Voici la suite ! En espérant qu'elle vous plaira autant que la première partie. Cette fois c'est l'entrée en scène de Bofur qui, en ami volontaire de Bilbo, va l'aider et empirer sa situation. ^^ Il y a également une pointe de Thorin/Bilbo et toujours les frangins qui font n'importe quoi. Je ne dis pas que c'est hilarant, loin de là, mais si l'envie de sourire vous prend en lisant ceci, c'est normal. Sur ce, bonne lecture et merci !
Chapitre 2
Bilbo Baggins ne se cachait pas, il était juste momentanément placé derrière un pilier, entre deux caisses, dans la grande maison de Beorn, loin de tout être vivant mais cela n'était qu'un pur hasard, complètement indépendant de sa volonté. Ce n'était pas de sa faute si l'endroit qu'il avait choisi pour se reposer se trouvait à l'opposé de la table où était tout le reste de la Compagnie, dans l'ombre et à l'écart de tout passage. Un Baggins ne fuyait pas devant ses problèmes, jamais, ce n'était pas ainsi qu'il avait été éduqué.
Le Hobbit grogna, il ne s'en sortait plus. Toute la journée, Kili et Fili s'étaient accrochés à lui, ils ne l'avaient pas lâché une minute. Dès qu'il se retournait, l'un apparaissait dans son champ de vision, l'autre suivant juste après. Quand il essayait de s'éloigner pour avoir un peu de tranquillité, ils le retrouvaient au bout de deux minutes. Ils devaient avoir une sorte de sixième sens spécial Bilbo.
Il ne leur en voulait pas, ils étaient très gentils, juste un peu trop collants. Et cette idée de lui faire la cour était ridicule, cela n'aboutirait à rien. Pourquoi gardait-il les tresses dans ce cas ? Parce qu'elles montraient qu'on s'intéressait à lui, qu'il était apprécié au sein des Nains. Il aurait préféré que ce soit Thorin qui lui en fasse une.
A quoi pensait-il ? Bilbo secoua la tête, mieux valait ne pas se diriger sur ce terrain glissant.
Il était caché depuis une quinzaine de minutes et pour le moment, personne n'était venu fouiller de son côté. Il savait que les descendants de Durin le cherchaient, ils pouvaient les entendre couiner et crier son nom. Il allait attendre encore un peu avant d'y retourner, c'était son premier moment de paix de la journée, Bilbo avait bien l'intention d'en profiter. La voix de Thorin retentit, il était en train de crier après ses neveux et de les accuser d'avoir chassé le Hobbit avec leur idioties. Le jeune cambrioleur ne put retenir un sourire à cela, le roi n'avait pas prononcé un mot de toute la soirée, il avait passé son temps à fixer la table de ses yeux remplis de colère, Bilbo s'était même demandé s'il allait réussir à y creuser un trou vu l'intensité de son regard. Sa mauvaise humeur avait duré toute la journée, pas une seule fois il n'avait adressé la parole au Hobbit, il ne l'avait même pas regardé. Le semi-homme croyait avoir fait quelque chose de mal, il serait bien allé s'excuser mais il ignorait de quel crime il était l'auteur. Le fait que Thorin daigne à présent s'exprimer était bon signe, bien qu'il ait attendu que Bilbo disparaisse pour le faire.
Il était bien là, dans son coin, seul avec ses pensées et tranquille. Il le ferait durer aussi longtemps que possible parce qu'il n'avait aucun doute qu'une fois qu'il réapparaîtrait, les héritiers au trône lui sauteraient dessus et ne le lâcheraient plus de la nuit. Bilbo avait une folle envie de fumer sa pipe, une bonne bouffée de Vieux Toby lui ferait le plus grand bien, cela détendrait ses nerfs. Malheureusement ce n'était pas envisageable, la fumée alerterait ses gardes du corps.
Soudain des bruits de pas résonnèrent, ils se dirigeaient vers lui. L'obscurité était assez dense pour le camoufler mais les Nains voyaient bien dans le noir, ce qui ne l'avantageait pas. Peut-être que s'il se plaquait contre le mur, la personne ne le remarquerait pas et passerait son chemin. C'était un bon plan mais bien évidemment, il fut abandonné car Bilbo se rendit compte de quelque chose, une pression au niveau de son nez qui se faisait de plus en plus pressante. Non, pas maintenant, tout sauf ça, il allait se faire repérer, les pas se rapprochaient de plus en plus, ils ne devaient être qu'à trois mètres. Si le Hobbit faisait le moindre son, il serait repéré pour sûr. Il pouvait se contenir, juste quelques secondes de plus, il y était presque. Ses sinus lui piquaient, il allait exploser, il le sentait. C'était trop tard, il ne pouvait pas se retenir.
-Atchoum !Les pas s'arrêtèrent instantanément, il avait été démasqué. Il ne lui restait plus qu'à prier que ce ne soit ni Kili, ni Fili et peut-être qu'il pourrait rester seul dans son coin. La personne s'avança à nouveau, son ombre apparut sur le mur mais les flammes de la cheminée déformaient toute silhouette, il ne put reconnaître qui c'était. Bilbo ne voulait vraiment pas se faire attraper, il aimerait attendre encore un peu avant de retrouver ses tortionnaires. Il envoya une rapide prière à Mahal, ayant récemment appris que c'était le créateur des Nains, pour qu'il l'épargne.
Finalement l'intrus se montra et le cœur du Hobbit se calma, il poussa un long soupir de soulagement. Ce n'était que Bofur avec son éternel sourire et son chapeau. Le cambrioleur n'avait jamais été aussi heureux de le voir, il aurait pu en pleurer de joie. S'il y avait bien un Nain qui ne risquait pas de le ramener auprès des princes c'était lui.
-Il m'semblait bien que j'avais entendu une p'tite souris éternuer, plaisanta-t-il.
Elle a bien raison de se cacher, les chats sont à sa poursuite et sont actuellement en train de fouiller sous les coussins pour la retrouver.Il s'accroupit juste devant le semi-homme pour être à son niveau. Même dans la pénombre il voyait ses yeux verts le fixer.
-Comme je suis content de vous voir ! Je vous en supplie, ne leur dites pas que je suis ici ! S'il vous plaît ! Ca fait des heures que j'essaye de leur échapper et j'ai enfin réussi ! le supplia Bilbo en joignant les mains, ce qui fit rire le Nain.
-Rassurez-vous, j'en avais pas l'intention. Je m'doutais bien que vous vous étiez éclipsé pour cette raison. Je sais pas comment vous avez fait pour les supporter toute la journée.
-Je n'ai pas eu le choix. Ils sont très gentils mais un peu oppressants. En plus, maintenant ils ont décidé de me faire la cour. Je crois que je les préférais avant, quand ils ne faisaient que se moquer de moi, soupira Bilbo.
-Je compatis. J'vous conseille de rester caché, la majorité de la Compagnie est à votre recherche, Thorin y compris. Seuls Oin, Gloin et Dwalin se sont abstenus.
-Vous aussi vous me cherchiez ?
-Disons que j'avais compris vos raisons de disparaître. Je voulais pas vous déranger, seulement vous avertir. J'vais vous laisser, vous voulez sûrement profiter d'un peu de solitude, déclara Bofur alors qu'il commençait à se relever.
-Oh non ! Vous ne me dérangez pas. Restez, je vous prie, le stoppa le Hobbit en attrapant son bras.
Je ne suis pas contre un peu de compagnie.Le fabriquant de jouets lui envoya un sourire encore plus grand et vérifia que personne ne les observait avant de se glisser juste à côté de lui. Ils pouvaient entendre le reste des Nains appeler Bilbo, la voix de Thorin dépassant toutes les autres, son mécontentement évident.
-Il est encore énervé après moi, se lamenta le semi-homme.
Quand est-ce que je vais réussir à recevoir autre chose que des reproches de sa part ?
-Non, c'est pas après vous qu'il en a mais ses n'veux.
-Oh s'il vous plaît ! Il ne m'a pas dit un mot ni même regardé de la journée ! chuchota vivement Bilbo.
-Ca n'a rien à voir avec vous, c'est les tresses qui le dérangent. Il aime pas les voir sur vous. Pourquoi vous les gardez ?
-Je ne vois pas en quoi ça peut le gêner, ça ne le regarde pas. C'est pour leur faire plaisir, ils veulent tellement se racheter auprès de moi que je n'ai pas le cœur à les arrêter. Ce n'est pas comme si j'avais vraiment accepté leur cour. Quoi qu'en y repensant, je regrette de ne pas m'y être opposé plus violemment. Vont-ils se calmer un jour ?
-Allez savoir ! Y a bien un moyen pour atténuer leurs avances, ce serait que vous receviez une tresse de la part d'un aut' Nain, signifiant ainsi qu'ils auraient un concurrent. Par contre, une fois l'premier choc passé, ils redoubleront sûrement d'effort pour vous obtenir. Et Thorin sera encore plus énervé, raisonna Bofur en caressant sa moustache de manière absente.
-Donc ça ne réglerait rien ?
-Si, ça vous permettrait de passer moins de temps avec eux et plus avec cet aut' Nain. Evidemment, ce serait pas une vraie tentative de séduction, juste une diversion, un peu comme pour eux, bien que j'ignore totalement leur objectif vous concernant.
-Et qui voudrait me rendre ce service ? Je ne me vois pas infliger cela à qui que ce soit. Balin, Oin et Dori sont trop âgés, ce ne serait pas crédible. Gloin et Bombur sont déjà mariés, Dwalin n'en parlons pas ! Ce serait plus comique qu'autre chose ! rit Bilbo en s'imaginant le grand guerrier lui faire la cour.
Ori ne serait pas autorisé par ses frères à faire cela, Nori me fait peur, je ne comprends pas quand Bifur parle et Thorin… C'est Thorin. Quant à vous, je ne me permettrais pas de vous demander de vous sacrifier.
-C'est vrai que la liste de candidats est plutôt mince. Nori vous fait peur ?
-Oui ! Il ne dit jamais rien, il observe les gens tel un serpent prêt à mordre au moindre moment d'égarement ! Son exclamation provoqua un fou rire chez son compagnon qui essaya tant bien que mal de ne pas faire trop de bruit. Même s'il riait de lui, c'était agréable de le voir ainsi, la bonne humeur constante de Bofur était toujours communicative. Bilbo pouvait compter sur lui pour lui remonter le moral. Il appréciait beaucoup le Nain à la pioche, c'était un des seuls à l'avoir accepté dès le départ. Il était quelqu'un de gentil et sincère, rien ne pouvait assombrir son cœur. Il était constamment jovial et même s'il n'était pas le plus courageux du lot, son cœur d'or avait bien plus de valeur aux yeux du Hobbit.
Lorsque que le Nain fut calmé, il tenta de reprendre son sérieux et de poursuivre la conversation.
-Nori est un peu spécial, il est réputé pour utiliser des techniques du mauvais côté de la loi pour obtenir des informations mais c'est un très bon espion. Pour en revenir à vot' problème, vous avez pas tellement l'choix. A moins que vous ne souhaitiez que j'vous fasse la traduction des déclarations d'amour dites en Khuzdul par mon cousin, une fois que j'aurais réussi à lui expliquer la situation, il reste que moi, conclut Bofur en se tournant vers le Hobbit.
-Je ne peux décemment pas vous obliger à faire ceci. Ce ne serait pas juste pour vous, le contra Bilbo, bien décidé à ne pas utiliser son ami pour cette mascarade.
-Vous m'obligez à rien, je vous l'propose. Ca me dérange pas, je souhaite vous rendre service. Mais je comprendrais si vous n'apprécieriez pas que j'sois considéré comme vot' prétendant. N'étant qu'un simple mineur, j'ai rien à vous offrir. Comparé aux princes ou même au roi je suis rien… Le sourire de Bofur disparut, laissant place à une tristesse inattendue pour le petit cambrioleur. Il n'avait encore jamais vu son compagnon déprimé, c'était assez déroutant et loin d'être agréable. Le pauvre ne semblait pas avoir beaucoup de confiance en lui, ce qui était regrettable car il possédait de nombreuses qualités, quoi qu'il en dise. Bofur était un véritable gentleman pour un Nain, il avait un sens de l'humour un peu douteux mais ne se moquait jamais de lui. Son affection pour son frère et son cousin était évidente, c'était probablement pour eux qu'il avait décidé de venir. Il y avait une certaine fragilité chez lui, cachée sous sa bonne humeur constante, il était attendrissant, voire attachant, et physiquement il n'était pas repoussant. Bilbo pouvait aisément dire que le Nain à la pioche était charmant et relativement séduisant avec ses longues moustaches, ses trois tresses et son ridicule chapeau. Son sourire était sa meilleure arme de séduction, plus d'une femme Hobbit auraient fondu devant, si tant est qu'elles outrepassaient le fait qu'il soit un Nain. Le semi-homme lui-même trouvait son ami plaisant à regarder et la vue de son sourire l'enchantait. De ce fait, le voir si abattu était tout à fait inacceptable, aucun nuage ne devait recouvrir ce visage si joyeux.
-Je serai honoré si vous acceptiez de me rendre ce service, lui assura Bilbo en laissant apparaître sa sincérité sans ses pupilles vertes.
A condition que vous soyez certain de votre décision. Un faible sourire se dessina sur les lèvres de Bofur, il ne pouvait déprimer lorsque le Hobbit était dans les parages, c'était comme si Bilbo était une douce lumière qui réchauffait le cœur et dont tout le monde voulait s'approcher. Le Nain l'appréciait énormément, il admirait son courage et sa détermination qui lui faisaient tant défaut, en un sens il était plus fort que lui. Pourtant il restait naïf dans bien des domaines et cela, le fabriquant de jouets souhaitait le protéger, afin que le semi-homme préserve son innocence le plus longtemps possible. Il avait trouvé un véritable ami en lui, un confident à qui il pouvait tout raconter sans gêne ou tout simplement avec qui plaisanter. Ils avaient eu plusieurs conversations sérieuses à propos de leurs maisons, familles, et vies. L'honnêteté qui émanait de cet être était aussi précieuse que toutes les gemmes que Bofur avait vues dans sa vie. Ce genre de connexion se gardait à vie. C'était un véritable honneur pour lui, il n'avait pas beaucoup de personnes de ce genre dans son entourage, alors qu'il donnait l'impression de s'entendre avec tout le monde, il n'avait pas vraiment de compagnons. En effet, le fabriquant de jouets était incapable de détester qui que ce soit et savait qu'une blague suffisait à démarrer la conversation mais les vrais confidents étaient rares. Bofur n'avait que très peu d'amis mais ceux qu'il possédait il y tenait. Bilbo avait réussi à se hisser dans cette catégorie avec ses boutons en laiton, ses livres remplis d'aventures extraordinaires, ses bonnes manières et sa timidité.
-Si ça vous dérange pas de passer plus de temps en ma compagnie et de m'laisser vous faire la cour. Farce ou pas, il faudra que tout l'monde y croit, bien que je doute que ça marche…
-Ne vous inquiétez pas, vous avez plus à offrir que vous ne le croyez, le rassura le Hobbit en posant sa main sur son avant-bras.
Ils restèrent silencieux quelques secondes, l'aîné repensant aux mots de son ami et le cambrioleur espérant avoir remonté le moral de son compagnon.
-P'têtre que nous devrions y retourner. Il s'fait tard.
-Vous avez raison, soupira Bilbo.
Les deux amis se levèrent, Bofur passa devant et alluma sa pipe. Le semi-homme lui lança un regard envieux mais ne fit aucun commentaire, d'ici peu il pourrait en faire autant, même si pour cela il devait supporter les deux crevants princes. Alors qu'il se motivait intérieurement, il fut plaqué contre le dos du Nain et s'accrocha à son pull pour récupérer son équilibre. Il allait lui demander la raison de son geste quand il entendit une voix différente.
-Te voilà ! On se demandait où tu étais passé. Ca fait un moment qu'on ne t'a pas vu. Tu ne saurais pas où se trouve Bilbo par hasard ?
C'était Fili et le jeune héritier semblait impatient, il devait en avoir marre de chercher le cambrioleur en vain depuis quarante minutes. Il paraissait un peu inquiet mais le cachait bien.
-Non. Pas vu. Vous l'avez toujours pas trouvé ? Comment un si p'tit bonhomme a pu vous échapper ?
-C'est notre cambrioleur, il est à la hauteur de sa réputation. On a fouillé partout alors je suis venu vérifier s'il ne se cachait pas dans un recoin, répondit le blond en essayant de regarder par dessus l'épaule du mineur.
-J'suis sûr qu'il va finir par revenir. Vous l'avez pas lâché de la journée, c'est normal qu'il veuille êt' seul.
-Comment tu sais ça ? Le ton de Fili était légèrement suspicieux, visiblement il avait senti que Bofur ne lui disait pas tout. Il lui ferait cracher le morceau, il était le neveu de Thorin Oakenshield après tout.
-J'imagine que c'est sa raison. J'aurais réagi pareil à sa place, c'est tout, expliqua calmement le Nain au chapeau en haussant les épaules.
-Hmm. Vraiment ? Et… à sa place, où te cacherais-tu ? L'épéiste n'était pas du tout convaincu, cela s'entendait parfaitement à son ton. Bilbo paniqua un peu et resserra sa prise sur le pull de son défenseur. Ce dernier le sentit et compatit avec le semi-homme, Fili était impressionnant, ses pupilles bleues claires fouillaient le visage de Bofur à la recherche de la moindre trace de mensonge. Il était bien parent de Thorin, cela ne faisait aucun doute, la même majesté émanait de lui, il en était presque effrayant. Honnêtement, le fabriquant de jouets était mal à l'aise face à ce regard perçant, le blond avait beau être son cadet, il avait une présence indéniablement imposante malgré sa petite taille. Cependant cela ne suffirait pas à effrayer Bofur, il avait proposé son aide au Hobbit et il tiendrait parole. Rassemblant tout son courage il se redressa légèrement. Il fallait qu'il paraisse détendu au maximum pour ne pas éveiller les soupçons, il se força donc à sourire innocemment puis souffla négligemment sa fumée au visage du jeune prince.
-Pas ici, finit par répondre le mineur d'une voix grave.
Il veut sûrement êt' loin d'vous alors cherchez un endroit auquel vous avez pas pensé.Voyant qu'il n'obtiendrait rien du Nain à la pioche, Fili renonça mais il n'avait pas dit son dernier mot. Bofur cachait quelque chose, il en était persuadé. Il faudrait qu'il prévienne Kili qu'ils avaient un obstacle, ils le surveilleraient de très près les prochains jours.
-Si tu le vois, dis-lui qu'on l'attend.
-J'y penserai, rétorqua l'aîné des trois alors que le blond s'éloignait.
Bofur soupira de soulagement, ses muscles se détendirent d'un coup, toute la tension contenue dans son corps s'échappa. Il venait de tenir tête à un héritier de Durin, une personne de la famille royale, un des neveux du roi, lui. Il n'avait jamais déclenché de bagarre de sa vie et s'était toujours plié aux règles, il était une personne facile à vivre et décontractée, se rebeller n'était pas une option pour lui. Ce qu'il avait accompli à l'instant était un exploit. Certes ce n'était pas Thorin lui-même, heureusement sinon il n'aurait pas réussi à rester aussi calme, mais Fili pouvait être aussi têtu et effrayant que son oncle par moment. Il avait besoin d'un bon remontant.
Une petite main se posa sur son bras et ce ne fut qu'à cet instant qu'il remarqua qu'il tremblait. De peur ou de stress, il l'ignorait. Bilbo effectua une légère pression pour le détendre, comprenant son état d'esprit. Il le regardait de manière inquiète, se doutant que c'était de sa faute si Bofur réagissait ainsi.
-Eh ben ! C'est pas tous les jours que j'me permettrais de défier un prince ! s'exclama le fabriquant de jouets en essayant de garder sa voix à un volume sonore minimal.
-Je suis vraiment désolé que vous ayez eu à le faire pour moi. Je vous remercie de m'avoir caché, s'excusa Bilbo, un air contrit sur le visage.
-Ah, c'est rien, vous en faites pas. J'vous ai promis de vous aider après tout. Par contre à partir de maintenant, y a deux princes déterminés qui veulent ma peau ! J'ferais mieux de rejoindre les autres pour ne pas éveiller les soupçons. A plus tard !Bofur s'en alla en sifflant comme si tout allait merveilleusement bien. Quand Bilbo le regardait, il avait du mal à croire qu'ils faisaient actuellement partie d'une quête pour détruire un dragon. Il émit un petit rire et secoua la tête, ce Nain était vraiment particulier.
Il était temps pour lui de se révéler, la récréation était terminée. Pour ne pas attirer plus d'ennuis au mineur, Bilbo enfila son anneau magique et se dirigea vers la cheminée devant laquelle il s'assit. Il ôta l'objet et redevint visible aux yeux de tous mais heureusement, les autres n'étaient pas tournés dans sa direction. Il avait quelques minutes de répit avant d'être étouffé et réprimandé. Il laissa son regard se perdre dans les flammes oranges qui dansaient dans l'âtre, c'était hypnotique, il sentit ses paupières se fermer, le sommeil le gagner petit à petit.
-BILBO ! hurla soudainement une voix plus aiguë que d'habitude.
D'un coup, un poids lourd s'effondra sur le Hobbit, l'écrasant au sol et le réveillant. Un deuxième se jeta sur lui une poignée de secondes plus tard. Les deux princes le serrèrent fort tout en faisant part de leur soulagement et de leur irritation. Ils ne le laissèrent pas parler et continuèrent de le câliner.
Derrière eux, le reste de la Compagnie les observait, certains avec exaspération, d'autres affectueusement. Thorin dut se retenir de ne pas pousser ses neveux pour avoir une conversation privée avec leur cambrioleur et lui dire à quel point c'était un imbécile d'avoir disparu de cette manière et qu'il l'avait inquiété. Il enviait les deux jeunes gens de pouvoir montrer leur attachement aussi librement.
-Pourquoi es-tu parti ? commença Kili.
-Es-tu fâché contre nous ? enchaîna aussitôt son frère.
-On s'est faits du souci ! On t'appelait mais tu ne répondais pas !
-Tu ne dois plus jamais faire ça ! On a eu si peur pour toi !
-Où étais-tu ?
-Je suis fatigué, répondit simplement Bilbo en se levant.
Je vais aller me coucher.
Les deux princes se regardèrent sans comprendre, ne s'étant pas attendus à cette réponse.
-D'accord ! reprit Fili.
On vient avec toi !
-Non ! s'écria le Hobbit, surprenant tout le monde.
Pas ce soir, nous sommes en sécurité dans une maison, à l'abri du froid et de la pluie et nous n'allons pas dormir à même le sol de la forêt, il n'y a donc pas de raison pour que vous passiez la nuit avec moi.
-Mais on veut rester avec toi ! couina Kili en utilisant ses yeux tristes.
-Pas ce soir. Je serai intransigeant. Et si vous insistez, je redisparaîtrai jusqu'à demain matin, reprit fermement le semi-homme.
Les deux frères se mirent à bouder mais ce fut peine perdue, Bilbo les envoya se coucher tous les deux loin de lui. Une fois que tout le monde ou presque en eut fait autant, il s'assit à nouveau devant la cheminée, essayant de profiter de la chaleur émanant des flammes. Un concert de ronflements résonna derrière lui, quasiment toute la troupe s'était endormie. Sauf un visiblement, si on en croyait les pas qui se rapprochaient de lui. Thorin s'installa à ses côtés et observa le feu à son tour. Ils restèrent silencieux quelques minutes, Bilbo ne sachant comment lancer la conversation, après tout, le roi l'avait ignoré toute la journée.
-Pourquoi ne dormez-vous pas ? se décida-t-il à demander à voix basse.
-Ces murs sont peut-être solides mais ils n'ont rien d’accueillant. Confier sa sureté à un homme qui se fait servir par des animaux est trop imprudent, résonna la voix grave du roi.
-C'est vrai que le contexte n'est pas idéal mais au moins nous ne sommes pas dehors à la merci d'Azog.
-Et vous ? N'avez-vous pas clamé être fatigué il y a trente minutes de cela ?
-Je n'arrive pas à trouver le sommeil, mon esprit est trop encombré pour que je me puisse me reposer, confia le Hobbit un peu honteux.
-Peut-être que vous auriez dû accepter la proposition de Fili et Kili, ils auraient sûrement réussi à vous distraire, murmura amèrement Thorin dont le poing s'était serré.
Durant leur conversation, Bilbo avait remarqué qu'une fois encore, son compagnon ne l'avait pas regardé une seule fois. Trouvant ce comportement impoli et contrariant, il se tourna vers lui pour lui faire face et le fixa patiemment. Au bout de deux minutes il vit sa mâchoire se crisper mais Thorin continua d'observer obstinément le feu.
-Quoi ? finit-il par dire sèchement.
-Pourquoi ne me regardez-vous pas ? Qu'ai-je fait qui vous a tant déplu que vous ne pouvez plus supporter de me faire face ? N'essayez pas de me mentir, je sais ce que je dis. Alors ? Suis-je donc si répugnant à vos yeux ? Est-ce pour cette raison que vous préférez regarder dans n'importe quelle direction sauf la mienne ? questionna piteusement Bilbo dont son cœur le faisait souffrir.
-Bien sûr que non ! Comment pouvez-vous penser cela ? s'exclama Thorin en se retournant face à son cambrioleur.
La tristesse était peinte sur le visage poupin d'ordinaire si joyeux, ses yeux verts ne reflétaient que de la peine et ne brillaient plus. Cela attrista le roi, il n'avait pas voulu faire de mal à ce petit être mais la vue de ces maudites tresses dans ses cheveux le rendait fou de rage. Personne n'avait le droit de le coiffer à part lui. Rien que de les voir à nouveau, il eut envie de prendre Orcrist et de les couper.
-Alors pourquoi ? Thorin maudit sa faiblesse en entendant la petite voix monotone du Hobbit, il ne pouvait y résister.
-Vous êtes marqué comme étant courtisé par Fili et Kili, personne d'autre qu'eux n'a le droit de vous toucher, de vous approcher ni même de vous convoiter, cracha le roi comme si cette explication était du poison.
-Ce n'est pas tout à fait vrai. D'après ce que j'ai compris, si un autre Nain veut en faire autant, il lui suffit de rajouter une tresse. Enfin, s'il veut me courtiser bien sûr ! Je ne dis pas que c'est ce que vous voulez faire bien évidemment ! s'empressa d'ajouter Bilbo en rougissant quand il vit le Nain le regarder de manière incrédule.
Et puis de toute manière ce n'est qu'un jeu pour eux comme pour moi. Ils n'ont pas l'intention de me séduire et je ne les laisserai pas faire. Ce n'est pas d'eux dont j'aimerais recevoir des avances.Deuxième lapsus de la soirée et deuxième regard étonné de la part de Thorin. Bilbo les accumulait ce soir, il était temps qu'il aille se coucher. C'est ça, c'était la fatigue qui le faisait parler sans réfléchir et non pas la présence rassurante du roi à ses côtés. Avec un peu de chance, il ne relèverait pas.
-Et de qui souhaiteriez vous en recevoir ? Mes neveux sont plaisants à regarder d'après ce que j'ai entendu. S'ils ne vous conviennent pas, je me demande qui pourrait se vanter de vous plaire.Visiblement, sa chance l'avait abandonné pour aujourd'hui et était déjà partie se coucher.
-Et bien… C'est assez délicat… Je ne suis pas sûr que… Les joues de Bilbo étaient en feu, elles étaient plus chaudes que les flammes dans la cheminée. Thorin venait de se rapprocher, oui, il ne rêvait pas, l'espace entre les deux hommes avait diminué. Il le regardait de manière si intense, comme s'il était la pierre la plus précieuse au monde, c'était flatteur et angoissant à la fois. La douce lumière orangée qui émanait de l'âtre se reflétait sur ses longs cheveux noirs, donnant l'impression qu'ils étaient vivants. Son visage paraissait plus détendu et jeune, ses yeux noirs. Bilbo avait terriblement chaud mais il se sentait bien.
-Quelqu'un de plus … âgé ? murmura le Hobbit alors que l'ambiance autour d'eux changea et devint plus intime.
Une main chaude et calleuse se posa sur sa joue, le faisant légèrement sursauter. Thorin n'était plus qu'à quelques centimètres, leurs visages se touchaient presque, leurs souffles se mêlaient.
-Tous les Nains de la Compagnie sont plus âgés qu'eux. Vous allez devoir être un peu plus précis que cela, chuchota à son tour le roi.
-Ah. Un guerrier probablement. Quelqu'un de fort et courageux.
-Mais encore ? demanda le Nain en se rapprochant de plus en plus.
-Digne et un fier représentant de son espèce. Quelqu'un qui n'a peur de rien et qui est prêt à tout, qui fait la fierté de ses hommes.Les yeux de Thorin s'embrasèrent comme s'ils allaient dévorer le Hobbit. Il franchit les derniers millimètres les séparant et posa ses lèvres contre celle du cambrioleur pour la première fois. La respiration de ce dernier s'accéléra, son cœur se mit à battre plus vite. Enfin il pouvait faire ce dont il avait rêvé tant de nuits auparavant. Quelque chose se passa au moment où leurs bouches rentrèrent en contact, ils le sentirent tous les deux, comme si la pièce manquante d'un puzzle venait d'être trouvée. Malheureusement ils ne purent en profiter plus de cinq secondes, un gros bruit de fracas provenant de l'extérieur les fit sursauter. Ils se séparèrent précipitamment, fuyant le regard de l'autre, gênés et frustrés.
-Vous devriez aller vous coucher, déclara Thorin comme si de rien n'était, tournant le dos au Hobbit et ne laissant pas transparaître la moindre trace de joie suite à leur étreinte.
Déçu, Bilbo ne répondit rien. Il se leva, lui jeta un dernier regard qui ne lui fut pas rendu et se dirigea vers un endroit libre. Il se coucha auprès de Bofur le cœur lourd et des larmes dans les yeux. Ce moment magique signifiait beaucoup pour lui mais vu l'indifférence du roi, ce n'était pas réciproque. Sans s'en rendre compte, il se rapprocha du corps endormi à côté de lui, recherchant un peu de réconfort, et se colla à lui.
Le fabriquant de jouets ouvrit péniblement les yeux, sentant quelque chose contre lui et baissa la tête pour voir les boucles cuivrées du Hobbit. Ce dernier tremblait et reniflait, comme s'il était en train de pleurer. Respectant son intimité, il ne lui posa aucune question mais passa son bras autour de la taille fine pour le détendre. Bofur attendit que son ami s'endorme avant d'en faire autant.
Le lendemain matin, Bilbo se réveilla seul et froid. Le souvenir de la veille l'assaillit et la tristesse s'empara de lui. Cette journée ne serait pas joyeuse pour lui. Il se rappela s'être accroché à Bofur dans la nuit mais le Nain n'était pas dans les parages, il devait être en train de déjeuner. Voulant le remercier de l'avoir accueilli, il se leva et se dirigea vers la table où la plupart des membres de la Compagnie se trouvait mais pas celui qu'il cherchait. En revanche Thorin y était. Le roi ne lui adressa qu'un bref regard avant de l'ignorer, ce qui envoya un coup de poignard dans le cœur déjà lourd du Hobbit.
Fili et Kili se précipitèrent sur lui pour lui dire bonjour, ils l'enlacèrent et l'embrassèrent sur la joue, lui demandant s'il avait bien dormi. Cet élan d'affection lui remonta un peu le moral et le fit sourire. Ils l'invitèrent à manger mais il refusa, ce qui les choqua. Le jeune archer le trouva pâle et s'inquiéta pour lui. Son frère posa sa main sur le front du cambrioleur mais ne sentit pas de fièvre. Essayant de les rassurer comme il put, il leur demanda s'ils n'avaient pas vu Bofur, ce à quoi ils répondirent qu'il était sur la terrasse avec les autres. Bilbo les remercia et s'y dirigea.
Le temps était ensoleillé, les bois entourant la maison de Beorn résonnaient de divers chants d'oiseaux. Quelques rayons de Soleil caressaient les fleurs sur lesquelles les abeilles butinaient. Au milieu de tout cela se trouvait un Nain solitaire en train de fumer. Il leva la tête quand il entendit des pas et sourit en voyant son ami Hobbit.
-Monsieur Baggins ! Bien le bonjour ! Comment allez-vous ?
-Ca va, je suis encore un peu fatigué, répondit mollement Bilbo, ce qui fit diminuer le sourire du fabriquant de jouets.
-Oui, vous avez pas beaucoup dormi la nuit dernière, commenta ce dernier.
-Non, reprit le Hobbit qui savait à quoi faisait référence son ami.
Je voulais vous remercier à ce propos. Je suis désolé de m'être laissé aller de cette manière.
-Vous avez rien à vous reprocher, je suis content que vous soyez venu vers moi. Est-ce que ça va mieux ?
-Pas vraiment, murmura Bilbo qui sentait les larmes revenir en repensant au baiser qu'il avait échangé avec le roi et à sa froideur de ce matin.
Il en essuya une qui s'était échappée mais ce fut comme si le barrage avait sombré et bientôt tout son visage fut recouvert de larmes. Il se mit à pleurer sans pouvoir se contenir. Bofur ne sut quoi faire mais il ne pouvait pas le laisser ainsi. Il le prit dans ses bras et lui caressa le dos, espérant que cela suffirait à le calmer, ne prononçant pas un mot. Les petites mains de Bilbo s'agrippèrent à ses vêtements telle une bouée de sauvetage alors qu'il extériorisait sa peine.
Cela dura de longues minutes mais au bout d'un moment, le Hobbit se reprit et recula pour mettre un minimum d'espace entre eux. Il se sentait affreusement gêné, Bofur, aussi gentil soit-il, ne méritait pas d'être mêlé à cette histoire.
-Je suis désolé, bredouilla le semi-homme, n'osant regarder le Nain.
-C'est rien. J'aimerais pouvoir vous aider.
-Vous en avez déjà fait beaucoup, le remercia Bilbo en essuyant ses yeux alors qu'il avait relevé la tête.
-Vous savez, il y a quelqu' chose que j'ai oublié. Si j'dois faire croire que j'veux vous courtiser, il faut que j'rajoute ma tresse pour l'faire savoir à tout l'monde.
-Ah euh oui, en effet.
-Puis-je ?Bilbo hocha la tête et Bofur se mit au travail. Il attrapa délicatement des mèches de cheveux cuivrées et les entortilla habilement. Le Hobbit se laissa faire et se détendit, c'était une sensation agréable, il aurait pu se rendormir si cela avait duré plus longtemps.
Quand ils retournèrent à l'intérieur et s'installèrent à la table, tout le monde remarqua la nouvelle tresse. Un sentiment de fierté s'empara de Bilbo lorsqu'il vit qu'il n'y avait pas que Fili et Kili qui grognèrent à sa présence. Il sentit trois regards noirs sur lui alors qu'il la caressait tendrement. Et si un sourire joyeux était dessiné sur ses lèvres, ce n'était en rien en rapport avec son moment intime avec le roi devant la cheminée la veille. Il échangea un regard complice avec Bofur qui lui envoya un clin d’œil qui le fit légèrement rougir.