Série : Dawson's Creek (Dawson)
Rating : G (tout public)
Couple : Jack McPhee et Doug Witter (frère ainé de Pacey)
Un jour, peut-être
Un cabriolet rouge se gara sur le bas-côté. Un jeune homme brun, au teint légèrement halé s'en extirpa. Il pénétra dans un restaurant de fruits de mer avec une démarche fluide et assurée.
Le Shérif du comté, installé non loin de l'entrée, remarqua l’arrivée remarquée de ce nouveau visiteur. Il ne lui semblait pas si inconnu que ça.. la carrure, la démarche et les traits cachés derrière des lunettes de soleil fumées lui rappelaient étrangement quelqu’un.
- Jack ?!
Interpellé, le jeune homme jeta un regard circulaire sur la salle puis rencontra le sien. Un large sourire vint illuminer son visage, jusqu’alors plutôt éteint.
- Doug ! Toi ici, c’est une heureuse coïncidence ! s’exclama-t-il en retirant ses lunettes pour mieux observer son vis-à-vis.
- C’est plutôt moi qui devrais dire ça ! Je te rappelle que c’est toi qui a quitté Capeside pour vivre la grande aventure à Boston se moqua gentiment le Shérif, en acceptant volontiers une étreinte chaleureuse en guise de bonjour.
Après ces retrouvailles inattendues mais heureuses, les deux jeunes hommes s’installèrent l’un en face de l’autre.
- Je suis heureux de constater que parmi les grands changements qu’il y a eu ici, les vieilles habitudes perdurent, remarqua Jack.
- Eh oui, je suis toujours le Shérif de Capeside.
- Pour la plus grande joie de ses habitants.
- Qu’as-tu appris sur les bancs de la fac ? La diplomatie ?
Le brun se mit à rire.
- Alors que nous vaut l’honneur de ta visite ? Tu es venu seul ?
- Hélas oui. Capeside et ses habitants me manquaient dit-il brièvement, élucidant volontairement la question.
Ce que remarqua aussitôt Doug .
- Tu m’as donné la version officielle. Qu’en est-il réellement ? demanda-t-il plus sérieusement.
Jack esquissa une grimace.
- Ça se voit tant que ça ?
- Pour quelqu’un d’autre peut-être que ça passerait, mais moi je vois tout de suite que tu cherches à me cacher des éléments souligna Doug en se penchant vers lui, l’œil malicieux. "Déformation professionnelle". C’est l’un des inconvénients à fréquenter un agent de police.
Préférant rester sur le thème de la plaisanterie, Jack lui répondit sur le même ton :
- Je tenterai de me montrer plus convainquant alors.
- Et moi plus indiscret.
Doug reprit une gorgée de bière sous le regard légèrement étonné de Jack . Le Shérif avait toujours été quelqu’un de souriant et de particulièrement taquin, mais à cet instant, il eut le sentiment qu’un jeu de séduction s’était établi entre eux. Cette pensée incohérente le troubla quelques secondes. Le frère aîné de son meilleur ami était un bel homme très charismatique qui pouvait très vite devenir intimidant..
Une tornade blonde fit irruption, ce qui interrompit ses interrogations. Le brun assista alors à un spectacle, une fois encore, inattendu. Une jeune femme embrassa langoureusement Doug. Puis, elle s’assit sur ses genoux.
- Tu ne me présentes pas à ton ami ? dit-elle.
- Si bien sûr. Jack, voici Stephie ma petite-amie. Stephie, Jack McPhee, un très bon ami de mon petit frère Pacey.
- Enchantée !
Abasourdi par cette nouvelle, Jack lui rendit sa politesse maladroitement.
- Moi…aussi..
- Douggie, je ne vais pas pouvoir rester malheureusement.. J’ai encore ce fichu reportage à boucler…Tu ne m’en veux pas ?
- Non, c’est le travail je comprends assura-t-il.
- Et je pense rentrer tard ce soir…Mais je suis rassuré, tu as de la compagnie avec toi ! s’extasia-elle en se rappelant l’existence de Jack.
- Oui tout à fait.
- Bon, je vous laisse. A ce soir mon cœur.
Elle plaqua ses lèvres contre les siennes puis s’en alla aussi vite qu'elle était arrivée.
Doug surprit l’expression étonnée de Jack qui ne semblait toujours pas se remettre de cette découverte.
- Ne me dis pas que toi aussi tu imaginais que j’allais rester célibataire toute ma vie ? Malgré les dires de mon frère, je suis capable moi aussi, de construire une relation durable avec une femme.
Le brun se sentit obligé de se rattraper.
- Oh…mais pas du tout ! C’est juste que je t’ai toujours connu célibataire alors c’est..surprenant de te voir tout à coup casé. Mais, je suis très heureux pour toi !
- Ça va Jack, je plaisante ! Tu peux respirer.
Le brun se mit à rire sans raisons apparentes. Doug haussa alors un sourcil.
- Qu’y-a-t-il de drôle ?
- Non, rien c’est juste que je m’étais imaginé…
Puis il s’interrompit dans sa phrase, il n’allait tout de même pas lui dire que la minute d’avant il avait cru que quelque chose d’étrange se passait entre eux.
- J’étais en train de m’imaginer la tête que fera Pacey quand il apprendra.
- Ah mais je sais déjà. Il ne voudra pas le croire et attendra de pouvoir le voir de ses propres yeux. C’est la raison pour laquelle je ne lui ai encore rien dit, il manquerait plus que Stephie et moi mettions un terme à notre relation juste avant qu’il n’arrive.
- Ça fait combien de temps ?
- 6 mois. Mais nous ne nous voyons pas tout le temps. Ses reportages l’obligent à se déplacer. Nous nous sommes rencontrés alors qu’elle faisait un sujet sur la police de Capeside.
- Et elle a interviewé notre célèbre Shérif. Je vois…dit-il en se permettant de lui faire une œillade complice.
- Cette nouvelle a le mérite de te mettre en joie souligna Doug.
Oui, Jack était heureux. Et particulièrement détendu. Ses craintes avaient été injustifiées, Doug était hétérosexuel et épanoui en couple.
- Oui, parce que je viens de réaliser que le changement a parfois du bon.
XXX
- Un café ? proposa Doug en revenant de la cuisine.
- Non merci répondit Jack, en ouvrant sa valise, déposée sur le lit de la chambre d’ami. C’est très gentil à toi de me proposer de dormir chez toi, mais j’aurais très bien pu aller chez les Potter. Je n’ai pas envie de déranger…
- Tu ne déranges personne Jack. Tu es mon invité et tu es le bienvenu ici. Tu peux rester aussi longtemps que tu le souhaites.
- Ça ne va pas poser de problème avec Stephie ? Elle aurait très certainement préférée se retrouver seule avec toi, surtout si vous n’avez pas l’occasion de vous voir si souvent que ça.
- Ne t’inquiète pas pour ça.
- Je ne voudrais pas…
- Ne parlons plus de ça. Veux-tu que je t’aide à ranger tes affaires ?
Jack allait décliner l’offre si ce n’est que Doug n’attendait pas vraiment une réponse. Il était déjà en train de disposer ses chemises sur des cintres. L’étudiant le regarda faire puis se mit à rire.
- Qu’y a-t-il cette fois ? fit Doug faussement vexé.
- Rien ! Il n’y a rien du tout.
- Je vais finir par croire que tu te moques de moi.
- Pas le moins du monde. Je suis seulement heureux d’être revenu.
- Moi aussi.
Lorsqu’ils eurent terminés, ils se laissèrent choir sur le lit.
- C’était si terrible que ça Boston pour que tu viennes te réfugier ici ?
Jack le toisa, son aîné ne lâcherait pas le morceau de sitôt.
- Lorsque j’avais Pacey au téléphone, je lui demandais des nouvelles de vous tous, à défaut d’avoir des nouvelles par vous déclara l'ainé.
Le brun fut surpris de l’apprendre. Soudainement soucieux d’éviter tout malentendu le Shérif expliqua ses motivations.
- Bien que je ne fasse pas parti de votre bande, j’étais là et je vous ai vu grandir, évoluer, souffrir, vous entraider, vous déchirer, vous réconcilier. J’avais pris goût à toutes ces petites péripéties, puis vous êtes parti. Ça a jeté un grand froid sur Capeside. Mais c’est ainsi que va la vie.
- Je suis désolé, je n’étais pas au courant… Si j’avais su je t’aurais appelé, ou envoyé des mails.
- Je n’ai pas dit ça pour te culpabiliser. J’imagine bien que vous étiez très occupés et que vous aviez autre chose à faire.
- Dorénavant, je donnerai régulièrement de mes nouvelles promit Jack.
En gage de bonne volonté, il se laissa aller à des confidences. Il n’aurait jamais imaginé que Doug s’intéresse à eux, à lui et s’inquiète de leur avenir.
- Mes débuts ont été difficiles. En voulant à tout prix intégrer une confrérie, je me suis laissé aller à des excès et j’ai complètement délaissé mes études. Puis, au moment où j’ai cru être totalement accepté parmi mes « frères », ils ont appris que j’étais gay…Ils l’ont très mal pris et alors j’ai été exclu. Je l’ai très mal vécu.. Je voulais, j’espérais pouvoir vivre harmonieusement au sein d’un groupe de gens sans que mon homosexualité ne soit un problème.
- Je suis désolé..
- Mais ma plus grande erreur, c’est d’avoir délaissé mes amis de Capeside, ceux qui m’ont accepté depuis le début, qui ont connu Jack « l’hétérosexuel » et qui se sont sans difficulté adaptés à Jack, l’homosexuel qui se découvrait. J’ai eu de la chance qu’ils comprennent mon erreur et m’acceptent de nouveau parmi eux. J’ai pu alors reprendre mes études, auprès de Jen et de Audrey, une amie que l'on s’est fait là-bas.
J’ai rencontré un professeur qui m’a immédiatement fait tourner la tête. J’ai cherché à entrer en contact avec lui, sans penser un seul instant qu’il se passe quelque chose. Une sorte de fantasme. Mais, il s’est avéré qu’il était homosexuel sans vouloir se l’avouer et a cherché à avoir une relation avec moi. J’ai refusé, parce que ça me semblait trop compliqué…Il venait tout juste de quitter sa femme enceinte et puis de mon côté j’avais rencontré un autre étudiant, David.
Nous étions ensembles depuis deux mois lorsque j’ai appris qu’il me trompait avec un autre. Je l’ai quitté, j’ai pris mes affaires, j’ai beaucoup roulé et je suis arrivé ici. Voilà toute l’histoire !
- Au risque de me répéter…Je suis sincèrement désolé..
- Ainsi va la vie ! C’est un grand sage qui me la dit.
Ne désirant pas s’attarder sur sa vie sentimentale dérisoire, il bifurqua sur ce quoi ils excellaient ensemble, la taquinerie. Réceptif, l’agent de police le fixa en plissant les yeux.
- Ah oui ? Et quel âge a-t-il exactement ton grand sage ?
- Oh, je ne sais pas. Son expression est restée la même, si ce n’est que quelques cheveux blancs sont venus éclaircir ses cheveux. Il fait dorénavant parti de la catégorie des hommes dits « poivre et sel », à la Georges Clooney et Richard Gere. L’âge d’or de la masculinité !
Doug sourit de sa « provocation ». Son adversaire avait du répondant. Il sauta sur ses jambes.
- Allez ramène-toi, je te défie de me battre au basket. Blanc-bec !
- D’accord !
Après avoir revêtu des vêtements plus adaptés à la pratique d’une activité sportive, ils sortirent dans l’arrière-cour. Un panier de basket avait été suspendu au mur. Ils firent quelques échauffements et élongations avant de commencer.
- Tu veux commencer ? questionna le Sherif
- Honneur aux ainés.
- Tu es en train de signer ton arrêt de mort..
- Je suis pressé de voir ça..
XXX
Les deux hommes dégoulinants de sueur, s’écroulèrent par terre. Le contact frais du sol fut un délice.
- Je déclare forfait, tu as gagné ! s’exclama Jack dans un souffle.
- Je n’en demande pas moins, si ce n’est que je te soupçonne de m’avoir laissé gagner.
- Jamais de la vie, tu m’as tué !
En réalité, Doug avait par inadvertance rapproché un peu trop près son corps de celui de Jack, qui s’en était retrouvé déstabilisé.
- Tu t’en ai plutôt bien sorti, si ce n’est qu’à la fin tu as eu une baisse de régime.
- Il faut dire que ces derniers temps j’ai privilégié le sport cérébral au sport physique.
Le Shérif glissa son regard sur son torse. Jack en éprouvât un plaisir coupable.
- Pourtant tu m’as l’air bien plus musclé qu’à ton départ. Mais dis-moi qu’est-ce que c’est que cette coiffure ? Un effet « porc-épic » ?
- Tu n’aimes pas ?
- Je ne dirai pas ça.. Mais je préférai celle d’avant, cela te donnait un air faussement innocent.
- Innocent ?
- Jack McPhee l’élève sage, doux et sensible.
Se remémorer le lycée, rendait l’étudiant à la fois mélancolique et en colère.
- Tu as oublié « gay ».
- Quand je te regarde je ne pense pas nécessairement à ça.
Jack appréciait l’honnêteté de Doug. Il ne fallait pas oublier que le Shérif faisait partie de l’ancienne génération ou l’homosexualité était encore plus taboue qu’à l’heure actuelle. Il était agréable d’être « soi-même » en sa compagnie. Sans artifices ni faux semblants.
Ils se fixèrent longuement, le sourire aux lèvres. Cette alchimie fut une seconde fois rompue par la petite-amie de Doug.
- Ah vous voilà ! J’ai pu me libérer plus tôt au final. J’ai raté une confrontation entre mâles ?
Doug alla l’enlacer par la taille.
- Du grand art ! Jack a mené le jeu toute la première partie puis j’ai pu reprendre le dessus.
- Je n’en attendais pas moins de toi mon valeureux combattant..susurra-t-elle avant de l’embrasser.
Jack détourna les yeux et préféra rentrer.
- Je vais prendre une douche avertit-il, en n’attendant pas une réponse de leur part.
- D’accord. Il y a des serviettes propres et des gants dans le placard de droite.
Sur le pas de la porte le brun se retourna vers Doug.
- Merci.
XXX
- Alors comme ça on abandonne son meilleur pote ? Et nos petites virées dans ton bar préféré ? - Tu n’iras qu’à y’aller sans moi. Tu y seras très bien accueilli, j’en suis certain.
- Dis-moi, c’est ma présence trop répétée qui t’a fait retourner à Capeside ? Une overdose ? Le Shérif apparut en uniforme dans la cuisine, fraichement douché. Il se servit un café en observant Jack pendu au téléphone.
- Qu’est-ce que tu racontes Pacey ! J’ai adoré passer tous ces moments avec toi. J’avais juste besoin de prendre un peu l’air…
- C’est bien ce que je dis ! Tu en avais marre de m’avoir dans les pattes ! - Pour m’éloigner de David !
- Aïe..J’ai fait une gaffe là non ? Hum…Où t’es-tu installé ? Au Bed and Breakfast de Joey ? - Non, ton frère m’a aimablement proposé de m’héberger chez lui.
- Douggie ?! - Bonjour petit frère !!! s’exclama le concerné.
- Comment va-t-il ?! A-t-il une petite-amie secrète ? Un petit-ami ? - Il me semble en grande forme.
Une très grande forme.
- Ah je vois, il t’a interdit d’en parler. Alors il s'agit d'
une petite-amie ?
- Tout à fait.
- Je suis heureux pour lui bien que je sois déçu que ce ne soit pas « Un » petit-ami, moi qui ai toujours été convaincu qu’il était gay.. - Eh bien non.
- Je vous aurais même bien imaginé ensemble ! Jack devint subitement mal à l’aise.
- Et pourquoi ça ?
- Il est séduisant, gentil et avec un certain sens de l’humour, un peu fleur bleue. Ça te correspondrait parfaitement ! - Pacey !
- Qu’est-ce que tu en penses ? N’ai-je pas raison ? - Pacey !!
- Qui sait peut-être qu’un jour… Doug attrapa le combiné.
- Pacey cesse de harceler Jack ! Il est venu ici se reposer.
- Oh Douggie, tu écoutes les conversations maintenant ? - Je ne sais strictement pas ce que tu lui racontais mais je constate que même à plusieurs kilomètres tu continues à torturer ceux qui te sont chers.
- Une vieille habitude sans doute. Je vais devoir vous laisser les gars, car j’ai un travail qui me demande énormément de responsabilités. Qui l’aurait cru ? - Certainement pas moi.
- Allez. Je compte sur toi pour prendre soin de lui. Même si je sais que tu es très occupé ces temps-ci… - Sois sans crainte, j’y mets un point d’honneur. Au fait petit-frère ?
- Oui ? - Tu me manques.
- Toi aussi Douggie.
Ils raccrochèrent.
- Que vas-tu faire aujourd’hui ? demanda-t-il à Jack en allant s’asseoir en face de lui.
- Je vais aller faire un tour dans Capeside, dire bonjour à toutes les personnes qui comptent pour moi.
- Ça te dit qu’on se retrouve à l’heure de midi pour manger ? Au restaurant de fruits de mer comme hier ?
- Et Steffie ?
- Elle ne sera pas disponible de la journée.
- D’accord.
Comme promis ils se retrouvèrent au petit restaurant, anciennement tenu par les Potter.
- Jack ! Comment a été ta matinée ?
Le jeune homme se laissa tomber sur la chaise.
- Très instructive et à la fois très éreintante.
- Répondre sans relâche aux questions, ça fatigue à la longue.
- Oui c'est tout à fait ça !
- Alors tes impressions ?
- Il y a eu beaucoup de changements un peu partout mais je suis vraiment heureux de m'apercevoir que les rapports sont restés identiques. Malgré la distance, les années..avec la plupart c'est comme s'il n'y avait jamais eu de séparation. C'est une sensation très agréable.
- Ressens-tu la même chose avec moi ?
Le brun ne se laissa pas déstabiliser par la profondeur de la question de Doug.
- J'aimerai dire oui mais ce n'est pas exactement le cas. J'ai plus l'impression de redécouvrir un Doug que jusqu'ici je n'avais pas connu. Et c'est une découverte très positive.
Le Shérif sembla satisfait de la réponse, même ému. C'est donc sur un ton plus léger que la discussion se poursuivit.
- Au fait, tu as craché le morceau ?
Jack prit un air interloqué.
- Tu as fait comprendre à Pacey que j'avais quelqu'un. Ne me dit pas non, je le sais.
- Oui bon c'est vrai… Mais tu connais Pacey ! C'est….Pacey ! C'est impossible de lui résister !
- Il est vrai que vous êtes proches tout les deux. Depuis le début, vous avez toujours eu..cette complicité. Je suppose que c'est toujours le cas là-bas.
- Je pensais qu'on allait se perdre de vue mais c'est vrai que lorsque l'on se voit, c'est toujours aussi…
- Intense.
- Amusant. Et surprenant rectifia Jack.
- Surprenant ?
- Avec Pacey on ne sait jamais à quoi s'attendre. Alors la fois ou il m'a accompagné dans ce bar gay… A la base je ne l'ai pas renseigné sur l'endroit où on allait mais la réaction qu'il a eu quand il a su...J'en ri encore !
- Tu es heureux avec lui constata Doug. Tu es même heureux rien qu'en pensant à lui.
Le cadet fronça les sourcils.
- Serais-tu en train d'insinuer qu'il existerait une sorte de romance entre nous ?
- Ce que je crois c'est qu'un lien plus qu'amical t'unit à lui. Tu éprouves des sentiments pour lui, n'est-ce pas ?
- Oui Doug. Des sentiments amicaux !
- Tu me trouves peut-être un peu trop curieux..Tu n'as pas besoin d'être sur la défensive avec moi Jack.
- Je rectifie seulement les choses. A une époque oui j'ai eu un petit béguin pour lui, mais depuis l'eau a coulé sous les ponts et ce n'est plus le cas.
- En es-tu sûr ?
- Oui.
- Mais dans le cas ou j'aurais raison, Pacey est un garçon très ouvert. Tu peux lui confier sans crainte ce que tu ressens . Dans le pire des scénarios, il sera gêné et flatté, mais il ne t'exclura jamais de sa vie.
- Situation qui ne se présentera jamais puisque je ne vois en lui qu'un ami. Mon meilleur ami.
- Allons Jack, tu vois bien que ça m'est égal. Pourquoi nier l'évidence ?
- Si ça t'est tant égal, pourquoi insister ? Qu'est-ce que ça te rapporte ?
- Rien. Seulement le réconfort de te savoir heureux.
- Mais je suis heureux Doug ! Je me restaure avec un ami que je n'avais plus vu depuis des années dans un lieu qui m'est très chère. Que demander de plus ?
- Tu as raison finit par admettre le Shérif.
Le repas reprit une atmosphère moins tendue. Jack se promit intérieurement de s'irriter moins facilement.
Alors qu'ils allaient retourner à leurs activités, Doug changea ses plans.
- Ça te dirait de te balader un peu dans Capeside. Je suis sûr qu'il y a plein d'endroits que tu n'as pas encore visités. Je pense notamment à un petit coin tranquille, fréquenté seulement par des amoureux de la Nature.
- Ce serait avec joie.
- Bien alors je t'enlève.
Ils embarquèrent dans la voiture du Shérif.
- Ça fait quoi d'être Shérif ? questionna subitement Jack durant le trajet.
- Comment ça ?
- Tu dois te sentir "indestructible" non ?
- Ai-je l'air d'un Super Héros ?
- Exercer une autorité sur tous ces braves citoyens qui en retour te sont reconnaissants de veiller sur leur sécurité et être toujours muni d'une arme, cela doit donner une étonnante impression de confiance en soi. Quoiqu'il se passe, tu sauras gérer la situation.
- Tu crois réellement que ma position d'Homme d'Etat me rend plus confiant que les autres ?
- Ça ne l'est pas ?
- Jack je suis un homme comme les autres. Il m'arrive d'avoir peur et bien plus souvent que tu ne le crois. Mon métier ne me rend pas insensible aux imprévus de la vie.
- Pardonne ma naïveté.. Il m'arrive de faire des associations d'idées illogiques…
- Ne t'excuse pas. Ton franc parler me plait dit-il en se garant.
Un passage étroit rocailleux et terreux se présentait devant eux. Ils s'y frayèrent un chemin et s'y enfoncèrent. Ils marchèrent l'un derrière l'autre. C'est tout naturellement que Doug lui tendit sa main au passage de divers obstacles.
Après ce périple, le paysage se dégagea.
Des dunes, encadrées par de la végétation luxuriante, s'élevaient devant eux. Ils se regardèrent et sourirent muent par le même désir. Ils escaladèrent la pente sableuse et découvrirent un paysage à couper le souffle. Une immense étendue de sable bordée par une mer d'un bleu limpide qui se déchirait en des vagues successives.
- C'est splendide ! déclara Jack qui s'était abandonné dans une contemplation muette.
- J'étais convaincu que cet endroit te plairait. Je suis bien heureux de ne pas m'être trompé.
- Comment as-tu su ?
- Je l'ai deviné tout simplement.
Ils s'approchèrent un peu plus puis s'assirent dans le sable.
- Merci. Ce genre d'endroit ne peut que me faire du bien.
Enthousiasmé le jeune homme reporta son attention sur Doug qui ne cessait de l'observer.
- Qu'y a-t-il ? dit-il troublé par l'insistance de son observation.
- J'apprécie de te voir totalement serein.
L'étudiant scruta successivement le paysage et son ami. Puis submergé par le malaise, il baissa la tête et fixa ses mains en grimaçant.
- Qu'y a-t-il ? s'inquiéta le Shérif, témoin de sa transformation d'expression.
- C'est rien c'est juste que...c'est toujours troublant d'être dévisagé par un aussi bel homme…
Il releva la tête en faisant une moue embêtée.
- Désolé d'avoir dit ça..
Doug resta interdit quelques secondes puis reprit le cours normal de la conversation.
- Non c'est à moi d'être désolé Jack. Je ne voulais pas te mettre mal à l'aise.
L'ainé se concentra sur le mouvement lent et lascif de la mer.
- Je suis si beau que ça ? Sérieusement ?! demanda brusquement Doug, comme réveillé d'un long sommeil.
La spontanéité de la question fit rire Jack.
- Tu te poses réellement la question ?
- Je me vois tous les jours, je n'ai pas vraiment d'avis sur la question.
- En tout cas ne compte pas sur moi pour t'en enorgueillir !
- Allez !
- Bon d'accord ! D'abord il y a tes yeux. Ils sont d'un bleu très clair, ce qui contraste énormément avec tes cheveux foncés .
- Toi aussi.
- Ton sourire. Tu es toujours de bonne humeur.
- Comme toi.
- Et enfin, tu es plutôt musclé, ce qui est un critère non négligeable pour certaines personnes. Sans parler du fait que lorsqu'on te connait vraiment, en plus d'être physiquement beau, tu l'es également à l'intérieur. Satisfait ?
- Pas tout à fait. D'après ta description nous sommes en tous points semblables. Tu ne devrais donc pas te sentir gêné en ma présence alors que toi-même tu es aussi beau, sinon plus.
- Je serais plus beau que toi ?
- Oui. Tu as quelque chose de plus que moi. Le courage. Le courage d'affirmer qui tu es et de vivre ta vie comme tu l'entends. Alors que moi, je n'ai fait que répondre aux désirs de mon père en devenant Shérif comme lui.
- Tu n'es pas heureux de ta situation ?
- Si. J'aime mon métier. J'ai appris à l'aimer. Cependant, par moment je me dis que j'aurais pu vivre une autre existence. Plus épanouissante, tout en étant plus risquée.
- Qu'aurais-tu aimé faire ?
- Dessiner et peindre. Non pas devenir un peintre célèbre parce que ce que je produirais n'aurait rien de bien extraordinaire mais prendre le temps de m'impliquer dans cette discipline et évoluer à travers elle.
- Tu as un recueil de tes dessins ?
- Oui. Rangé quelque part. Je le sors de temps en temps quand j'éprouve le besoin de m'évader et de vider le trop plein de la journée.
- Pourrais-je le voir ?
Doug sembla soudainement perdre l'aura de confiance qui l'entourait continuellement.
- Si tu refuses je le comprendrai parfaitement. Dessiner c'est un don de soi. On n'offre pas un don de soi à n'importe qui ou avant qu'on ne soit réellement prêt à le faire.
En guise de réponse l'ainé lui sourit avec gratitude.
- Merci. Merci d'être revenu..
En présence de l'étudiant, le Shérif se sentait éclore comme une fleur figée dans un profond sommeil. Il s'ouvrait et faisait preuve de sensibilité.
Tout paraissait si simple. Et pourtant si beau. Ces sensations le plongeaient dans un tel état de sérénité, qu'il n'avait pas le recul nécessaire pour s'interroger sur le pourquoi du comment et se laissait porter par le courant. Un courant qui le rapprochait un peu plus de Jack à chaque instant.
Doug ne censurait pas ses émotions et laissait transfigurer ce qu'il ressentait sans aucune pudeur. Cette "générosité" d'âme toucha Jack. Il était touché par ce partage, cette sincérité. Doug était un bel être. Comment ne pas l'aimer ?
Jack se sentit de plus en plus étrange. Mal à l'aise, il tourna la tête de l'autre côté.
Instinctivement Doug s'exclama "Jack !"
Il eut envie de dire "Ne te cache pas de moi" mais se reprit suffisamment tôt pour rendre sa phrase moins étrange.
- Mon service va bientôt reprendre.
Ils retournèrent dans la voiture. Sur le chemin du retour, Doug s'interrogea sur la soudaine envie qu'il avait eu de saisir sa main pour l'empêcher de rompre le contact visuel qui les avait unis. Pour la première fois depuis leurs retrouvailles, il s'inquiéta.
- Où désires-tu que je te dépose ? Ne voulais-tu pas aller au centre commercial ?
- Si mais c'est totalement à l'opposé de ton travail. Déposes moi à un arrêt de bus je me débrouillerai.
- J'ai encore un peu de temps. Je vais t'y conduire.
Jack n'insista pas. Doug ne changerait pas d'avis.
Alors qu'ils arrivaient et que le Shérif cherchait un endroit où se garer, Jack cru apercevoir Steffie. En charmante compagnie. .
- Dépose-moi là ça va aller ! déclara-t-il brusquement.
Doug s'étonna du ton abrupt de sa voix. Il suivit le regard décontenancé de son copilote et vit sa petite-amie au bras d'un jeune homme. La proximité dont ils faisaient preuve ne laissait pas vraiment de place au doute quand à la nature de leur relation.
Il se gara et sortit du véhicule.
Jack fut ramené à la réalité lorsqu'il entendit le claquement de la portière. Il assista avec effarement à la traversée du Shérif jusqu'au couple.
- Steffie, que fais-tu là ? interrogea Doug comme si de rien n'était.
La jeune femme à la mine radieuse, se décomposa.
- Doug ? Que fais-tu ici ?
- Qui est-ce mon cœur ? intervint l'inconnu, ce qui n'arrangea en rien l'affaire.
Ses craintes étant justifiées, le Shérif retourna à sa voiture en déclarant "On en discutera ce soir". Stoïque, il se réinstalla au siège conducteur, sous le regard inquiet de Jack.
- Doug…ça va aller ?
- Tu veux que je vienne te rechercher à quelle heure ?
- Je ne descend pas, je veux rester auprès de toi.
- Va t'amuser. Je dois aller travailler.
- Je m'inquiète pour toi.
- Il n'y a pas de quoi. Je vais très bien.
- Doug…
Le Shérif se retourna vers lui et déclara d'une voix douce et douloureuse "Jack s'il te plait"
- D'accord. Je rentrerai par mes propres moyens.
Le brun descendit du véhicule, non sans inquiétude.
XXX
A la nuit tombée, le Shérif rentra de son service. Il rencontra Jack dans la cuisine.
- Elle est là ?
- Dans le salon.
Doug rejoignit la jeune femme. Lorsqu'elle le vit, elle se leva prestement du canapé.
- Doug, je vais tout t'expliquer !
- Est-il ton amant ?
- Oui…mais ce n'est qu'une question de sexe ! Rien d'autre. C'est avec toi que j'aime être, discuter. Que j'aime.
- Mais pour le sexe tu as besoin d'être avec lui…
- Oui...répondit-elle péniblement. Mais comprends-moi tu ne me fais presque jamais l'amour ! Cela te convient très bien mais moi j'ai besoin de plus ! De passion ! Par moment j'ai l'impression que tu ne me désires pas vraiment…
- Tu sais pertinemment que c'est faux.
- Je ne crois pas..
- Quand tu rentrais si tard, était-ce parce que tu étais avec lui ?
Après une longue hésitation, elle décida de lui répondre honnêtement, lui mentir ne ferait qu'empirer les choses.
- Oui…
- Cela me suffit. Ramasse tes affaires ordonna-t-il très clairement.
- Doug….
Il l'ignora et se rendit dans l'arrière cour. Il digérait très mal ce que venait de lui dire la jeune femme. Plus que l'infidélité en elle-même, c'est le fait d'avoir été critiqué sur sa capacité à satisfaire une femme sexuellement. Il avait l'impression d'avoir été insulté dans sa masculinité.
Un peu plus tard dans la soirée, Jack le retrouva. L'étudiant déposa une couverture sur ses épaules.
- Elle est partie ? Interrogea Doug.
- Oui..
- Tu as entendu ?
- Oui..
Doug soupira. Comme tous les hommes il n'aimait pas être diminué sexuellement devant un autre homme.
- Viens manger suggéra Jack.
Les jours qui suivirent, le moral n'y était toujours pas mais Jack faisait tout ce qui était en son pouvoir pour lui changer les idées. Il se montrait des plus inventifs pour l'amener à rire, en exécutant toutes sortes de pitreries. Ils se promenaient souvent le long de cette plage que Doug lui avait fait découvrir. Jack essayait même de l'initier aux joies de la cuisine, n'étant lui-même pas très doué.
- Où as-tu appris à faire tout ça ? demanda subitement le Shérif alors qu'ils étaient sommairement assis sur le bitume de l'arrière cour.
Ils buvaient des bières en appréciant la vue du ciel étoilé.
- Quoi donc ?
- Je ne te connaissais pas si exalté.. Un peu plus et j'aurais eu l'impression que Pacey avait investi ton corps.
- C'est parce que je me suis beaucoup inspiré de lui avoua Jack. Comme ces derniers temps tu n'étais pas dans ton assiette... je me suis demandé ce qui serait le plus approprié pour t'aérer la tête…
- Et tu as tout naturellement pensé à lui..constata Doug, non sans une pointe d'amertume cachée au plus profond de son cœur.
- Oui...Quand je ne vais pas bien, c'est lui qui sait le mieux me remonter le moral. Je voulais t'être du même secours.. Bien sûr je ne lui arriverais jamais à la cheville en ce qui concerne les blagues mais..
Le Shérif apposa sa main sur la sienne. Naturellement et sans aucune arrière pensée, cependant ce geste suffit pour effilocher le peu d'assurance qu'affichait Jack à cet instant.
- Merci. C'est très gentil à toi.
Le regard intense qu'il lui lançait acheva de le mettre mal à l'aise.
- Oh mais c'est..tout naturel se défendit Jack qui voulait à tout prix cesser cette intimité des plus embarrassantes. Il voulut retirer discrètement sa main mais Doug la saisit davantage.
- Toi-même tu souffres d'une séparation et pourtant tu as mis de côté tes problèmes personnels pour essayer de m'aider. Personne n'avait jamais fait ça pour moi continua-t-il sans sembler s'apercevoir de l'intimité équivoque dans laquelle il les plongeait.
- Pacey aurait certainement fait la même chose.
- Pacey est mon frère.
- Il est comme un frère pour moi.. Ce qui signifie qu'indirectement tu es mon frère aussi.
Jack avait formulé cette phrase sans réfléchir, comme une échappatoire.
- Toi et moi serions des frères, c'est possible ? questionna Doug qui n'avait jamais envisagé les choses sous cet angle.
- Oui. Je crois.
Ils s'observèrent, satisfaits de ce mot pour définir leur nouvelle proximité sans en comprendre la réelle signification.
- Parfait ! Nous sommes donc tous frères ! s'exclama une voix enjouée et ironique derrière eux.
Les deux hommes se retournèrent d'un même mouvement, ils reconnurent sans difficulté Pacey Witter.
- Petit frère ! Qu'est-ce que tu fais là ?
- Merci de l'accueil ! Maintenant que tu m'as remplacé par Jack, tu n'as même plus envie de voir ton frangin biologique ?! Oh, mais si vous préférez rester entre vous, je vais de ce pas me rendre chez les Potter qui se feront une joie de m'accueillir en leur demeure, se plaignit Pacey en feignant de faire demi-tour.
L'étreinte chaleureuse de Doug l'en dissuada.
- Cesse de dire n'importe quoi ! Tu seras toujours le bienvenu ici ! Il le serra un peu plus fort. Tu m'as manqué tu sais.
- Douggie deviendrai-tu sentimental ?
- Cesse de te moquer de moi !
- Oh mais je ne moque pas, je constate avec une joie non dissimulée que notre cher Jack à une heureuse influence sur toi. Jack tu peux passer ta vie dans cette maison si le cœur t'en dit ! Je te rémunérerais dit-il en adressant un clin d'œil complice à son vieil ami dont le sourire s'affichait déjà.
- As-tu mangé ? s'informa Doug
- Non et je dois dire que je meurs de faim.
- Je vais te trouver quelque chose à grignoter.
- Il reste du gratin, il suffit de réchauffer intervint Jack.
Le Shérif alla suivre ses instructions. Pendant ce temps-là Pacey profita de ce tête à tête avec Jack pour le "cuisiner".
- Je pars quelques années et voilà qu'on me remplace déjà ! Je perds un frère et un meilleur ami en un claquement de doigts.
- Tu ne perds rien du tout Pacey ! C'était juste une façon de parler.
- Ça n'avait pas l'air d'être des paroles en l'air pourtant.
- Deviendrai-tu jaloux ? le nargua Jack.
- Légèrement, je n'aime pas devenir transparent.
- Et si tu venais m'embrasser au lieu de dire des bêtises !
- Je désespérai de te l'entendre dire McPhee.
Les deux hommes s'étreignirent chaleureusement . Pacey enfouit son visage dans la nuque de son ami et prit une profonde inspiration. Comme il était bon de se retrouver parmi les siens !
- Dis-donc tu n'aurais pas changé de parfum ?
- C'est exact. Quelle perspicacité !
Pacey relâcha son embrassade pour le regarder droit dans les yeux, les paupières plissées et soupçonneuses.
- Tu ne chercherais pas à séduire un homme par hasard ?
- Dans quel but alors que j'ai l'homme idéal en face de moi ? répondit Jack avec un air de repentir.
- Qui est-ce ? Avec qui oses-tu me tromper !
- Parce que nous sommes amants maintenant ?
- Depuis que tu m'as emmené dans ce bar j'ai eu comme une révélation.
- Une révélation ?
- Oui certains voient des anges avec une petite auréole sur la tête, moi j'ai vu Jack McPhee.
- ça y est tu as fini de dire des bêtises pour la journée ?
- Je crois bien que mon quota est assuré.
Ils se lâchèrent enfin et prirent conscience qu'ils étaient observés. Pacey se retourna vers son frère.
- Qu'y a-t-il Douggie ? Tu es jaloux ?
- Justement non, j'étais en train de me dire à l'instant "Dieu merci je suis son frère il ne peut pas se permettre ce genre d'idioties avec moi".
- Oh mais je ne pensais pas à moi comme partenaire.
Doug glissa son regard sur Jack qui le regarda également. Puis, il esquissa un grand sourire.
- Et si nous passions à la cuisine ! Tu me raconteras ta vie là-bas.
Pacey enfournait de grandes cuillérées de nourriture sous l'œil scrutateur de ses hôtes, ce qui perturba quelque peu sa dégustation.
- Qu'y-a-t-il ? Vous discutiez si bien il y cinq minutes, reprenez là où vous en étiez !
- …
- A moins que je vous ai interrompu dans un grand moment d'intimité..
- Pas du tout ! rétorqua le Shérif, Jack et moi avions terminé. N'est-ce pas ? ajouta-t-il en cherchant l'appui du brun.
- Euh...Oui, nous allions rentrer de toute façon.
Pacey s'amusait beaucoup de la gêne palpable qui émanait des deux hommes. Décidemment, il avait bien fait de revenir !
Doug reprit ses réflexes naturels d'officier de l'ordre, en entamant un interrogatoire bien en règle.
- Tu comptes rester combien de temps ?
- Oh une semaine ou deux. Cette cohabitation à trois va être passionnante ! s'exclama-t-il avec un peu trop d'enthousiasme.
Pour une raison indéfinissable Jack se sentait mal à l'aise face à Pacey, à cause du rapprochement qui s'était opéré entre Doug et lui. Il proposa d'aller monter les valises du citadin à l'étage pour se soustraire de l'attention envahissante du roux.
- Je monte ça dans la chambre d'ami.
- Au fait tu dors où Jack ? Avec Douggie ? demanda Pacey, le plus naturellement du monde.
- … Non, je dormais dans la chambre que tu vas occuper… Je vais prendre le canapé.
- Fais pas ta mijorée, tu vas partager le lit avec moi. Y'a bien assez de place pour nous deux.
- Ok.
- ça ne te dérange pas Douggie ? se renseigna Pacey, en rejetant la tête en arrière pour dévisager son frère.
- Bien sûr que non, répondit ce dernier, pinçant.
Il soupçonnait son petit-frère de jouer l'idiot pour mettre ses nerfs à rude épreuve. Il profita de l'absence momentanée de McPhee pour vérifier cette croyance.
- Tu n'as pas bientôt fini tous ces sous-entendus qui ne font rire que toi. Je pensais que la vie active aurait eu un impact positif sur toi mais je constate que tu es resté le même troublion.
- Que veux-tu, c'est profondément enraciné au fond de moi. Et puis, face à autant de tension sexuelle, je ne pouvais que me laisser tenter.
Doug faillit s'étranger d'indignation.
- Il n'y a aucune tension sexuelle !
- Rappelles-moi l'âge que tu as ? La quarantaine. Tu n'en as pas assez de te cacher de toi-même. Regarde Jack, il est gay et il s'en sort très bien. Il n'est pas plus heureux ou malheureux qu'un autre.
- Je te le répète, je ne suis pas gay.
Pacey se débarrassa de son assiette et de ses couverts dans l'évier. Il passa silencieusement aux côtés de Doug puis ancra son regard dans le sien.
- Je dis ça pour ton bien grand frère. J'espère te voir un jour complètement épanoui dit-il avec un sérieux désarmant.
Doug n'eut pas le temps de répondre à cette offensive tant la situation le déstabilisait. Il avait un mauvais pressentiment. Très mauvais pressentiment. Quelque chose allait se produire et il n'était pas certain de pouvoir le gérer.
Lorsque le moment fut venu de se coucher, Pacey ne résista pas à l'envie de lancer une dernière petite boutade à son meilleur ami qui tentait de trouver la position idéale pour s'endormir.
- Bonne nuit Jack. Surtout ne va pas me confondre avec mon frère dans ton sommeil. Et évite de susurrer son nom lorsque tu rêveras de lui.
- Bonne nuit Pacey ! s'exclama Jack, en soupirant.
Cette dernière remarque acheva de l'agacer. Il resta les yeux bien grands ouverts un long moment. En même pas l'espace de cinq minutes, Pacey s'endormi à poings fermés. Jack se sentit enfin libre, épargné de tout commentaire ou regard en coin déplacé sur la relation qu'il entretenait avec Doug.
Il soupira une nouvelle fois. Pacey pouvait être si...enquiquinant ! Le brun adorait pourtant la présence de son meilleur ami mais pourquoi agissait-il toujours comme ça ? Il était évident que cette attitude avait généré un malaise entre le Shérif et lui. Ce que n'avait surtout pas voulu Jack.
- Bon sang Pacey...
Il se retourna encore et encore dans le lit. Il repensa au regard troublé que Doug lui avait lancé lorsque Pacey avait insinué qu'il pouvait être jaloux. Il avait brisé leur impression agréable d'être ensemble.
Pourquoi Pacey avait-il fait ça ?
N'y tenant plus, happé par la frustration, Jack quitta la chambre pour aller s'aérer l'esprit dans la cuisine. Un endroit où il se saurait seul. Lorsqu'il arriva sur place, il se rendit compte qu'il n'était pas le seul à avoir eu cette idée. Doug buvait un verre de lait, debout à côté du frigo entrouvert. Il portait un t-shirt et un short. Jack lui ne portait qu'un boxer et un marcel qui mettaient bien en valeur ses formes. S'il avait su, il aurait pris la peine de prendre une robe de chambre.
Ils se dévisagèrent étonnés de se revoir aussi vite. La tenue de Jack n'échappa pas au regard de Doug.
- Toi non plus tu ne dors pas ? déclara alors Jack pour briser le silence.
- La journée a été particulièrement riche en émotions. J'avais besoin d'un moment de solitude.
Jack s'apprêta à ouvrir la bouche mais Doug le devança.
- Mais je suis heureux de le partager avec toi. Tu peux rester.
- Merci fit simplement Jack.
Il tira une chaise et s'y installa pour interrompre le spectacle qu'offrait sa tenue.
- Et toi ? Pourquoi tu ne dors pas ?
- Pacey et son comportement.
- Je vois.. Je trouve aussi qu'il dépasse les limites mais il a toujours été comme ça. Taquin. Provocateur. Ça fait parti de sa nature. C'est sa façon à lui d'aimer.
- Je sais bien mais..
Jack se leva brusquement de sa chaise pour faire face au Shérif.
- Une amitié vient de naitre entre nous, je n'ai pas envie que Pacey vienne tout gâcher parce qu'il a trouvé une source d'amusement à insinuer des choses entre nous. J'ai beau être gay, je ne saute pas sur tout ce qui bouge. Tu n'as rien à craindre de moi.
- Je n'ai aucun doute là-dessus Jack. Je t'avoue que moi aussi ce petit jeu m'agace..mais ça ne changera rien entre nous. Te voilà rassuré ?
- Oui…
Mais malgré les propos de Doug qui se voulaient rassurants, Jack n'était pas encore apaisé. Il savait que Pacey ne lâcherait pas le morceau de si tôt, et il avait bien peur que ça finisse par avoir des répercussions, malgré les dires du plus âgé.
- J'ai une idée ! proposa soudainement Doug. Et si on le prenait à son propre jeu ?
- C’est-à-dire ?
- Pacey prend plaisir à insinuer de l'ambiguïté dans notre relation dans l'unique but de nous voir mal à l'aise. Mais si cette ambiguïté c'est nous qui la créons et que nous donnons l'impression d'être à l'aise avec ça, il n'y trouvera plus rien d'amusant et il s'arrêtera de lui-même.
- Tu es sûr ? questionna Jack qui n'était pas franchement emballé par cette perspective.
- Oui, à moins que ça ne te pose un problème ?
- Non, c'est juste que je ne sais pas trop ce que cela signifie d'instaurer de l'ambiguité..
- Par des petits gestes d'affections, jusqu'à la limite du possible bien évidemment.
Jack se demandait si cela voulait dire aller jusqu'à devoir s'embrasser.
- Voyons jusqu'où notre imagination nous mène déclara Doug. J'ai bien envie de clouer le bec à ce petit freluquet.
- D'accord. Pacey a voulu jouer, alors jouons et nous verrons qui sera bien attrapé.
- Tout à fait. Bonne nuit
mon ange.
Doug affichait un sourire de victoire, sûr de réussir à battre à plate couture son rejeton de petit-frère. Sachant qu'il ne s'agissait que d'une farce, Jack se détendit enfin et rit de sa remarque.
- A demain
Douggie.