Un tit os écrit hier après avoir appris que Rafachou serait pas à Wimbly, histoire d'essayer de me dé-déprimer ^^ Bon, ça vaut ce que ça vaut... Attention guimauve. Je les connais pas, je raconte pas leur vie, je gagne pas d'argent avec ça.
Ma vie
C'est fait. Je l'ai dit. Je ne participerais pas à Wimbledon cette année. Mon cœur se serre et mon corps est secoué de sanglots. Ce tournoi qui est un des plus importants pour moi, je dois l'abandonner. Mon rêve, ce pour quoi j'ai tant travaillé, fait tant de sacrifices, s'éloigne doucement. Et je ne peux rien y faire. Je ne sais même pas si je pourrai rejouer un jour. J'ai tellement peur. C'est tout ce que j'aime faire. C'est toute ma vie. Qu'est-ce que je ferais si je ne peux plus être sur le terrain? La tension, l'adrénaline, la concentration, l'effort, les cris du public, les défaites, les victoires, c'est tout ce qui a rythmé ma vie jusqu'ici. Qu'est-ce que je suis sans ça?
J'ai besoin de jouer! Ces derniers jours loin des courts ont été un enfer pour moi. Si les médecins ne m'avaient pas menacé en disant que si je jouais, j'aggraverais mon cas, je n'aurais pas pu résister au besoin de courir après la balle. Si je peine à tenir quelques jours sans le tennis, comment tenir le reste de ma vie?
J'avais tant de rêves. Les médecins ne m'ont pas dit d'arrêter, je vais seulement manquer ce tournoi et encore quelques uns ensuite peut-être. J'essaye de me rassurer, de me répéter cette phrase. Mais ça n'entre pas. Je suis terrorisé. Qui me dit qu'ils ne se trompent pas? Qui me dit que ça ne va pas s'aggraver? Qui me dit que mon dernier match de tournoi n'aura pas été une défaite contre un Suédois arrogant et manquant totalement de fair-play dont le public scandait le nom, se délectant comme des vautours de ma chute?
C'est ce qu'ils diront tous, demain. Je vois déjà leurs titres. Je vois déjà leurs articles, analysant tous mes plannings, tous mes matchs, tous mes faits et gestes, arguant que j'ai trop joué, poussé mon corps trop loin. Je les vois déjà m'enterrer, doutant de mon retour sur les courts ou voyant mes meilleurs jours derrière moi. En d'autres circonstances, cela m'aurait motivé à travailler encore plus pour leur prouver qu'ils ont tort, pour leur montrer que je suis là, quoi qu'ils disent, et que je peux faire de grandes choses. Mais ce soir je n'en ai pas la force.
J'ai besoin de me laisser aller. Les semaines depuis ma défaite à Roland-Garros ont été éprouvantes. J'ai enfoui toutes mes émotions au fond de moi pour lutter dans l'espoir de participer à ce tournoi. Aujourd'hui je sais que je ne le ferai pas. Ça me désole à un point que je ne pouvais imaginer. J'ai peur d'être en train de tout perdre, tout ce qui fait ma vie.
Des coups frappés à ma porte me tirent quelque peu de mes pensées, mais je ne réponds pas. Je veux être seul. Je ne veux pas qu'on me voit comme ça, je ne veux pas qu'on s'inquiète. Je vois déjà les regards remplis de pitié sur mon passage demain. Comme si ça allait m'aider. Laissez-moi sombrer, de toute façon vous oublierez mon nom le jour où je quitterai le circuit.
Les coups se font plus insistants, j'entends la voix de Feli m'ordonner d'ouvrir. Pour une fois, je bénis mon oncle de refuser que l'on dorme dans la même chambre. Je ne veux pas le voir. Je ne peux pas. Je sais qu'il est sincère, c'est probablement le seul qu'il l'est, mais je ne peux pas. Je ne veux pas voir son regard inquiet, je ne veux pas voir que ma tristesse lui fait mal. Ce soir j'ai le sentiment que je ne le mérite pas. Et bientôt je ne serai plus rien, je ne veux pas qu'il perde son temps avec moi.
Le silence revient. Apparemment il a abandonné. Il m'a abandonné, comme ils m'abandonneront tous. Mon monde ne s'est pas encore écroulé, mais il commence à s'effriter. Mes rêves commencent à s'estomper, les doutes s'insinuent en moi.
La porte s'ouvre brusquement et se referme tout aussi violemment. Feliciano court vers la fenêtre ouverte mais un sanglot l'attire vers le lit où je suis toujours recroquevillé sur moi-même.
- Rafa! Rafa, bon sang, pourquoi tu n'as pas ouvert? - Je… Je ne voulais pas que tu t'inquiètes. - Rafa!
Il soupire. Mes yeux fixent toujours mes genoux, mais je sais que quand il prend ce ton-là il lève toujours les yeux au ciel. Il me sert fort contre lui.
- Calme-toi, amor mio, calme-toi. Je suis là. Je serai toujours là.
Il me berce doucement, je m'abandonne à ses bras. Sa voix douce et son étreinte ont toujours réussi à me réconforter et ce soir ne fait pas exception. Mes sanglots diminuent.
- Tu seras là même quand je ne serai plus qu'un tas de chair inutile? - Rafa, tu ne seras jamais un tas de chair inutile. Tu seras toujours l'homme le plus merveilleux qui existe et celui que j'aime de toute mon âme.
Il saisit mon menton et lève délicatement ma tête pour saisir mon regard.
- Et je sais que tu n'as pas encore dit ton dernier mot. Tu guériras, tu travailleras, tu te battras, tu gagneras et tu leur montreras que le meilleur c'est toi.
Il m'embrasse tendrement et, l'espace d'un instant, j'oublie tout. Il n'y a plus de journalistes, de médecins, de douleurs dans mes genoux, de victoires ou de défaites. Il n'y a plus que ses lèvres, sa langue qui joue avec la mienne, son bras autour de ma taille, sa main sur ma joue. Lorsque nous nous séparons, il me sourit amoureusement et essuie délicatement mes larmes.
- Au fait, comment tu es entré? - J'ai fait un horrible chantage à une pauvre femme de chambre innocente. - Tu ne l'as pas trop terrorisée, j'espère. - Un peu, mais je crois qu'elle s'en remettra.
J'éclate de rire et nos regards se croisent. Je vois le voile d'anxiété et de tristesse qui couvrait ses yeux s'en aller. Je plonge dans ses iris bleus et m'y perds. Je peux y lire tant de tendresse et tant d'amour. Comment ai-je pu, ne serait-ce qu'une seconde, penser qu'il allait m'abandonner? Comment ai-je pu oublier à quel point il compte pour moi? J'ai laissé la peur m'envahir, mais je n'ai rien à craindre, car ma place sera toujours dans ses bras et avec lui je surmonterai toutes les épreuves que je devrai affronter. Arpenter les courts une raquette à la main, ce n'est pas ça ma vie. Ma vie, elle est là, dans ces prunelles azur qui m'ensorcellent. Je me battrai, j'irai voir les meilleurs médecins et je travaillerai dur. Peut-être que je rejouerai, ou peut-être pas. Mais quoi qu'il arrive, jamais je ne serai si bien que blotti contre lui, jamais l'amour du jeu ne surpassera mon amour pour lui, jamais une victoire ne sera plus belle que ce que nous partageons. Ma vie aura toujours un sens puisqu'il sera toujours là.
Fin
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Dernière édition par bethan le 26 Oct 2010 05:51, édité 1 fois.
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