Ayant bouclé ma leçon plus vite que prévu, j'ai pris quelques minutes pour écrire un petit drabble pour ton anniversaire, lune. J'espère que celui-ci te plaira, ainsi qu'aux autres. C'est écrit en peu de temps donc pas très long ni fantastique, mais j'ai tâché de mettre autant de bons sentiments et de douceurs que possible.
Joyeux anniversaire à toi, bonne lecture aux autres !
♣♣♣♣♣Des deux hommes, tout le monde s’accordait à penser que le dominant, celui qui occupait le rôle de l’adulte responsable et sûr de lui était Futé. Peut-être parce que Futé, lui, ne comptait pas d’années en asile psychiatrique, n’inventait pas d’invasions de chenilles vampiriques au milieu de la nuit ou ne construisait pas de chalets en fraise Tagada. A moins que cela ne tienne à l’apparence, à ce physique lisse et ce sourire confiant qui ne quittait jamais le visage du bellâtre.
Futé était le digne héritier de Dom Juan : l’homme viril, assuré et plein de charme. A la différence du héros, il n’avait d’yeux que pour un seul et même être, Looping. Parce qu’il n’y avait rien qui valait les étreintes tendres du Capitaine, son regard inquiet lorsque Futé se blessait légèrement, ses mil et unes attentions lorsqu’il était en convalescence et ces longues sérénades qu’il lui chantait au creux de l’oreille, parfois. Un concentré de passion, de douceur qui lui aurait autrefois donné la nausée. Mais pas dans ce cas précis. Après tout, Looping n’attendait rien : il donnait, c’était dans sa nature. L’homme n’attendait jamais rien en retour.
Ses compagnons de route prenaient le pilote pour un doux rêveur : en vérité, il n’en était rien. Looping feignait assez bien la folie, les névroses et l’euphorie. S’il se donnait tant de mal, c’est parce qu’il était au fond très perspicace : on pardonne tout aux fous. Même les câlins-surprises, les embrassades nocturnes et les démonstrations d’affection en public. Ce bonheur valait bien les deux ou trois pilules amères que le docteur lui prescrivait.
Ainsi, naturellement, pour ceux qui avaient connaissance de l’union des deux hommes, Futé était l’homme, l’adulte, la personne dominante. Looping, lui, était le doux des deux, plus effacé, plus enfantin. Cela contentait les élans protecteurs du Lieutenant ; le pilote, lui, était parfaitement à l’aise avec l’allure qu’il renvoyait.
Puis, il savait. Mieux que quiconque, il avait conscience que Futé n’était pas si confiant, si fier qu’il le montrait. Son homme, son héros cachait des faiblesses qu’il taisait au reste du monde. Looping les connaissait toutes, par cœur, sur le bout des doigts. Il s’était constitué un rayon, dans ses méninges qu’il visualisait comme une bibliothèque aux couleurs jaune et violette, où il entassait chacune des plus anodines et petites informations que Futé avait confiés, un jour, un soir et parfois au détour d’une bouteille ou d’un verre de Gin Tonic.
Ces confidences étaient autant de petites briques, comme des
Lego, qui formaient un mur, une carapace. Celle derrière laquelle se dissimulait Templeton Peck, plus humain, plus fragile. Ce gars-là ne se montrait pas souvent. Looping lui-même l’avait rarement rencontré : Futé le faisait taire et privilégiait ses autres facettes. Pour se défendre, en rendant les coups en double. Pour ceux qu’il avait encaissés autrefois, sans pouvoir se venger, pensait Looping.
Mais au cours de cette nuit, à trois heures du matin, recroquevillé dans le lit, ce n’était pas Futé. C’était bien Templeton, fébrile, qui tremblait au cœur de l’une de ses terreurs nocturnes. Les gémissements, les cris plaintifs, les tressautements avaient inquiétés Looping autrefois. Il était à présent complètement habitué à cet étonnant spectacle.
Promenant sa main sur le front de son compagnon, il s’assura que celui-ci n’était pas fiévreux. Remontant la couverture jusqu’aux épaules, il se colla contre le corps tétanisé. Passant ses bras autour de silhouette sportive, il l’amena torse contre torse. Embrassant les joues, le coin des lèvres, il posa un chaste baiser sur la bouche entrouverte de son partenaire.
Emergeant doucement de ce mauvais cauchemar, Futé le regarda, hagard et confus durant quelques secondes. Comprenant finalement qu’il venait de traverser l’un de ces mauvais songes, il enfouit son visage dans le creux de l’épaule du Capitaine, crispant ses doigts sur le T-shirt Star Trek. Passant une main dans les cheveux caramel, Looping se sentit gonfler d’une fierté toute particulière : celle de tenir, de protéger son âme-sœur.
Il ne pouvait briser un bâton plus grand qu’un cure-dent, ni échafauder des plans fantasques et grandioses. Il ne pourrait sûrement jamais courir un marathon sans l’étaler sur quatre jours au moins, non. Il pouvait, en revanche, être une épaule pour le grand Futé. Plus généreusement encore, l’être sans que personne ne s’en doute.
Berçant l’éphèbe dans ses bras jusqu’à ce qu’il somnole mollement, Looping lui murmura plusieurs paroles réconfortantes, sucrées dont lui seul avait le secret :
- Je suis là, bébé.
Une voix grogna, la bouche écrasée contre l’un des biceps :
- J’suis pas un bébé.
Le pilote ne pu faire autrement que de sourire. Pas un bébé, mais pas encore un homme. Pas tout à fait. Mais ça, personne ne le savait. A part Looping, bien entendu.
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