Merci beaucoup
Voici maintenant de quoi entrer dans le vif du sujet
Je tiens à préciser que, bien qu'adorant Sherlock depuis la première heure, c'est ma première fiction sur ce fandom. Si je me lance aussi tard c'est parce que pour moi, traiter les personnages de cette série doit être fait avec un soin tout particulier pour éviter le OOC mais... Flûte ! Les fictions c'est aussi fait pour se lancer. Bref, étant donné que 'est ma première histoire, je suis avide de commentaires et d'avis
Sur ce, je vous laisse à la lecture.
***
Chapitre 1
- John ?
Désorienté, il finit par tourner son regard vide vers sa psychothérapeute dont la mine soucieuse et condescendante ne variait pas d'une visite à l'autre.
- Pardon, vous disiez ?
- Êtes-vous sûr d'avoir bien dormi cette nuit ?
John retint avec grand peine un petit rire sarcastique. Cela se voyait donc tant que cela ?
Elle le fixa sans ciller, attendant une réponse qu'il ne donna pas.
- Encore un rêve, n'est-ce pas ?
John hocha la tête silencieusement.
- John, cela fait deux ans et demi.
- Deux ans et huit mois.
Elle soupira tristement avant d'ancrer de nouveau son regard compatissant dans le sien.
- Oui, et depuis lors, j'ai l'impression que les choses ne s'améliorent pas. Vous refusez de faire votre deuil, John.
Cette fois, il ne pût retenir un rictus déformé par une sourde douleur qu'il préférait garder enfouie, espérant par là diffuser le désespoir prêt à le submerger comme à chaque lendemain de crise, ainsi que cette colère qu'il savait injuste contre cette femme mais qu'il ne pouvait faire disparaître.
Elle ne comprenait vraiment rien. Ni elle, ni les autres. Croyait-elle seulement une seule seconde que ses cauchemars n'apparaissaient que par la faute d'un éventuel déni ? Aucune personne ne semblait être capable de voir en lui. Et cela le rassurait en même temps que ça le rendait malade.
- J'attends toujours que vous le disiez John, vous savez.
- Quoi donc ?
- Ce que vous vouliez lui dire, ce jour là. Les choses que vous avez tues.
Le médecin, auparavant tendu, se sentit soudain vidé de toute force, comme rongé par un poison annihilant toute énergie vitale. Ses yeux se voilèrent tandis qu'ils fuyaient une fois de plus ceux de la consultante.
- Je ne peux pas. Je ne peux plus les dire.
- Pourquoi, John ? Pourquoi ce silence ?
Nouveau sourire de façade. Les muscles de son visage lui faisaient mal.
Elle ne comprenait pas. Même s'il trouvait la force de commencer, elle ne comprendrait toujours pas.
Cela serait songer, ne serait-ce qu'une seconde, une seconde de trop, à un chemin qui désormais lui était barré. Tenter de réemprunter cette route équivaudrait à se jeter dans un gouffre dont il n'était pas sûr de pouvoir s'extirper. Il était certain que cela ne pourrait que le rendre fou.
- Parce que ça me tue.
* * *
Au début, cela ne partait de rien. Des inscriptions minuscules dispersées au hasard sur des affiches déchirées et disséminées aux quatre coins de la ville, auxquelles personne ne prêtait attention. Puis les premiers graffitis apparurent, recouvrant totalement lesdites affiches, ainsi que les murs. Des tracts d'amateurs, accrochés aux poteaux et aux bancs... Tous portant le même message.
I believe in Sherlock Holmes.
John avait été surpris, presque choqué, d'apprendre qu'il n'était pas le seul à ne pas douter une seule seconde. Sceptique ensuite. À quoi cela servait, au final ? Cela ne le ramènerait pas. Trop tard pour ça.
Puis, cinq mois plus tôt, un essor improbable s'empara de chaque recoin de Londres. Ce qui n'était à la base qu'un simple balbutiement de quelques fans isolés était devenu un mouvement de protestation silencieux mais déterminé et organisé. Le Mouvement, comme ils se nommaient eux-même sur Internet.
C'était fou. Complètement improbable. Mais c'était bien là. Et John s'était peu à peu senti fier, presque réconforté en un sens, de penser qu'il ne serait plus le seul à y croire. À savoir. Mais en contrepartie, sa solitude n'en devenait que plus amère. À chaque fois qu'il passait devant une de ces fresques clandestines, il ne pouvait ignorer la cassure qu'il ressentait alors au plus profond de lui tandis qu'il poursuivait son errance, regard baissé et canne à la main. Car depuis deux ans et huit mois, sa claudication était revenue.
Tu me trouverais pitoyable, Sherlock. Heureux que tune vois pas ça.C'était faux. Affreusement faux. Il aurait tout donné pour qu'il revienne et lui balance sa décrépitude au visage.
* * *
Cela commença discrètement, deux ans et dix mois après sa mort. Un jeune homme de trente-trois ans, retrouvé mort, la gorge tranchée, sa dépouille laissée sous un pont de banlieue mal famée. Simple règlement de compte, sans doute. Les médias en parlèrent à peine.
Deux semaines plus tard, deux nouveaux corps, reposant dans un endroit semblable. Deux jeunes filles, âgées de vingt-deux et vingt-quatre ans, assassinées par balle, en plein cœur. Cette fois-ci, la presse s'emporta, jouant une énième fois la carte de l'insécurité pour distraire les foules qui aimaient se complaire dans la crainte et l'indignation envers cette société dangereuse à laquelle elles appartenaient.
Cloîtré à Baker Street lorsqu'il ne travaillait pas par dépit à l’hôpital, John n'y prêta aucune attention particulière. Lire les journaux faisait désormais remonter une bile âcre dans sa bouche.
Puis l'affaire s'emballa. Trois jour à peine après la disparition des deux étudiantes, une femme de trente-cinq ans apparemment issue d'un milieu aisé fut retrouvée dans un caniveau, le front marqué par un impact de balle de petit calibre. Un vague de panique montait lentement au sein de l'inconscient collectif face à cette série de meurtres froids et d'une précision implacable contre laquelle la police se montrait impuissante. Puis la fascination morbide de la population, pour ce qui n'était au départ qu'une suite de faits divers, se mua en horreur sourde quand une cinquième victime fut trouvée roulée contre un mur dans la même zone urbaine. Un gamin âgé d'à peine dix-sept ans, le foie percé par une de ces mêmes balles, laissé agonisant au creux de cette ruelle et baignant dans la mare de son propre sang, avec à ses pieds un paquet de tracts portant tous la même inscription. Identique à celle qui se répandait sur tous les murs de Londres.
John recommença à lire les journaux.
* * *
Depuis les terribles événements datant de presque trois ans, le temps semblait s'être écoulé de manière tout à fait particulière, voire absurde. Chaque jour lui paraissait s'étirer indéfiniment, aspirant hors de lui toute énergie et envie d’interagir avec le monde. Et pourtant, lorsqu'il regardait en arrière – et Dieu, cela lui arrivait si souvent – rien n'avait changé autour de lui, comme si tout cela ne s'était produit que la veille. L'appartement demeurait presque le même, par sa propre volonté, devenant peu à peu une sorte de musée dont lui et Mrs Hudson étaient les seuls visiteurs autorisés, comme si Sherlock leur en avait confié la garde avant de partir.
Ce qui était idiot. Complètement idiot. Sherlock ne leur avait rien confié, il n'était même pas propriétaire de ces lieux, il était juste... Parti. La Terre tournait encore, mais sans lui. C'était juste anormal. Sherlock avait toujours été une certitude ancrée dans le monde, un point inflexible. Savoir que la vie s'écoulait désormais sans cette présence lui renvoyait l'image d'un monde complètement étranger. John avait bien tenté de s'accrocher à un quelconque substitut mais sans succès. Les gens, les femmes, le travail... Rien. Tout allait trop vite. Il restait coincé dans ce bout de passé alors que les autres allaient de l'avant. Des choses changeaient tandis que d'autres se figeaient à jamais. Baker Street était devenu son ancre dans un océan en perpétuelle mouvance sous l'action chaotique de ses courants. Chaque détail de chaque pièce de l'appartement lui crevait le cœur, mais c'était le prix à payer pour ne pas perdre définitivement pied. Il y avait des jours où cela le révulsait. Des jours où la colère prenait le pas sur la souffrance. Contre lui-même, contre les autres, contre Sherlock. En ces instants, il ne pouvait que s'enfermer dans sa chambre pour ne ressortir que lorsque la vue du salon redevenait soutenable.
Te rends-tu compte de ce que tu as fait, Sherlock ?Et après la rage venait le pire. Ce sentiment insurmontable qui le brisait durant chacun de ses cauchemars. Ce qui le tenaillait quand il se revoyait avoir cette dernière conversation téléphonique.
La culpabilité.
J'aurais dû savoir. J'aurais dû savoir ce qui est passé par ta maudite tête. Parce qu'il n'y a toujours eu que moi pour te comprendre un peu mieux que les autres. Et j'aurais dû empêcher ça.John était assis dans son fauteuil alors que ces sombres pensées s’immisçaient sournoisement dans son esprit alangui. Son regard égaré faisait face à cette autre chaise, désespérément vide.
Un klaxon de taxi retentit à l'extérieur. Il ferma les yeux.
J'aimerais pouvoir arrêter tout ça.Ses paupières se soulevèrent. Rien n'avait bougé.
* * *
Le bruit d'un pas léger mais lent dans les escaliers brisa brusquement le silence presque mortuaire qui régnait dans la pièce. Mrs Hudson venait d'apparaître sur le seuil.
- John, l'inspecteur Lestrade est là, je peux... ?
- Bien sûr, faites-le monter.
Elle n'eut pas le temps de se retourner que la haute silhouette du policier émergeait déjà en haut des marches. L'ex-soldat avait déjà reçu plusieurs visites de Lestrade au cours des mois passés. Régulières d'abord, comme si celui-ci craignait de voir le médecin s'effondrer à tout instant. Puis ses venues s'étaient espacées, tout comme celles de Molly. Quant à Mycroft... Et bien, la situation était un peu particulière...
- John.
- Bonjour, Greg.
- Comment allez-vous ?
John se leva pour serrer la main de l'inspecteur qui malgré les épreuves conservaient une poigne ferme. Cependant, les yeux de l'agent trahissaient les obstacles qu'avait posés devant lui sa hiérarchie depuis le fiasco de Scotland Yard au cour de l'affaire du « faux génie ». Il n'avait pu conserver son poste que grâce à une intervention providentielle du gouvernement sur les hautes sphères de la police. Bien que n'en ayant jamais obtenu la confirmation, les deux hommes avaient toujours suspecté l'influence de l'aîné des Holmes. Lestrade gardait sa position, mais voyait sa réputation ruinée. Sans compter son récent divorce...
Pour John, cela ne rendait son regard compatissant, presque empli de pitié, que plus insupportable.
- Aussi bien que possible, finit-il par répondre. Et vous ?
- Comme d'habitude.
Bien sûr. Ses confrères devaient lui mener la vie dure.
- Je vous offre quelque chose à boire ?
- Non merci, je ne peux pas rester longtemps, nous sommes sur une affaire pressante.
- Ah, l'affaire des meurtres de banlieue en série ?
- C'est exact.
- L'enquête avance ?
Lestrade eut un regard embarrassé.
- Hélas non. J'ai rarement vu une chose pareille. Aucune de nos pistes ne débouchent.
John hocha la tête, préférant ne pas creuser la question. Il savait très bien où la conversation risquait de dériver s'ils évoquaient encore le manque de progression de la police.
- Qu'est-ce qui vous amène dans ce cas ? J'imagine que ce n'est pas pour demander mon avis professionnel.
- Non, en effet.
L'homme aux cheveux gris eut un sourire amer, puis les traits de son visage se durcirent subitement. Les instincts militaires enfouis du médecin lui soufflèrent qu'il avait à présent affaire au policier en devoir, et non à l'ami de Scotland Yard.
- Je suis ici pour vous avertir, John.
- M'avertir ?
Un voile d'inquiétude assombrit le regard de Lestrade alors que l'incompréhension se peignait sur le visage fatigué du docteur.
- Avez-vous lu les journaux concernant ces cinq victimes que l'on a retrouvées dans un même secteur ?
- Quelques-uns... Pourquoi ?
- Et bien, à première vue, rien ne relie les victimes. Âges et sexes différents, issues de milieux divers, aucune parenté, aucun lien privé ou même professionnel... Rien. Si ce n'est une chose, qui n'était pas forcément claire jusqu'à présent, et dont je ne pouvais être sûr, mais qui se confirme avec le dernier meurtre.
- Le garçon de dix-sept ans ?
- Exact. Vous savez ce qu'on a retrouvé avec lui ?
Oh que oui, il le savait. John sentit son estomac se contracter sans être vraiment conscient du malaise qui s'emparait doucement de lui.
- Des affiches du Mouvement ?
Lestrade opina gravement.
- J'ai creusé ce côté-là, et toutes les victimes étaient des supporters plus ou moins fervents du Mouvement. Personne ne veut y accorder un réel crédit au Yard, mais je suis formel là-dessus.
- Et quel rapport y a-t-il avec moi ?
- Beaucoup de choses, répondit l'inspecteur. John, je suppose que vous ne faîtes pas vous même partie de ces gangs qui taguent les murs au milieu de la nuit...
- Non, en effet.
- … Mais vous êtes pourtant au cœur du Mouvement.
- Croyez-moi, Greg, une partie de moi aimerait sans doute aller coller des tracts partout pour que ce foutu pays ouvre les yeux, mais je ne suis...
- Vous ne saisissez pas. Je ne vous parle pas uniquement de tracts ou de peinture. Il s'agit de vous, le Docteur Watson, et de Sherlock Holmes. Si ce Mouvement existe aujourd'hui, c'est bien parce que vous étiez le premier à vous exprimer.
- Pardon ? J'ai refusé toutes les interviews possibles, je n'ai fait que poster un dernier article sur mon blog, et...
- Précisément. Votre blog est encore lu par des milliers de personnes. Des fans de la première heure. Indirectement, je suis persuadé que vous êtes l'influence principale de cet engouement. Avez-vous remarqué qu'il n'y avait pas écris que « I believe in Sherlock » dans les rues ? Il y a aussi votre nom.
- J'ai vu.
Mais cela lui importait peu. Ce n'était pas son nom qui comptait.
- Ce que je veux dire, John, reprit le détective officiel, c'est que toutes ces personnes n'avaient que cette chose en commun, et qu'elles se sont donc sans doute faites tuer pour ça. Qui que soit ce malade, il les a tuées parce qu'ils défendaient tous l'image de Sherlock. Et même si vous n'en avez pas conscience, vous êtes un pilier du Mouvement. Si ce type a décidé d'en supprimer toute trace chaque fois qu'il en croise une, je pense que vous êtes potentiellement en danger.
- Pourquoi un tueur en série viendrait jusqu'ici pour me faire la peau ?
Nulle peur dans la voix de John. Ce qui prédominait n'était pour l'instant qu'incompréhension. Il existait à peine désormais, qui pourrait bien songer à supprimer une ombre ?
- John, j'ai vu beaucoup de meurtres au cours de ma carrière. Mais c'est la première fois que je vois une série d'assassinats qui s'apparentent plus à des exécutions qu'à une vengeance banale. La gorge de la première victime a été tranchée d'un coup net, sans tremblements. Et les blessures par balle des autres étaient précises, bien trop précises. Ce type a fait ça avec un sang froid incroyable, il ne plaisante pas. Je n'ai aucune preuve de ce que j'avance, mais si je suis venu, c'est pour vous dire ceci : faites attention.
John ne répondit pas immédiatement, les mots de Lestrade s'entrechoquant dans son esprit, encore surpris d'avoir affaire à une telle visite. Lui, potentiellement en danger de mort ? Absurde. Tout le monde semblait si inquiet à son sujet. Lestrade, Molly, Mrs Hudson et même possiblement Mycroft. Toute cette attention aurait dû lui réchauffer le cœur, cela ne faisait que rajouter du sel sur ses plaies.
- Et si vous sentez que quelque chose cloche, n'hésitez pas, ajouta le policier avec cet éternel regard concerné.
John eut un sourire désabusé accompagné d'un haussement d'épaule.
- Merci pour l'avertissement, je m'en souviendrai. Vraiment. Mais vous savez, il ne m'arrive jamais rien.
Plus maintenant.- Et je n'ai pas l'intention d'aller traîner dans les ruelles sombres, tard la nuit, ajouta-t-il.
- Je m'en doute. Évitez juste... Et bien, d'aller repeindre les murs si l'envie vous en prenait.
Lestrade jeta alors un coup d’œil circulaire autour de lui, se rendant soudain compte que presque rien n'avait changé depuis sa dernière visite, remontant pourtant à plusieurs mois.
- Bon... Je ferais mieux de vous laisser, dit-il finalement en faisant un pas en arrière.
- Greg, avant que vous partiez...
- Hum ?
- Je ne vous l'ai jamais vraiment demandé, mais... Qu'est-ce que vous en pensez, du Mouvement ?
Il sembla surpris par la question.
- Et bien, en tant que flic, ça m'ennuie franchement de voir tous ces tags. Qui plus est, avec ce malade...
- Ce n'est pas ce que je vous ai demandé.
Les deux hommes marquèrent une pause durant laquelle l'inspecteur balaya une nouvelle fois la pièce du regard, comme s'ils se remémorait quelque souvenir lointain.
- Je pense... Que c'est bien. Vraiment.
John sourit faiblement.
- Merci.
- Ne soyez pas ridicule.
Le médecin eut un petit rire qu'il destinait plus à lui-même qu'à son hôte.
- Portez-vous bien, John.
Je ne fais que ça.* * *
Et oui, je ne pouvais pas résister à montrer notre cher Greg qui doit bien galérer aussi de son côté... Et OUI, pour moi, le Mouvement #BelieveInSherlock devrait devenir un élément de la série !
Avis ?