<Gandalf>
Illuvatar tout-puissant ! Alors celle-là c’est la meilleure ! On va tous mourir et la seule chose qu’ils trouvent à faire, ces deux-là, c’est des cochonneries dans le bain !
- Gandalf ? Fichez l’camp d’ici ! me lance Merry avec effronterie.
- On peut savoir ce que vous faites ?
Je vois Peregrin piquer un fard. Meriadoc me jette un nouveau regard venimeux.
- Ca n’se voit pas ? Je prenais un bain !
- Et vous avez besoin d’être deux pour ça ? j’interroge en levant un sourcil.
Pippin commence à se relever mais l’autre crétin le retient.
- Non, Pip ! Reste-là, c’est rien. Ecoutez, Gandalf, je m’en voudrais de devenir impoli avec une personne pour qui j’ai autant de respect. Alors pour la dernière fois, veuillez attendre dehors !
- Il y a en ce moment même un Hobbit, l’un de vos amis, votre frère, qui se meut tant bien que mal dans le pays de Mordor, austère et sombre. Nous avons là une poignée d’hommes qui constitue son infime mais unique chance de succès, et elle est en train de se mettre en place pour partir. Je venais vous en informer, pensant que vous tiendriez à vous sacrifier pour ce Hobbit jusqu’au bout… Mais si vous préférez fricoter dans cette auge pendant que le destin de ce monde se joue au-dehors, grand bien vous en fasse.
Après cette sacrée tirade qui a dû les culpabiliser salement, je me drape dans mes robes blanches et me retire. Ca, c’est la classe totale ! Je marche quelques pas jusqu’à un recoin sombre, puis je m’écroule en pleurs contre une statue de l’arbre de Gondor.
<Pippin>
Oh, misère… Maintenant j’ai des remords ! Je me lève accompagné par Merry.
- Qu’est-ce qu’il y a, Pippin ?
Je gratte légèrement mes boucles trempées.
- Gandalf a raison… C’est pas très réglo, ce qu’on a fait, là…
- Est-ce que tu regrettes ? demande-t-il avec une petite moue.
- Absolument pas ! Mais… On devrait quand même y aller.
- Bien sûr… Et puis on a tout le temps devant nous, n’est-ce pas ? demande-t-il avec espoir.
Je crois qu’il est aussi terrorisé que moi. Je lui souris.
- E… Evidemment !
Après un dernier petit bécot, nous remettons nos vêtements et nos armures et nous dirigeons vers les écuries.
<Gandalf>
Je n’ai plus de raison de vivre : mon amour m’en préfère un autre malgré mes méritants plans pour l’emporter… Enfin, voyons le bon côté des choses : maintenant plus rien ne me retient sur cette terre maudite et je vais pouvoir me jeter dans la bataille comme un bon kamikaze : sans peur, sans regret, j’exploserai cette deuxième tour ! Pippin est assis devant moi et n’a pas pipé mot depuis l’incident. Tant mieux. Si c’était pour entendre un tissu de pipeau…
Après une petite motivation des troupes par Grands-Pas qui est tout de même moins doué que feu Théoden, nous trottons gentiment devant la porte noire. Là, Aragorn fait sa plus belle grimace et on attend. Pendant vingt bonnes secondes, j’ai cru qu’on s’était pris un vent dans les règles de l’art, mais ça s’ouvre finalement et dix milles orques s’avancent sur nous. Aussitôt, Aragorn repart en sens inverse en glapissant « Ils sont à mes trousses ! Ils sont à mes trousses ! ». Tsss… Et ça veut être roi…
J’ai finalement retrouvé ce cher Frodon. Pauvre petit, il en aura vu ! Je ne voudrais pas financer le nombre de séances sur le divan qu’il va devoir s’offrir après ça ! Allez, direction Minas Tirith, toute !
<Pippin>
J’ai passé toute la bataille sur un petit nuage. Ca a été l’occasion pour moi de constater que l’amour surpasse de loin n’importe quelle herbe ! A présent, des aigles nous ramènent en lieu sûr, après cette chouette aventure qui m’aura bien distrait de ma petite vie de veuleries. Merry et moi n’arrêtons pas d’échanger des sourires furtifs. J’ai hâte de trouver un bon lit… pour me reposer après ces émotions !
Le Seigneur Aragorn nous a attribué une chambre avec vue sur la plaine. Une servante nous conduit jusqu’à elle. Nous la remercions puis je lui fais un croche-pied parce qu’elle faisait partie des garces qui m’ont bousculé pendant la bataille. Nous ouvrons la porte. Ouah ! Alors ça c’est de la chambre ! Elle est tellement astiquée que chaque chose y brille, les meubles sont cirés impeccablement, les rideaux sont de fines dentelles dans lesquels sont découpées des formes d’oiseaux, les lits sont couverts de pétales de fleur, et les tables de nuit de minuscules flacons contenant diverses huiles de massage parfumées, mais surtout : une énorme coupe de fruit trône sur la table. Nous nous ruons dessus d’un même mouvement et nous cassons joyeusement les dents sur le plastique… Aaaaah les vils humains ! Bouffeurs de daube ! Gougnafiers ! Jamais je n’aurais cru possible d’être d’une telle perfidie ! Merry et moi nous regardons avec la même expression atterrée. Je repose ma pomme factice et me dirige vers la fenêtre. Y a pas à dire, c’est une chance que cette piaule en ait réchappé ! Merry s’approche à son tour des carreaux, et cette fois c’est lui glisse timidement son bras autour de ma taille. Je lui souris.
- On a gagné, finalement…
- Oui, on gagne toujours !
Nous nous serrons la main dans une mutuelle félicitation.
Nous restons encore quelques secondes à nous considérer en souriant.
- On va faire dodo ? je propose.
- D’accord.
Il s’étend sur l’un des lits.
- Tu peux me dire pourquoi les hommes éprouvent le besoin de recouvrir leurs plumards de fleurs ? interroge-t-il tandis qu’un pétale lui chatouille le cou.
Je m’assois à-côté de lui.
- Alors là, aucune idée ! Des quartiers de pommes, je comprendrais. Mais des fleurs… un us elfiquo-humain, sans doute…
- Oui… nous sommes trop rustres pour comprendre, probablement…
Nous rions de notre insouciance. Merry me regarde. Je devrais me lever et gagner mon propre paddock mais c’est comme si je n’en avais aucune envie, comme si je ne pouvais pas décoller mes fesses de ce matelas. Je continue à le contempler et je sens sa main courir discrètement sur ma hanche. Je lui caresse les cheveux, comme je l’avais fait sur le champs de bataille. Mais, cette fois, il n’est plus agonisant et je n’ai plus peur pour lui. A présent nous sommes en sécurité, totalement en sécurité. Ce sentiment de paix n’avait plus été présent dans mon esprit depuis le départ de la Comté. Je l’embrasse et je retrouve ma contrée. Il répond à mon baiser paisiblement et m’attire doucement tout contre lui. J’aime sentir sa chaleur sous moi, cette chaleur qui est à présent revenue même dans sa main droite qui se glisse sous mes habits et me caresse le flanc. Des frissons m’agitent. J’ai envie de présence et de proximité à un point que je ne croyais pas seulement possible. Il me fait basculer gentiment sur le côté en cherchant plus loin sous ma chemise. Un soupir s’échappe de nos lèvres jointes. Je glisse sur son flanc, puis sur l’une des deux dunes fermes qui annoncent les jambes. Il gémit un peu, plus par encouragement qu’autre chose. Avec un peu de chance, je ne serai pas tout seul dans mon amour pour lui ce soir.
Bon, est-ce que je dois lui dire que je suis puceau, là est la question maintenant…
<Gandalf>
Je me tape une déprime d’enfer. Le petit porteur s’est réveillé dans l’après-midi, heureusement. Maintenant, c’est la nuit et je reste là pour veiller sur lui. Je continue à chialer comme une chochotte en pensant à Pippin qui a préféré offrir ses charmes à son cousin plutôt qu’à moi… Je trouve ça pervers, pas vous ? Ils sont presque de la même famille et ça ne semble guère les gêner !
- Gandalf… Vous pleurez ?
Sacré Bleu ! Sacquet s’est réveillé sans que je m’en aperçoive ! Je vois ses grands yeux bleus me fixer dans le noir avec une lueur d’innocence catastrophée.
- Non, ce n’est rien, Frodon… dis-je d’une voix complètement cassée.
- Gandalf…
Il rampe vers moi.
- Dites-moi que j’ai réussi, que l’anneau a bien été détruit ! s’affole-t-il.
- Mais vi, mais vi, Frodon, allons ! Ne dites pas de bêtise !
Il paraît se détendre.
- Mais alors, pourquoi vous pleurez…?
Alors, je lâche tout. Je lui vide mon sac en pleine figure. Le seul hic c’est que c’est lui qui est sur le lit et moi sur la chaise, ça devrait plutôt être l’inverse…
- Un amour non-partagé… Je connais cela, finit-il par déclarer d’un air grave.
- Vraiment ?
- Oh oui… Quand nous étions sur notre bloc de rocher, après avoir finalement détruit cette pacotille, tout ce qu’il a trouvé à dire c’était qu’il aurait dû se marier avec Rosie Chaumine…
- Non ?
- Si.
- Le salopiot…
Frodon hausse ses petites épaules.
- C’est la vie… Les gens qu’on aime ne tombent pas forcément sous notre propre charme…
Pauvre garçon. Il vient de quasi se sacrifier pour la communauté internationale et il n’a même pas le droit d’être heureux… Du coup, ça me rend encore plus triste.
-Aaaaah, tous des salauds ! Venez, Frodon, on va s’en j’ter une derrière la cravate et chanter des chansons jusqu’à plus soif !
Le petit Hobbit lève joyeusement le poing en l’air et s’écrie :
-Wouais !!!!
<Pippin>
Je suis réveillé par de doux baisers sur ma poitrine. Je sursaute et ouvre les yeux le plus rapidement possible. Ah… Merry me regarde avec son air provoquant habituel. Je tourne la tête pour redécouvrir la chambre. Eh ben… Tous les flacons y sont passés, dis donc ! J’aurais pas cru ! Ca me fait drôle de me retrouver tout nu avec quelqu’un dans mon lit… Je n’ai même pas le temps de reprendre davantage mes esprits qu’il me gratifie d’un baiser avide. C’est trop d’émotion dès le matin !
EPILOGUE :
<Pippin>
Cela fait plusieurs mois que nous sommes rentrés dans la Comté. Nous avons retrouvé avec joie ses champs, ses forêts, ses jolies rivières et ses pommes juteuses. Merry et moi nous sommes mariés, enfin, avec des filles, je veux dire ! Il faut dire qu’on commençait à nous regarder de travers, au Dragon Vert… On s’est débrouillés pour conclure tout ça avec Diamond et Estella qui sont encore plus catholiques que nous, si vous voyez ce que je veux dire… Comme ça, tout le monde est content et vit joyeusement dans le péché de son côté tout en bénéficiant des allocations familiales. Aujourd’hui, nous allons dire adieu à Bilbon et Gandalf qui nous quittent pour un monde meilleur, là où règnent partout cuillères en argent et pommiers. Mais ce monde-là ne me fait plus envie, à présent. A présent, mon paradis tient uniquement dans les yeux de Merry… Bon, d’accord, en fait pas seulement ses yeux mais il faut rester poétique !
Nous voici tous devant les navires qui vont les emmener loin de nous. Après avoir fait des adieux déchirants à Papy que je trouve au passage étrangement guilleret depuis quelques temps, celui-ci se dirige vers la passerelle. Mais… voilà qu’il s’arrête.
- Il est temps, Frodon…
Quoi ?? Je me tourne vers mon cousin aux cheveux ébène. Il a un air particulièrement mal à l’aise… Qu’est-ce que… Voilà qu’il nous serre chacun dans ses bras comme Elmyra l’aurait fait pour trois chatons, et va prendre la main tendue de Gandalf. Celui-ci nous fait l’un de ses légendaires clins d’œil, à Merry et à moi, puis ils montent dans le bateau main dans la main, après un dernier sourire à Sam qui s’est probablement mis en tête de faire monter le niveau de la mer un peu plus de ses seules larmes.
Alors ça…
FINIIII!!!!
_________________ La Halfeline
__________
Le sachet de thé c'est la santé!
Dernière édition par La Halfeline le 22 Aoû 2006 07:55, édité 1 fois.
|