Hé oui. Enfin. Un nouveau chapitre. ça fait longtemps, je sais.
J'aimerais pouvoir vous dire que du coup ça donne un truc d'une qualité exceptionelle, tout ça...
Mais bon.
... Je ne m'avancerais pas trop de ce côté là...
Merci beaucoup à ma chère Gred d'avoir corrigé mes moults fautes. ^-^
Chapitre écrit pour ma Soho, qui devait même être fini pour son anniv'...
... Mais mieux vaut tard que jamais, hein! (et mieux vaut jamais que trop tard...)
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Chapitre six
-Tu as entendu parler de Lord Voldemort?
J’ai lancé ça comme ça, en l’air... Il ne sursaute pas. Pourtant, en Angleterre, quand on en parle, les gens prennent tout de suite un air terrorisé.
-Lord qui?
-Voldemort...
Sam est étendu de tout son long dans l’herbe. Le soleil inonde ses cheveux blonds, créant des reflets à l’infini... C’est beau.
-Non... C’est qui?
-Un drôle de type... Il serait à l’origine d’un attentat à Londres. Un car de touristes moldus brûlé. Il prétend “rendre aux sorciers leur grandeur d’antant”. Un illuminé, à mon avis, il ne va pas faire long feu...
-Humm... On s’en fiche, non? S’il ne s’attaque qu’aux moldus...
-Ouais. Sans doute. N’empêche, ma mère était dans tous ses états. Tu la connais...
Sam rit, d’un rire grave.
-Ta mère, grande défenseuse des moldus!
-C’est surtout parce que le type qui voulait lui faire faire un disque en est un...
Je tente d’ignorer les images qui me viennent en tête. Elle, lui, sur le canapé...
-C’est dommage tout de même qu’aussi peu de sorcier s’interesse à la musique!
-Moui.
-Tu vas être obligé de supporter ces moldus insipides, mon pauvre Severus!
-Si j’arrive un jour à intégrer l’opéra, je suppose que oui.
-Si tu n’y arrives pas, je ne te parle plus, tu es prévenu!
-Tu ne m’aimes donc que pour mon futur succès?
-Disons que je ne veux pas me montrer aux côtés d’un danseur raté...
Je n’aime pas quand il dit ça, surtout avec cet air sérieux. Peut-être parce que je suis terrorisé, justement, par le fait de peut-être devenir un danseur raté? Mais bientôt il s’approche, et ses yeux brillent d’une lueur moqueuse que je connais bien...
C’est con, mais chacun de ses baisers me semblent plus doux... Ah! Arrêter le temps!
-Je ne veux pas retourner à Poudlard.
Je me blotti scontre lui, tentant de disparaître dans son odeur, dans ses bras.
-Severus...
Il n’y a que lui pour prononcer mon nom comme cela.
-Mon danseur à la noix, tu vas me manquer!
-Hé! A la noix toi-même!
On rit. C’est joli, nos deux rires qui se mélangent. Nos deux rires et nos deux corps, qui s’enflamment, encore une fois, une dernière fois avant mon départ, demain... Samuel...
***
Je retrouve Narcissa dans le train, hélas collée comme une sangsue à un Lupin les yeux plus cernés que jamais. Foutu loup-garou!
Je décide d’ignorer sa présence et m’assieds en face du couple. Lequel se sépare immédiatement histoire de laisser Narcissa venir m’embrasser.
-Severus! Tu m’as manqué! Pourquoi n’as-tu pas écrit?
-Oh, pas le temps...
Elle, elle m’a écrit. Une longue lettre de trois pages, écoeurante de bonheur stupide avec son Remus chéri. Je n’arrive pas à croire qu’elle ait passé la moitié des vacances avec... Cet ami de James Potter!
-Bon, heu... Cissa, je vais retrouver les autres. Salut, Severus.
Ouais, c’est ça Lupin, adieu!
-Il est si gentil...
-Muf.
-Oh, ne boude pas! Je croyais que tu trouvais que la jalousie était un sentiment vain et stérile?
-C’est ce que je pense, oui, et je ne suis pas jaloux. Je trouve juste que tu aurais quand même pu trouver mieux! Il n’est même pas beau!
-Sirius Black est beau. Aurais-tu préféré que je le choississe?
Le fait-elle exprès?
-Tu as vu Shin?
-... Non.
J’aime bien Narcissa pour ses brusques changements de conversation. Même si les sujets ne sont pas toujours à mon goût.
-Oh...
C’est drôle ce qu’il peut y avoir dans un simple “oh”.
Il y a: “Severus, vraiment, je sais qu’il te manque, et c’est ridicule de vous disputer ainsi!”. Il y a aussi: “Pauvre Shin. Comme il doit souffrir par ta faute. Tu pourrais culpabiliser!”. Et enfin: “Je me demande quand est-ce que vous allez enfin vous réconcilier?”
Je me fous de Shin.
Je pense à ce contrat, la main de Narcissa dans la mienne. Il a dit qu’il me contacterait... Quand? Où? Comment?
C’est étrange... Je ne suis pas si impatient... Et mon ventre se tord à l’idée du grand avec qui j’ai signé! Je n’aurais peut-être pas dû? Pas par regret, non, pour moi-même. Je ne devrais pas m’intéresser à ce qui se passe dans le monde sorcier. Mon but est l’opéra, la danse... Être une étoile, une grande étoile! Après tout, dans à peine quelques mois, je quitte Poudlard. Je ne le reverrais pas... Jamais...
ça vaut vraiment la peine?
-Pourquoi soupires-tu?
-Rien...
Ah, ma Cissa! Plus l’on grandit, moins je peux t’expliquer ce que je suis...
***
Cela fait un jour que nous sommes revenus à Poudlard, et nous avons déjà trois travaux à rendre pour la fin de la semaine... Trois rouleaux de parchemin en potion - facile, j’ai déjà fini -, un résumé à faire en histoire de la magie - barbant - et des exercices de théorie en métamorphose...
Et les auditions qui sont pour dans deux mois... Chaque fois que j’y pense, je meurs de trouille. Pourtant, Petro m’assure que je serais à la hauteur, Narcissa que je serais le meilleur danseur que l’opéra n’ait jamais connu.
Parfois j’aimerais être comme Black. Retenir ma respiration et foncer, sans réfléchir. Avoir le culot de me ramener chez quelqu’un pour lui demander de coucher avec moi.
Je l’ai à peine croisé au détour d’un couloir, il était avec Lupin. Il ne m’a pas regardé.
J’ai reçu un hibou de mon cousin Thomas, ce matin: Rendez-vous à la tête de sanglier lors de ta prochaine sortie à Pré-au-Lard. Plutôt concis.
Et dire que j’ai pu penser que peut-être, ça ne valait pas la peine... Ah! Sûr que ça en vaut, la peine! Je le hais de toutes les fibres dans mon corps. Je suis sûr que la plupart des gens sont persuadés qu’il est impossible d’haïr à ce point là. Même moi, je me demande parfois si c’est vraiment possible.
C’est physique. J’ai la gorge qui se noue, des fourmis qui me parcourent le corps, les yeux durs et coupants, la machoire serrée. J’ai l’impression de me transformer en pierre, tellement je suis tendu.
Il a balancé un tentacule de poulpe dans ma potion, tout à l’heure. J’ai eu zéro.
Je l’ai VU! je l’ai vu mettre ce tentacule! Evidemment, on ne m’a pas cru.
«Severus, vous êtes un excellent élève, mais vous exagérez. Vous ne pouvez pas tout mettre sur le dos de Potter! Vous savez, chacun à ses jours “sans”...»
“Jours sans”. Tu parles.
Je suis affalé sur mon lit, seul. Un brouhaha confus me vient de la salle commune... Quels bandes d’idiots. Quand je suis rentré de ma répétition avec Petro, Lewarth et Bentley étaient en train de faire une bataille de canapé. Cela consiste à soulever les deux canapés et à les ensorceller pour qu’ils se battent. Stupides et infantiles.
Les premières années étaient terrorisées. En temps que préfet en chef, j’ai dû y mettre de l’ordre. Ils n’ont pas apprécié. Le regard que m’a lancé Bentley... ça me fait rire. Sur eux, j’aurais toujours le dessus.
Quelqu’un monte pesamment les escalier. J’espère que ce n’est pas un des trois crétins... Quoique, je ne suis pas sûr que j’ai plus envie de voir Shin. Il ne m’a même pas adressé un salut, hier, quand je l’ai revu.
-Sev?
-Shin...
Il tombe dans un espèce de ralenti. Je me suis levé d’un bond et l’ai rattrapé dans mes bras.
-Hé, Shin!
Je le dépose doucement sur le lit. Le contour de son oeil droit est bleu, il a les cheveux défaits. Sur son uniforme, il est écrit en lettres roses “pédé”...
-Qui...?
Il ne répond pas, même quand je le secoue, même quand je lui balance un verre d’eau sur la tronche il ne réagit pas.
Putain. Je fais quoi? Pomfresh, évidemment. Vite, il faut...
-Severus...
Il a la voix d’un petit garçon agonisant.
-Bouge pas, j’appelle un prof, je...
-Tu fais rien du tout... Tu le sais, non? Ils me tuent, si on dit quelque chose...
-Mais...
Il a agrippé ma main, et je vois bien qu’il essaye de se retenir de pleurer - parce que je déteste ça.
-Qui est-ce qui t’as fait ça?
-Oh, personne. Je sais pas. Ils étaient au moins deux. Des garçons. Je sais pas leurs noms.
-Quel bande de...!
-C’est pas grave. ça faisait longtemps. Depuis que tu es là, on n’ose plus m’attaquer. Ils ont dû remarquer que... Enfin, qu’on était plus trop ensemble ces derniers temps...
-Oui...
J’ai fermé les rideaux du lit, après lui avoir administré quelques sorts de soin. Son oeil dégonflera demain. Quand les autres sont montés, j’ai été dansé. Encore.
****
La tête de sanglier est plongée dans un drôle de silence vivant. Quand j’entre, une dizaine de tête blafarde se tourne vers moi, l’air mauvais. C’est comme si j’avais un panneau autour du cou sur lequel il est inscrit: “intrus”.
Je balaie la pièce du regard. Il n’est pas encore là. Je m’assieds dans la pénombre d’un coin de la pièce. Des miettes écrasées semblent incrustées dans le bois noir de la table crasseuse. Les murs sont gris de poussière.
J’ai rarement vu un lieu aussi peu propice à un rendez-vous de ce genre. Je suis certain que chaque personne m’observe, me scrute, qu’ils veulent tous savoir ce que je fous ici - s’il trouve, qu’ils me renseignent...
Le barman m’épie d’un air mauvais. Il me crie de derrière son comptoir: «Vous voulez boire quoi?». Je fais un signe pour dire que j’attends quelqu’un. C’est drôle, mais j’ai l’impression que faire sonner ma voix équivaudrait à faire savoir à tous quel horrible contrat j’ai signé.
Je tente de me tasser sur ma chaise, de me faire minuscule. Mon dos de danseur habituellement si droit se courbe, je fais retomber mes longs cheveux sur mes yeux.
Enfin il arrive. Son écharpe rouge lui cache le menton et la bouche. Ses yeux sont cernés, ses épaules voutées. Tout son corps trahit une immense fatigue.
-Excuse-moi du retard.
La voix est courtoise mais le regard transperçant de mépris me crie: «Avorton! Je vaux cent mille fois plus que toi!». Je hausse les épaules en réponse, bien décidé à n’ouvrir la bouche que lorsque cela sera vraiment nécessaire.
-Une biérraubeurre et un firewhisky!, crie-t-il au barman.
Qui est-ce qui lui dit que je ne veux pas, moi aussi, un firewhisky? Me voici vexé que l’on me prenne pour un gamin. Je suis majeur, bordel!
Même si en fin de compte, il vaut mieux que je ne touche pas d’alcool devant lui. La dernière fois que j’ai trempé mes lèvres dans un verre de vin, j’étais tellement saoul que j’ai cru que si j’embrassais un crapaud, il se transformerait en prince charmant.... Pitoyable.
Il attend en silence que nos boissons arrivent. Je fixe mon regard sur la nuque d’un homme au cheveux grisonnants, droit devant moi.
-ça f’ra trois noises, siouplait.
Il sort un gallion, royal - et sa mère qui est si radine...
-Gardez la monnaie.
Après avoir avalé d’un trait son firewhisky, il attaque enfin:
-Je serais bref, on m’attend ailleurs. Il y a un endroit à Poudlard qui s’appelle la salle sur demande. Tu devras m’y retrouver tous les mercredis après-midi jusqu’à ce que j’ai appris tout ce que tu pouvais m’enseigner.
-Mais j’ai cours de...
-Tu as signé, Severus.
Ses yeux braquent sur moi une baguette magique s’apprêtant à lancer un sortilège impardonnable...
Je savais que c’était une bêtise - et pourtant, je le désire tellement, le voir détruit, devant moi, par moi! ça réduit mon temps de danse déjà mince à presque rien.
-Voici le plan pour s’y rendre.
Il me passe un vieux parchemin jauni. J’ai peur de le réduire en poussière si je l’effleure seulement.
-Les instructions sont au dos...
Et, tout bas, il ajoute:
-Encre sympathique, invention moldue, tu connais?
Je hoche la tête positivement. Bonne idée, la plupart des sorciers ne prennent pas le temps d’apprendre les “trucs” de moldus. C’est pourtant parfois utiles - même si souvent ridiculement simples...
-Et toi, comment y arriveras-tu, dans cette salle?
-ça, par contre, ça ne te concerne pas... A mercredi, mi... Severus.
Allait-il dire minus ou minable, ce crétin aux pieds plats?
Je laisse ma biéraubeurre intacte sur la table et m’en vais retrouver Narcissa au trois balais.
En marchant dans les rues de pré-au-lard, je repense à mon cousin. Il avait les yeux bizarres, comme s’il s’était enfoncé des pierres dedans.
-Hé, Snape! Quelle heureuse surprise!
Mon sang se glace. Black. Qui m’agrippe par le bras et me sourit comme si j’étais son... Je déglutis d’horreur en y songeant... Son ami.
Je me dégage, le fixe, tentant de mettre le plus de dégout possible sur mon visage. Mais tout ce que je ressens en cet instant est un grand vide. J’ai l’impression tout d’un coup d’avoir cédé une grande partie de ma vie en acceptant le contrat de Thomas... Etrange.
-James et Peter ont une retenue et Remus est malade.
Malade! Je ricane. Disons plutôt que ce monstre a du mal à se remettre de la pleine lune.
-Alors je me demandais si tu voulais pas faire un truc? Avec moi?
-Un truc...?
J’ai encore sa voix qui résonne... «J’ai cru que je t’aimais...»
Oui. J’aimerais vraiment bien avoir ce culot. Ce fol espoir dans les yeux. Comment fais-tu Black, pour n’être jamais ridicule, pathétique ou médiocre? Comment fais-tu pour dégager cet air que personne, jamais, ne t’atteindra? Même quand tu pleures, on dirait que tu t’en fous...
Il m’entraîne et je ne pense même plus à me dégager.
-Excuse-moi, pour l’autre jour. D’être venu chez toi, tout ça. C’était nul. Je me suis laissé emporter par mes hormones, si je puis dire ainsi...
J’acquiesce au hasard. Au souvenir des yeux de mon cousin se superpose le souvenir de ses yeux à lui, emplis de larmes, ça faisait une si jolie couleur!
J’ai envie qu’il pleure encore. Devant moi.
On est devant la cabane hurlante. C’est là que Lupin se transforme. Je n’aime pas ce lieu.
-Je ne t’ai pas demandé... Comment tu as su où j’étais en vacances?
-Mireille le savait de Leery...
Saleté de sang-de-bourbe. Pas capable une seule fois dans sa vie de se mêler de ses affaires.
-C’est une amie à toi, non?
-Qui ça?
-Mireille!
-Absolument pas.
-Ah bon? Je croyais...
On est a un bon mètre l’un de l’autre et pourtant je sens sa chaleur me transpercer.
-Il fait froid, hein?
-Oui.
-J’ai les doigts gelés.
-Ah.
-Pas toi?
-Un peu...
En vérité, mes doigts sont gris de froid. D’ailleurs, c’est bien simple, si je les remue, ils vont tomber.
-Attends...
En deux seconde, il est près de moi, me prends les mains, les fourrent sous son pull.
-C’est mieux, non?
Je ne réponds rien. Je me sens fiévreux. Mes doigts picotent douloureusement en se réchauffant sur la poitrine de Black. Une mince couche de tissu me sépare de sa peau. Je sens sa respiration, mieux, mes paumes sont sa respiration!
Je n’ai plus du tout froid. Mes terminaisons nerveuses s’affolent, mes orteils veulent danser, mes genoux veulent danser, même mes oreilles veulent danser! Je fourmille de cellulles bien vivantes, et soudain, je pense à Sam...
Si je ferme les yeux, ça pourrait être lui. Sauf que non. C’est Black. Et en un sens, c’est presque aussi bien...
Mais soudain, il bondit le plus loin possible de moi, et les fragments épars de l’instant passé se brisent à mes pieds dans un douloureux fracas...
-Bon, Snivellus, ce n’est pas que je n’apprécie pas ta conversation mais j’ai pour habitude de ne pas fréquenter les tas d’ordures.
Son sourire découvre ses dents blanches, ses canines pointues et cruelles. Je ne réponds rien. Je ne baisse pas les yeux. Et mes cellulles meurent, une à une, étouffées par la glace qui se répand dans mes veines.
J’ai de nouveau froid.
Quand je me retourne, je vois un groupe de pouffsouffle qui s’approche. Les filles gloussent en apercevant Black, les garçons le saluent de la main.
Ce type connaît tout le monde et tout le monde le connaît.
Il s’éloigne à pas lent. Rien dans sa démarche ne trahit sa visite chez moi, mes mains sous son pull, ses larmes, son odeur piquante...
C’est comme s’il ne s’était rien passé.