Rho làlà, Lostie, je suis désolée ! Comme je l'explique sur l'autre site où je poste, j'ai perdu les chapitres (et un paquet d'autres fichiers) dans un crash d'ordinateur. J'étais un peu découragée à l'idée de tout ré-écrire mais je m'y suis finalement remise. J'ai lu ta review ce matin, ça m'a encouragé à boucler la suite pour ce soir! Un grand merci à toi.
J'ai changé deux ou trois trucs dans la trame, ça m'a redonné un peu de motivation. J'espère que tu seras contente de lire la suite et que tu ne m'en voudras pas trop.
11 février 2017 – 221B Baker StreetAucun tremblement ne troubla la trajectoire de la seringue qui plongea, incisive, dans le creux du coude de Lestrade. Livide comme un mort, l'inspecteur avoua honteusement sa phobie des aiguilles.
John, amusé, recueillait paisiblement les deux tubes de sang nécessaires aux expertises réclamées par Scotland Yard. Lestrade ne réintégrerait pas leurs services sans montrer patte blanche : l'abstinence totale lui était imposée.
Les yeux sévères de Sherlock étudièrent le liquide carmin qui s'échappait de la veine de son acolyte. Il ressentait une angoisse indescriptible, accentuée par l'attente qui s'annonçait.
- Nous aurons les résultats quand ?, interrogea Sherlock, impatient.
Lestrade sourcilla.
Nous ? Ce pronom s'imposait de plus en plus naturellement dans leurs conversations. Il s'abstint néanmoins de tous commentaires.
John emballa précautionneusement les deux ampoules.
- Deux jours. La décision est attendue-
- Jeudi prochain, l'interrompit Sherlock, incapable de quitter Lestrade des yeux. Ce n'est qu'une formalité, n'est-ce pas ?
Greg, faussement distrait, appuyait fortement sur le pansement qui garnissait le pli de son bras. L'insistance de Sherlock commençait à le rendre mal à l'aise.
- Greg ?
John l'avait interpellé, conscient que quelque chose se tramait.
- Je n'ai rien bu. Rien du tout.
- Quel est le problème, alors ?, l'interrogea le détective, suspicieux.
Doué d'obscurs talents de prémonitions – ou d'une meilleure connaissance du genre humain que son ex-colocataire -, John leva les yeux au ciel. Il venait de comprendre la source de l'embarras.
- Greg. Tu n'as pas à reprendre le travail si tu ne te sens pas prêt.
- Evidemment que si !, commenta Sherlock, exaspéré par la situation.
Lestrade souffla bruyamment, mécontent d'avoir à expliciter sa pensée.
- Je ne sais pas… Je ne sais pas quoi penser.
- Dans ce cas, c'est que tu n'es peut-être pas prêt à reprendre, lui conseilla John, bienveillant.
- C'est faux. Il doit juste s'y remettre une bonne fois pour toutes.
Le silence coupable de l'inspecteur acheva de sortir Sherlock de ses gonds. Empoignant sa veste, il balaya la pièce du regard.
- J'ai quelques affaires à régler. Que l'un de vous ferme la porte en partant. Vous savez l'un comme l'autre où sont les doubles des clés.
Lestrade paraissait misérable, ratatiné de fatigue et de gêne dans son fauteuil. John le regarda, désolé pour lui :
- Je sais ce que c'est. Il est très doué pour vous ruiner le moral en quelques secondes.
- Et me faire sentir comme un moins que rien, oui, compléta Greg en se débarrassant rageusement de son pansement.
John sourit tristement.
Oui, j'ai connu ça.Consignant quelques informations sur une feuille, le médecin releva la tête et formula quelques conseils d'un ton des plus professionnels.
- Ta tension est particulièrement haute. Tu devrais surveiller ça.
Lestrade éclata de rire, dévisageant John d'un regard désabusé :
- Evidemment que ma tension crève le plafond. La faute à qui, d'après toi ?
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11 février 2017 – Scotland Yard, bureau de Sally Donovan- Il ne semble pas décidé à reprendre le boulot.
Sally écouta le récit plaintif de Sherlock, contrariée de l'irruption inopinée du détective. Nerveuse, elle songea un instant qu'elle avait besoin de quelques semaines de vacances. Ou, du moins, d'un peu moins de rebondissements dans l'affaire Gregory Lestrade et ses dommages collatéraux.
- Nous ne pouvons pas aller contre sa volonté. Je l'apprécie énormément et je regrette-
Sherlock grimaçait, vexé de quelqu'un puisse prétendre entretenir une relation privilégiée avec l'inspecteur. Surtout elle.
Sally perçut son agacement, réagissant avec un commentaire sarcastique de son cru.
- Oh, c'est bon. Je ne suis pas celle qui partage des petits repas en tête à tête trois fois par semaine avec lui. Pas besoin de faire une crise de jalousie.
- Je ne vois pas où vous souhaitez en venir.
- Moi non plus. Je ne préfère pas y songer, en tout cas.
- Je m'occupe de lui, se défendit Sherlock, supportant difficilement les insinuations du Sergent.
- J'essaie, également. Raison pour laquelle je renonce à l'idée de lui imposer quoique ce soit. Le contraindre à reprendre, c'est le jeter dans la gueule du loup. Autant lui tendre une bouteille de scotch tout de suite.
Refusant l'idée d'accorder davantage d'attention à son insupportable visiteur, Sally baissa la tête sur de la paperasse. Paraphant quelques documents, elle poursuivit son explication d'un ton distrait.
- Vous le voulez ici, pour retrouver vos vieilles petites habitudes et magouilles sur lesquelles il fermait les yeux ? D'accord. Si vous insistez un peu, il le fera. Mais soyez prêt à en assumer les conséquences.
Sherlock se mordit les lèvres, écoutant attentivement mais avec une distance hautaine.
- Merci pour vos précieux conseils.
Il fit son deuil : ni John ni Donovan ne l'aideraient à convaincre Lestrade de reprendre. Avant qu'il ne quitte son bureau, Sally le gratifia d'un autre commentaire.
- Très bien. Si vous en voulez un autre, écoutez : laissez le temps faire son œuvre.
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11 février 2017 – 221B Baker Street, tard dans la soiréeAffalé dans le sofa, avec la solitude pour seule compagnie, Sherlock ruminait les évènements décevants de la journée. Son plan connaissait quelques accrocs dernièrement et mettait en péril l'entièreté son dessein.
Agacé par l'attitude de poule mouillée de Lestrade, la compassion ennuyeuse de John et l'immobilisme imbécile de Donovan, Sherlock s'avouait dépourvu d'atouts dans cette nouvelle bataille.
Posé sur la table basse à quelques centimètres de lui, son téléphone s'illumina. Jetant un coup d'œil suspicieux sur l'écran, il ne fut guère étonné de l'identité du trouble-fête.
- John ?
La voix du médecin grésillait légèrement.
- Je me suis dit qu'un petit coup de fil s'imposait.
- A quel sujet ? Rosie va bien, n'est-ce pas ?
- Très bien. Elle dort à poings fermés. Sérieusement, tu n'as pas la moindre idée de la raison pour laquelle je t'appelle ?
- Lestrade, forcément.
Le silence à l'autre bout du téléphone lui fit comprendre qu'il avait raison. Une fois de plus.
- Ecoute, après la scène de ce matin… Je pense qu'une petite discussion est nécessaire.
- C'est ce que nous faisons, non ?, commenta Sherlock, exaspéré devant tant de manières.
- Entre toi et lui. Je n'ai rien, ou quasi rien, à voir avec vos affaires personnelles.
Sherlock s'étrangla presque. Personnelles ? Depuis quand sa relation avec Lestrade était devenue suffisamment intime pour que même John Watson, son meilleur ami, n'ose y fourrer son nez ?
- Misère. Donovan et toi vous faites beaucoup d'idées sur nos fameuses affaires, justement.
- Tu as demandé l'avis de Donovan ?
- Qui a exactement la même irritante opinion que toi.
John expira. Sherlock interpréta le soupir aussitôt : une longue interrogation et leçon de morale l'attendait dans les minutes à venir.
- Pourquoi souhaites-tu autant le voir retourner à son ancien poste ?
- Pour travailler avec lui. C'est évident.
- Il est sur le fil. Il a besoin de ta bienveillance, pas que tu lui colles la pression. Ce n'est de toute façon plus ton unique passe-droit à Scotland Yard, je ne comprends pas.
- J'aime travailler avec lui, reformula Sherlock, crispé de se répéter.
Le sourire de John se devina à travers la communication.
- Voilà, on touche le problème du doigt. S'il ne s'agit que de passer du temps avec lui, il existe de nombreux autres prétextes.
- Et au-delà de ça, ce serait l'issue logique de l'abandon des poursuites qui pesaient sur lui-
- Cette affaire est clôturée.
- Pas tant qu'il n'aura pas réintégré la place qui lui est due.
- Et s'il n'en voulait plus ?, envisagea le médecin. Tu vois, Sherlock, la plus belle victoire qu'on peut retirer de cette lutte, c'est de le voir épanoui et en bonne santé. Le reste, c'est futile.
Sherlock s'avouait peu à peu vaincu. John s'en voulut d'être aussi sec à l'égard de son précieux ami.
- Allez, qui sait… Il a peut-être juste besoin de temps. Il reprendra peut-être dans quelques semaines.
- Peut-être.
John s'apprêtait à interrompre cette conversation tardive. Sherlock ressentit une légère nostalgie de l'époque où il lui aurait possible de continuer leur discussion entre quatre yeux, dans le salon où il se trouvait présentement.
- Sherlock- Si je peux me permettre. Envoie-lui un message. J'ignore dans quel état d'esprit il peut être, ce soir, mais- Ce n'est jamais vain de lui montrer que tu penses à lui.
Je ne fais que ça, pesta Sherlock, réalisant que sa journée avait tourné autour de l'inspecteur.
Inspecteur qui ne voulait plus en être un.
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11 février 2017 – domicile de LestradeDebout au milieu de sa cuisine, Lestrade étudiait d'un œil venimeux la canette qu'il tenait entre les mains. Une vodka aromatisée, achetée à la supérette du coin. Un poison comme un autre, avec de jolies couleurs sur l'étiquette.
A quoi bon ?, s'interrogea-t-il en la faisant tourner, lisant les avertissements présents sur l'étiquette quant à la consommation de boissons alcoolisées.
Il refusait de reprendre le boulot. Il ne s'en sentait pas capable. Il en ignorait les raisons exactes. Il traînerait sûrement une réputation peu glorieuse pendant quelques temps dans les couloirs, il s'en doutait. Il s'en fichait néanmoins.
La prise de sang effectuée ce matin se chargerait de rétablir la vérité. Il était sobre.
Les choses seraient peut-être différentes d'ici quelques secondes, songea-t-il en ouvrant la boisson.
Quelques gorgées suffiraient à compromettre son prochain examen. Il serait alors naturellement écarté des fonctions pour une durée indéterminée. Peut-être définitivement si sa direction était dotée d'un minimum d'intelligence.
Il sursauta soudain. Dans sa poche, son téléphone venait de vibrer à trois reprises.
« Baker Street, demain, Sept heure. »
Sherlock Holmes. Un deuxième message.
« Sept heure.
Précise. »
Un dernier.
« Bonne nuit. »
Greg sourit, amusé par l'autoritarisme non-dénué de tendresse du détective. D'une main, il renversa la vodka fruitée dans l'évier, laissant le poison filer vers les égouts. De l'autre main, il composa un message simple mais lourd de sens.
« Merci Sherlock. »