Voici, presque en temps et en heure, le chapitre suivant de Miles Away. J'espère que les quelques spectatrices ayant vu Sherlock Holmes n'ont pas été déçues... et que la vision d'un Robert Downey menotté à un lit complètement nu ne hante pas trop leur nuit !
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Chapitre quatre -
Question de séduction.
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Londres, 7:35 PM.
Haletant, Robert se réveilla en sursaut. Transi de froid, il ferma les yeux et parvint difficilement à se calmer. Il sentit une sueur glaciale glisser le long de sa colonne et perler dans le bas de son dos, il ne bougea cependant pas, de peur de réveiller Jude. Peine perdue puisque celui-ci soupira et se retourna :
- Cela fait vingt minutes que je ne dors plus. Je me demandais d’où venait cette sensation de marteau-piqueur contre mon dos, ça a tout l’air d’être ton cœur. Quelque chose ne va pas ?
- Juste un mauvais rêve. Rien de bien méchant.
L’intonation de sa voix mentait, au moins autant que cette caresse fébrile dans ses cheveux blonds ou ces tremblements à peine perceptibles mais pourtant bien présents. Jude tâtonna jusqu’à poser sa main sur la joue de son ami :
- Tu mens très mal.
- Oui, je sais. Susan me le dit souvent. Répondit-il, gêné d’être pris sur le fait. Tu peux te rendormir, tout ira bien, ne t’inquiète pas pour moi.
Jude se retourna et se colla contre lui, sans se soucier de son avis. Il le prit dans ses bras, sans forcer l’étreinte. Robert se tendit soudainement avant de s’adoucir et de s’apaiser peu à peu. Il posa la tête contre l’épaule du benjamin. Durant ce moment d’une complicité assez fragile et délicate, l’anglais ne cessait d’entendre à nouveau les paroles de Susan lui avouant que sous une carapace joviale et forte, l’homme demeurait vulnérable. Le temps d’une respiration étrange, entre l’éclat de rire et les larmes, il ressentit pleinement les failles qui frappaient Robert. Ce souffle ne se brisa jamais, le brun se contenta de sourire, le visage contre la peau nue de son compagnon.
- Alors dis-moi, c’était quoi ce vilain cauchemar ?
- On n’est pas bien là ?
- Arrête donc de répondre aux questions par d’autres questions. Murmura Jude près de l’oreille de son ami, toujours aussi proche de lui.
Se rapprochant encore, le blond pouvait sentir le souffle chaud de l’homme sur son cou, ressentait un léger frisson à chaque fois que Robert clignait les yeux, battant ses cils contre sa joue. En temps normal, il aurait bondit sur sa proie, le dévorant de baiser aussi vorace que ses caresses qu’ils auraient voulues appuyées, rapides, efficaces. L’envie aurait sûrement eu raison de sa patience. Mais il fallait avouer que ce moment était loin d’être ordinaire, tout comme la personne dans son lit.
- Alors ? Qu’est-ce qui a bien pu emballer ton cœur comme ça ? J’aimerai bien en faire autant. Amorça-t-il, avec une pointe d’humour pour faire passer les choses plus facilement.
- Un rêve de- Des souvenirs de junkie, comme je les appelle. A une époque, j’avais tout. Le succès, des projets à en revendre, la reconnaissance du milieu, des dizaines de conquêtes dans mon lit, des chambres d’hôtel de luxe et les excès qui allaient avec. J’avais tout, et en même temps, je n’avais absolument rien. J’ai compris depuis que ce que j’ai de plus précieux, c’est mon fils, les quelques moments que je peux passer avec lui, ma femme, son sourire et sa manière très personnelle de m’aimer, des amis prêts à m’épauler pour me remettre dans le droit chemin, et un boulot qui me plait. Je n’ai pas prit dix ans, j’en ai prit trente depuis. J’ai des plaies tellement profondes qu’elles sont incurables, je peux juste prier de ne jamais retomber là-dedans. De ne plus jamais être… à moitié-mort. Je me suis juste souvenu de cette époque, voilà tout. Ca doit être les quelques doutes que j’ai en ce moment qui font ça.
- Les doutes ? Ceux que tu as à cause de nous ? Je veux dire, de moi. Si tu veux être rassuré, je te dirais juste que je ne te demanderai jamais de choisir entre ta vie, tes amis, ton couple et tout ce qui peut te tenir la tête hors de l’eau, et moi. Ce serait injuste, et complètement fou. Je ne veux que ton bonheur, après tout. Quelle heure est-il au fait ?
- Huit heures. T’as envie de bouger, toi ? Un cinéma, un bar, un restaurant ? Demanda Robert en s’étirant. On pourrait aussi se faire quelque chose, ici. Genre, se faire livrer un peu de bouffe asiatique, des pizzas et regarder des films depuis ton lit.
- On pourrait oui. On pourrait se mettre Kiss Kiss Bang Bang, j’aime vraiment bien l’acteur qui tourne dedans. Répondit-il sur un ton anodin. Il y a vraiment longtemps que je l’ai vu. Une semaine, je crois. Je ne m’en lasse pas, j’aimerai bien jouer le rôle de Val Kilmer un de ces jours.
Robert grimaça et le regarda, en fronçant les sourcils.
- J’espère sincèrement que tu embrasses mieux. C’était loin d’être agréable pour moi cette scène…
- Elle n’est pas censée l’être dans le film. Mais si, un jour, tu voulais faire un remake, je suis ton homme… au propre, comme au figuré. De toutes façons, c’est normal que ton premier baiser avec un mec te laisse un peu … dans le doute, c’est toujours ainsi.
- Les autres ne m’ont posé aucun problème, mais dis-moi… Tu as l’air d’en savoir un rayon sur le sujet ?
- Et toi, je ne serai donc pas ton premier ? On aurait donc encore des secrets l’un envers l’autre ?
Ils se regardèrent en riant, avant de décider conjointement de rester à la villa. Dépité, Robert se rendit compte que son mauvais rêve l’avait beaucoup plus perturbé qu’il ne le pensait : son dessus était aussi trempé que s’il était passé sous une de ces fameuses pluies londoniennes. Grelotant de froid, il demanda à Jude d’aller chercher un tee-shirt de rechange ; ce qu’il fit, demandant tout de même une récompense. Robert la lui accorda, sans même en prendre connaissance. Avec un sourire avide, il s’agenouilla sur le lit, entre les jambes de son ami et lui défit les boutons de sa chemise un à un, d’une infinie patience. Volontairement, il laissa par moment ses mains effleurer la peau imberbe. Il fit ensuite glisser patiemment le tissu le long des épaules musclées, se rassasiant de le voir bomber le torse pour l’enlever lui-même définitivement. Jude posa sa main sur son torse, laissa sa paume caresser cette peau qui frissonner à son contact jusqu’à la poser sur la joue de son ami, étendant son pouce pour le passer sur les lèvres de celui-ci. Il recula finalement, laissant l’américain particulièrement abasourdi.
- Cela me suffit amplement pour l’instant Je ne voulais rien de plus.
- J’ai cru que tu allais- Ton regard parle pour toi, même dans ces cas là. Sous-entendit Robert, faisant allusion au désir qui avait embrasé les yeux aciers quelques secondes auparavant.
- Je ne suis pas le genre d’homme qui te sautera dessus, sans t’avertir avant ou m’assurer que tu en es sûr. Je ne suis pas non plus celui qui te forcera à faire quelque chose si tu ne le souhaites pas.
Robert acquiesça avant d’enfiler son tee-shirt. Il avait hésité un instant avant de le mettre, mais choisit tout de même la sécurité : même si Jude ne profiterait jamais de lui, il ne servait à rien de tenter le diable et de compliquer la tâche de l’anglais en lui infligeant une telle provocation en pleine abstinence.
- Alors, ce film, on le met ?
Au bout d’une heure de film, l’incident – qui n’en était pas réellement un – était presque oublié. Au fur et à mesure de la soirée, l’ambiance était devenue innocente et bonne enfant. Dévorant les plats tièdes de nouilles trop grasses commandées chez le chinois, l’un des deux lançait parfois une remarque amusée sur l’origine douteuse de la viande tenue entre les deux baguettes. L’atmosphère était légère, au point de permettre quelques rapprochements sans trop inquiéter les deux hommes. La tête de Jude posée contre son épaule, Robert redouta néanmoins la fameuse scène évoquée plus tôt : il était évident qu’ils se sentirent tous les deux mal à l’aise lorsque les bouches des deux acteurs se scellèrent à l’écran.
- Tu es rouge vif, quelque chose ne va pas, Jude ?
- Déjà au lycée, quand j’allais voir un film avec une copine et que ce genre de scène passait, ça me mettait vraiment mal à l’aise…
L’américain n’était pas non plus au meilleur de sa forme quand le plan s’acheva enfin. Dans sa mémoire, le baiser n’était pas censé durer aussi longtemps.
- Et puis, qu’est-ce que tu faisais, tu l’emmenais chez toi ?
- Non, j’attendais toujours qu’elle le fasse. Répondit Jude, retrouvant un peu de contenance.
- Ah, je vois ! Tu étais le parfait playboy mais trop timide pour avoir du succès auprès des ados…
L’anglais s’indigna, en grossissant toute fois le trait.
- Oh ! Je n’ai jamais passé plus d’un mois de célibat entre quinze et vingt ans ! Monsieur était un tombeur, je présume… Le genre frimeur aux mains baladeuses, peut-être ? Celui qui faisait le bonheur des pom-pom girls dans les vestiaires ?
- Hm, non ! J’ai quitté l’école avant de profiter des dernières recrues… Je n’étais pas vraiment un tombeur. J’étais trop… bizarre. Elles me trouvaient drôle, mais je leur faisais toujours un peu peur. Mais je faisais toujours le premier pas, c’est un truc de mec ça, quand même !
- Et ta réflexion, une réflexion de macho. Une femme et un homme sont égaux, même dans un couple, je ne vois pas dès lors pourquoi je devrai obligatoirement faire le premier pas, lui donner mon parapluie s’il pleut ou payer la note au restaurant !
- Galanterie ! Répliqua Robert, piqué au vif dans sa fierté masculine.
- Hypocrisie !
Ils éclatèrent de rire à la suite de cette véritable petite scène de ménage. Attirant son benjamin contre lui, il lui embrassa la tempe affectueusement.
- Tu vois, tu viens de me donner le principal avantage d’être deux hommes pour un couple. On coupe la note en deux, ne sera pas mouillé celui qui a pensé à prendre son parapluie et-
- Mais on n’est pas prêt d’arrêter de se tourner autour en attendant que l’autre fasse le premier pas. Répondit Jude d’un ton plus sérieux en se dégageant un peu de l’étreinte.
Un peu refroidi par la tournure des événements, Robert fronça les sourcils :
- Et comme une fille, tu ne peux pas t’empêcher de tout compliquer… Je demande juste un peu de temps, pour être certain.
- Moi, une fille ? Je m’écouterais, je saute les formalités ! Pas que ça, d’ailleurs !
Etonné des mots crus employés par l’anglais, il ouvrit grand les yeux.
- Eh bien ça, c’est clair, au moins. Et au lit, t’es qui, la fille ou le mec ?
Amusé, Jude lui offrit un sourire et un regard arrogant :
- Pour le savoir, il faut passer par mon lit.
Déçu de n’obtenir aucune réponse, Robert haussa les épaules. En tournant la tête vers la télévision, il se rendit compte que le film était maintenant terminé. Jude se leva pour changer de DVD, laissant l’américain dans ses pensées, allongé sur le ventre, un oreiller sous le menton. Les anglais étaient définitivement des gens mystérieux, pensa-t-il. Jouer la carte de l’humour était quelque chose de très efficace pour les demoiselles ; il comprenait cependant moins ce qui, chez lui, avait pu séduire Jude.
- Tu veux quel genre ? Horreur, comédie, un policier ?
Ignorant la question, Robert lui en posa une autre, d’un air particulièrement soucieux et concentré :
- Dis, les filles que tu emmenais au ciné, tu les embrassais à la fin du film ?
- Non, parfois… Peut-être, je ne sais plus. Pourquoi ?
Intrigué, le regard de l’américain s’arrêta sur la jaquette de leur film, encore posé sur la moquette de la chambre. Sa voix amusée lui répondit :
- Oh… Juste comme ça.
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=> La scène du baiser dans Kiss Kiss Bang Bang est visible ici, (vers la fin de la
vidéo.) J'allais pas faire sans vous la proposer.
Commentaires et critiques toujours aussi bienvenues.
![Très content :D](./images/smilies/icon_biggrin.gif)