le mot lui semblait stupide, mais c'était le premier qui lui venait à l'esprit. Perkins eut un sourire indulgent.
-Ce n'est pas de la magie, lieutenant Williams. C'est de la science.
-Fiction! compléta Danny. De la science-fiction! Pas étonnant que Steve ait rejoint ce projet. Il a toujours eu un gout affreux en cinéma.
Danny sortit du bureau et retourna vers l'aquarium. Il hésita un moment, puis monta sur une plateforme qui surplombait l'eau. Le contre-amiral le suivit.
Ils fixèrent leurs regards sur le requin qui se rapprochait d'eux. Alors qu'il leur passait devant, Danny s'accroupit, tendit la main et frôla le dos du requin. Le contact était étrange. C'était râpeux et doux à la fois.
-Combien de temps dure la transformation? reprit-il.
-Environ 12 heures. Nous ne savons pas pourquoi, mais il semble que les transformations soient en accord avec le mouvement des marées.
-Mais alors, pourquoi ne se transforme-t-il pas tous les mois. Ca fait presque un an que je travaille avec lui, et je ne l'ai jamais vu se recouvrir d'écailles!
-Nous n'expliquons pas ce phénomène. Et pourtant nous travaillons sur ce projet avec Steve depuis 13 ans. Tout ce que nous savons, c'est que la métamorphose intervient une fois par an, aux environs de l'équinoxe du printemps, et dure pendant un mois. 28 jours pour être précis. Le temps d'une lunaison.
Danny resta accroupi, indifférent aux cris de protestations de son genou droit. Le requin se rapprocha du bord, et effectua des petits cercles près de lui.
-Alors c'est ça que tu es? Une espèce de requin-garou?
Pour toute réponse, le requin agita violemment sa queue et envoya une gerbe d'eau sur Williams qui se releva en crachant un peu d'eau salée.
-Je te le ferai payer! lança-t-il en tendant un doigt accusateur vers le squale. Et si Danny n'était pas aussi perturbé, il aurait pu jurer que le requin avait
souri.
Perkins regarda sa montre, et annonça que la métamorphose inverse allait se produire dans quelques minutes.
-J'ai encore une question, fit Danny. Comment se fait-il qu'il se soit échappé? Parce que je me doute bien que ce n'est pas vous qui l'avez fait sortir!
-Il a profité de ses fabuleuses capacités de SEAL. Il est sorti sous sa forme humaine, sans que personne ne s'en aperçoive. J'ai également une question, lieutenant Williams. Pourquoi nous avez-vous appelez? Pourquoi n'avez-vous pas appeler les gardes-côtes quand le requin s'est échoué sur votre plage?
Danny haussa les épaules.
-Quand j'ai vu le dessin derrière la nageoire, j'ai eu un mauvais pressentiment. Ce dessin, c'est le tatouage que McGarrett porte au bas du dos. Je le reconnaitrai entre mille, murmura Danny. Et mon instinct de flic m'a conseillé de contacté la Navy. Qu'elle devait y être pour quelque chose. Et mon instinct ne me trompe jamais.
Il poussa un profond soupir. Tout cela le dépassait un peu. Mais il savait qu'il devait rester là. Pour Steve.
Dans le bassin, il y eut un grand remous, comme un tourbillon, et soudain, le corps nu et bien humain de Steve remonta à la surface. Les plongeurs se rapprochèrent de lui et le firent pivoter sur le dos.
-Monsieur! La blessure recommence à saigner. Il faudrait l'amener à l'infirmerie! cria l'un des hommes-grenouilles.
Danny eut un hoquet de frayeur en se rappelant d'une chose. Il avait tiré sur Steve. Bon sang il avait tiré sur Steve!
Perkins lui saisit le bras et lui demanda de le suivre à l'infirmerie. Danny se laissa emmener, trop sonné pour penser.
(à suivre)